Les chuchotis du lundi : Schilling se rebiffe, Joulie ouvre un hôtel, Rego marque des points, Kelsch retrouvé, Wilmotte relooke la Pinède, une table pour Vito, Bertrand booste Flo, Garrigues règne dans le Tarn, Arnaud et Valérie au Hochberg

Article du 26 juin 2017

Schilling se rebiffe

Jérôme Schilling (à droite) avec J-G Klein © GP

Jusqu’ici il vivait dans l’ombre de Jean-Georges Klein, signait avec lui la carte de la Villa René Lalique. Jérôme Schilling,  récent lauréat du challenge du président de la République, a été formé chez Hubert Maetz au Rosenmeer, Joël Robuchon à Paris, Roger Vergé au Moulin de Mougins, Thierry Marx puis Jean-Luc Rocha à Cordeillan-Bages, avant d’être chef chez Guy Lasaussaie, le deux étoiles proche de Lyon à Chasselay. Au château Lafaurie-Peyraguey, propriété de Silvio Denz, le big boss de Lalique, en Sauternes depuis 2014, il sera le chef à part entière, avec pour mission de gagner les étoiles pour une table de 40 couverts, une équipe de 12 personnes, dans un lieu de luxe appelé à être classé cinq étoiles et à intégrer la chaîne des Relais & Châteaux. La Villa René Lalique et le Château Hochberg, tous deux à Wingen-sur-Moder, continueront sans lui. Mais Schilling se bâtira ainsi, à Bommes et à deux pas d’Yquem, son mini empire et sa propre stature, car Jean-Georges, 67 ans le 27 octobre prochain, n’est pas près de raccrocher. A Lafaurie-Peyraguey, Jérôme aura davantage les coudées franches qu’il ne les avait à Wingen, dans son Alsace natale.  Voilà un beau challenge à relever.

Joulie ouvre un hôtel

Christophe Joulie © GP

Douze restaurants, dont Sébillon à Neuilly, André rue Marboeuf, les Congrès Maillot et Auteuil, l’Auberge Dab, le Mouton Blanc, le Montparnasse 1900 et l’Européen, plus l’historique Boeuf Couronné à la Villette, face à ce qui fut les abattoirs, notamment remplacé par le palais de la Musique et un fameux parc d’attractions avec la Géode en ligne de mire: voilà les contours du mini empire Joulie. Christophe, qui a succédé à son père Gérard, a gardé le souci – très aveyronnais – d’assurer le bon rapport qualité-prix partout. La nouveauté? Il lance un hôtel de 42 chambres au dessus du Boeuf Couronné, misant donc sur le Nord-Est de Paris en expansion. Une première pierre dans le jardin des Costes, autre dynastie aveyronnaise, qui a déjà développé quelques hôtels légendaires à côté de leurs brasseries de renom.

Rego marque des points

Raphaël Rego en cuisine © GP

Il a gardé sa première table (Maloka Alma Brasileira) dédiée à la cuisine brésilienne, rue de la Tour d’Auvergne dans le 9e, l’a doublée avec une autre dans le 7e, vouée aux saveurs du Brésil vues à la braise (Maloka Fogo e Brasa). Voilà le troisième et dernier acte de la geste franco-brésilienne jouée par Raphaël Rego à Paris. Ce jeune ancien de Robuchon, Taillevent, Rostang, natif de Rio de Janeiro, passionné par l’idée de transmettre les saveurs de ses racines, a ouvert Oka, rue Berthollet dans le 5e, « sa » table gourmande, en guise d’acte de foi traçant un pont entre la cuisine française et l’Amazonie. Manioc, tucupi (l’extrait de manioc), cachaça sont convié à la fête ans un cadre design avec sa cuisine ouverte qui a pris la place du plus vieux restaurant brésilien de Paris: Boteiquim Brasilero. Pour tout savoir, cliquez . Etoile en vue…

Kelsch retrouvé

Patrick Raingeard et Christohe Kelsch © GP

Christophe Kelsch, grand pro de la salle, qu’on connut au Crillon, suivi au Plaza Athénée, Georges V, aux Élysées du Vernet époque Briffard, au Ritz cinq durant, puis au Shangri-La, avec Christophe Moret, avait été embauché au Laurent, puis remercié, sans qu’on sache pourquoi, au bout d’un mois et demi. Voici ce maestro de son registre dans un poste correspondant à son rang d’exigence, dans l’une des plus belles maisons de la Côte d’Azur: au fameux Cap Estel, qui appartient à la famille Lewis et où officie l’excellent Patrice Raingeard. Nouveau directeur de la restauration, il veille sur la table étoilée aussi bien que sur les splendides buffets de plein air qui égaient la piscine. On en reparlera.

Wilmotte relooke la Pinède

Jean-Michel Wilmotte © GP

Il vient de signer le nouveau chai des vignobles Paul Dubrule, à la Cavale, en Luberon. Jean-Michel Wilmotte, qui n’arrête jamais les projets, s’apprête à dessiner les nouveaux plans de la Résidence de la Pinède à Saint-Tropez, ralliée au groupe LVMH, via le groupe des hôtels Cheval Blanc (présent à Courchevel, Saint-Barth, aux Maldives et bientôt à Paris, dans la Samaritaine face à la Seine). Sa mission: faire contemporain avec chaleur sans négliger l’héritage provençal, en réunissant  une demeure laissée quasiment à l’abandon sur le domaine à celle déjà existante avec sa tour, son jardin, sa pinède, sa plage, sa piscine. Chambres, table trois étoiles signée Arnaud Donckèle, nouvelle brasserie chic à la mode méditerranéenne devraient donner un visage neuf à ce pôle d’avant-garde de la restauration tropézienne.

Une table pour Vito

Vito Alessi © GP

Il a remis à flots la cuisine du Sofitel Porticcio, jusque là voué au diététique absolu, mêlant la cuisine de ses racines siciliennes aux meilleurs poissons de la baie d’Ajaccio. Vito Alessi, Parisien ayant voyagé sur la côte d’Azur et dans le Sud-Ouest – notamment à l’abbaye des Capucins de Montauban -, qui sait travailler le foie gras, comme le poisson, les saveurs de Méditerranée en version légère, comme l’Italie en majesté, va créer une neuve table plus exclusive, avec moins de couverts, en ligne de mire face à la mer et aux bateaux qui croisent sur le golfe d’Ajaccio. Ouverture prévue: au printemps prochain, avec des mets très séducteurs comme ce rouget au caviar d’aubergine, caponata, pickles d’oignons rouges et huile d’olive corse de Marquiliani.

Bertrand booste Flo

Olivier Bertrand © Le Figaro

« Une offre inadaptée, des prix trop élevés, un repli sur soi »: qui critique ainsi le groupe Flo? Son propriétaire, Olivier Bertrand, premier restaurateur indépendant de France, qui possède plus de 700 établissements (d’Angelina à Lipp, sans oublier le Pied de Cochon et les Burger King), et n’hésite à ruer dans ses propres brancards. Le magnat Bertrand a racheté la marque Flo avec ses enseignes historiques pour la réveiller. « Les brasseries du groupe Flo ont réagi à la baisse de fréquentation en augmentant les prix, puis en resserrant l’offre. Aujourd’hui, celle-ci est trop chère et inadaptée. Il faut aussi les ouvrir sur l’extérieur, en aménageant des terrasses », vient-il de confier à notre confrère Le Figaro. La Coupole, le Boeuf sur le Toit, Flo, Julien et le Vaudeville devraient donc vite subir un coup de fouet.

Garrigues règne dans le Tarn

Valérie et Gérard Garrigues © GP

Gérard Guarrigues a été le fidèle lieutenant d’Alain Dutournier (au Trou Gascon, puis au Carré des Feuillants), le chef étoilé de Toulouse au Pastel, puis tint deux tables de musée dans la ville rose. Le voilà désormais revenu dans son pays ou presque – il est né à Laguépie, dans le proche Tarn-et-Garonne -, reprenant une auberge de village sur l’une des plus jolies places du Tarn à Castelnaud de Montmiral. Cela s’appelle le Ménagier, rendant hommage aux plats d’autrefois. La terrasse sous les arcades, face au pittoresque hôtel de ville, est un bonheur. L’accueil de Valérie, qui travailla jadis en cuisine à la Tour d’Argent, puis, avec lui, au Carré des Feuillants, est complice. La cuisine superbe, enraciné, les prix doux. C’est la future belle étoile du département. Pour tout savoir, cliquez là.

 Arnaud et Valérie au Hochberg

Valérie Boulanger et Arnaud Barberis © Roland Letscher

Ils tenaient la Bellevue à Saulxures, dans les Vosges alsaciennes, côté vallée de la Bruche, mais aussi le Bistrot des Arts sur les quais de l’Ill à Strasbourg. Voilà désormais Valérie Boulanger et Arnaud Barberis, couple à la ville comme à scène, reprenant de dynamique façon la gérance du Château Hochberg qui figure à la fois comme salons de réception pour la maison Lalique (avec le tout neuf Pavillon Hochberg signé de l’architecte tessinois Mario Botta) et comme annexe moins chère de la Villa René Lalique, propriété de Silvio Denz et gérée par Jean-Georges Klein, avec son aristocratique construction XIXe. Ils prennent ainsi la place de Jérôme Schilling, qui part dans le Sauternais (voir plus haut), et vont imprimer leur marque personnelle au lieu. Arnaud, natif de Nice, passé en Alsace au Relais de la Poste de la Wantzenau, bûcheron dans une vie antérieure, a été gagné par l’amour de la montagne et joue d’une partition néo-vosgienne, rustico-sophistiquée, avec des notes épicées venues d’ailleurs. Parmi ses plats fétiches: une marmite de tripes légendaire et une tendre poitrine de cochon braisée et grillée avec crumble de pain et jus de cuisson ! A suivre de près…

Le neuf Pavillon Hochberg de Mario Botta © Roland Loetscher

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