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Les chuchotis du lundi : Bernard Loiseau 20 ans après, l’Alsace attend, Jean Imbert en Polynésie, Jean-Michel Lorain passe la main à Alexandre Bondoux, et Michel Troisgros transmet le flambeau à son fils César, le mystère Vong, le Paris de Nicolas Sale, le Grand Monarque fête la 40e paulée des vins de Loire

Article du 27 février 2023

Bernard Loiseau 20 ans après

Blanche, Bérangère et Bastien Loiseau © GP

Beaucoup d’hommages et d’émotions, vendredi dernier pour le 20e anniversaire de la mort de Bernard Loiseau, qui se prolongeront durant l’année 2023. Après une messe commémorative le 24 février dans la basilique Saint-Andoche de Saulieu, puis une autre le dimanche 26 dans l’église Notre-Dame du Bon-Secours à Paris rue N-D des Champs dans le 6e, aura lieu un festival, du 27 février au 5 mars, dédié à Bernard Loiseau, avec un trophée à la clé, à la Cité Internationale de la Gastronomie à Dijon, auquel participeront notamment Eric Pras de chez Lameloise à Chagny et les chefs du groupe Bernard Loiseau, Patrick Bertron, Louis-Philippe Vigilant et le pâtissier Xavier Jacquin. A Saulieu, ce sera un dîner à quatre mains le 30 avril avec Guy Savoy, le compagnon de toujours, puis, le 18 septembre, un dîner hommage à Sao Paulo, chez D.O.M., avec Alex Atala, ancien de la Côte d’Or, avant un autre encore, le 24 septembre, chez Daniel Boulud à New-York. Le 15 octobre, Mauro Colagreco, autre élève de Bernard Loiseau, sera à Saulieu pour un « 4 mains ». Le 19 novembre verra un « six mains », toujours au Relais Bernard Loiseau, avec les maisons Bocuse et Troisgros, deux grandes maisons de fondation, de formation et d’amitié pour le regretté Bernard. Enfin les 5 et 7 décembre, les repas hommages s’achèveront au Japon, à Tokyo et Kobé (où Bernard Loiseau avait créé une Côte d’Or). Les plats emblématiques se succèderont dans les différentes maisons du groupe, à Dijon, Beaune, et  enfin Besançon, où la cadette Blanche sera à l’oeuvre à « Loiseau du temps », qui devrait ouvrir fin avril/début mai. Bérangère, elle, dirige le groupe aux côtés de sa mère Dominique, tandis que Bastien, diplômé de l’école hôtelière de Lausanne, qui travaille dans l’immobilier à Paris, est administrateur. Sacrée famille ! Assurément, s’il revenait, le grand Bernard serait fier d’eux…

L’Alsace attend

« L’Alsace, elle attend », tableau de Jean-Jacques Henner

« L’Alsace, elle attend » : c’était le titre d’un tableau légendaire signé Jean-Jacques Henner, datant de 1871, alors que la province perdue, annexée par la Prusse, attendait de revenir à la France. Ce pourrait être le titre des attentes de l’Alsace ces jours-ci. Le Michelin annoncera ses nouveaux lauréats étoilés lundi 6 mars à Strasbourg, au palais des congrès, lors d’une cérémonie avancée à 10h (au lieu de 16h) pour cause de grève le lendemain. Ce que l’Alsace attend ? Bien sûr, de nouvelles étoiles, dont une ou plusieurs « trois étoiles » qui lui font défaut depuis celle enlevée en 2019, au début du règne de Gwendal Poullennec, à l’Auberge de l’Ill. Rappelons qu’il y a vingt ans, la région en possédait trois : celles du Crocodile, du Buerehiesel à Strasbourg, celle de l’Auberge de l’Ill, et même une quatrième si on annexe l’Arnsbourg et Baerenthal du temps des Klein. Cette fois-ci, l’Alsace attend au moins la promotion – attendue – d’Olivier Nasti à Kayserberg. Et, parmi les maisons qui se bousculent au portillon, rappelons également la Villa Lalique de Paul Stradner à Wingen-sur-Moder et la Fourchette des Ducs de Nicolas Stamm et Serge Schaal à Obernai. Mais la Merise de Laubach, Jean-Yves Schillinger à Colmar et le Cheval Blanc ont également deux étoiles … Sans oublier, bien sûr, l’Auberge de l’Ill de Marc Haeberlin qui n’a jamais démérité. Pour notre part, manière de prendre de l’avance sur l’événement, nous remettrons des trophées « Pudlo Alsace 2023 » au Régent Petite France à Strasbourg ce lundi. Une manière de célébrer la permanence de l’Alsace gourmande.

Jean Imbert en Polynésie

Jean Imbert au Brando © DR

Il dévore le monde à belles dents. Présent à Paris au Plaza Athénée et, juste en face, chez Dior, avenue Montaigne, naviguant à bord du Venice Simplon-Orient-Express par le groupe Belmond côté fourneaux, signant la carte du Cheval Blanc de Saint-Barth, Jean Imbert prend désormais en main les destinées du Brando, en Polynésie, à 20 mn d’avion au nord de Tahiti. Il prend la place de Guy Martin – qui y demeura cinq ans –  dans ce qui fut jadis le mythique domaine de Marlon Brando, découvert par lui alors qu’il tournait Les Révoltés du Bounty (en anglais « Mutiny on the Bounty ») avec Trevor Howard d’après une nouvelle de Jules Verne. Le lieu, qui fit rêver le petit Jean Imbert – il avoue posséder depuis belle lurette une affiche du film dans sa cabane de Sables d’Or les Pins -, est devenu un rêve d’hôtel écologique, sur l’île privée de Tetiaora, avec ses bungalows en bordure de plage et ses trois lieux de restauration : Le Bob’s Bar, Le Beachcomber Café et la table Les Mutinés, qui sera réaménagée au printemps prochain avec la complicité de Rémi Tessier qui a notamment oeuvré à la décoration du restaurant « Jean Imbert au Plaza Athénée ». « C’est un immense honneur pour moi de réinventer les cartes de cet établissement mythique. J’ai eu la chance d’être présent à l’ouverture il y a 7 ans et c’est un des lieux qui m’inspire le plus et qui me fait rêver», note le vainqueur de Top Chef 2012, ajoutant, à propos de sa mission ici même, vouloir : « revenir à la cuisine locale, travailler avec les producteurs et les pêcheurs pour mettre en valeur les produits que la nature nous offre. ».

Jean-Michel Lorain passe la main à Alexandre Bondoux

Jean-Michel Lorain et Alexandre Bondoux © GP

Cette Côte Saint-Jacques légendaire sur l’antique N6, Jean-Michel Lorain, qui l’administre avec fierté, a su la moderniser avec un mélange savant de richesse et de sobriété au bord de l’Yonne. La nouveauté ? Il passe le flambeau en cuisine à son neveu – et fils de sa soeur qui tient le « Rive Gauche » juste en face – Alexandre Bondoux. Le premier, 64 ans, formé chez les Troisgros à Roanne, Girardet à Crissier, au Taillevent à Paris, est un pur produit des années 1980. Le second, âgé de 31 ans, est passé au 9e Art à Lyon chez Christophe Roure, et ici même, puis a voyagé en Nouvelle Zélande et en Australie. Sous sa houlette, tradition et modernité, attention aux légumes et aux saisons, au marché, comme aux voyages, ils livrent ici une palette de haut niveau qui séduit avec force. Les plats d’hier et d’aujourd’hui que l’on picore avec grâce ? L’artichaut croquant avec la truffe noire melanosporum ou la grandiose île flottante au caviar Kristal, avec sa gelée d’ail et sa crème légère au raifort – un bien joli et tonique mariage – comme la classique ici terrine océane d’huîtres spéciales Gillardeau en gelée. Une passation de pouvoir réussie !

Michel Troisgros transmet le flambeau à son fils César

César et Michel Troisgros © Maurice Rougemont

Il s’apprête à fêter ses 65 ans (il les aura le 2 avril prochain) et passe le relais à son fils aîné, César, 36 ans, passé notamment chez les frères Roca à Gérone, Thomas Keller à Yountville en Californie et au restaurant Olympe de son oncle Claude à Rio au Brésil, et qui était chef des cuisines de fait à Ouche depuis les débuts de maison, déménagée depuis Roanne où il exerçait depuis 2012. A quinze jours de la sortie du nouveau Michelin France 2023, Michel Troigros, héritier d’une solide tradition de chefs trois étoiles, qui perdure depuis plus de cinquante ans, après son père Pierre et son oncle Jean, se retire des fourneaux, mais demeure à la gestion de ses maisons – qui comportent notamment le Central à Roanne et la Colline du Colombier, désormais en vente, où exerce son cadet Léo. Sa fille ainée Marion revient, elle, à Ouches pour créer un centre de gîte équestre. Michel et son épouse Marie-Pierre y entreprennent, de leur côté, la construction d’un bâtiment à vocation boulangère et agricole, toujours à Ouches. On n’arrête pas la famille Troisgros.

Le mystère Vong

Vai Kuan Vong © GP

Un mystère pour les gourmets parisiens : comment Vong, rue de la Grande Truanderie, dans le quartier des anciennes Halles, cette maison chinoise raffinée au décor évoquant une maison rurale des environs de Canton, peut-elle encore échapper au radar des inspecteurs Michelin. On sert là depuis quelque 42 ans, sous la houlette de ce briscard de Vai Kuan Vong quelques uns des meilleurs dim sum de Paris, sans omettre un canard pékinois exécuté dans les règles de l’art à partir d’une volaille de Challans de haute tenue, avec sa peau laquée et ses fines crêpes badigeonnées d’une sauce haricots jaunes et prunes noires. Un repas ici ? Forcément une fête en l’honneur des saveurs de la Chine du Sud pratiquées par un natif de Macao maître de son art. La maison, au sommet du genre à Paris, demeure absente du guide rouge. Incompréhensible !

Le Paris de Nicolas Sale

Cela s’appelle « Si Paris était… » et c’est signé Nicolas Sale. Un bel hommage signé par l’ancien chef du Ritz, pur parisien, à sa ville natale, avec des rencontres rares, des clins d’oeil d’amitié, des bouffées de gourmandises. Le chocolatier Jacques Génin, le grand aîné MOF et Bocuse d’Or Michel Roth et sa « table cachée », le pâté en croûte dans tous ses états, le beurre, vu par la MOF fromagère Laetitia Gaborit, l’école Médéric ou encore l’association des disciples Escoffier sont notamment mis en valeur avec chaleur et ferveur, relayés par les jolies photos de Delphine Evmoom. Un monument scellé à l’amitié par un chef sensible et baladeur (qui vante la promenade nocturne au long des quais de Seine ou celle du Sacré Coeur) qu’on attend à Rungis en juillet prochain.

Le Grand Monarque fête la 40e paulée des vins de Loire

Les Jallerat au Grand Monarque © DR

Dimanche, 26 mars, la Paulée des vins de Loire fêtera ses 40 ans à Chartres. Créé par Georges Jallerat, l’aubergiste du Grand Monarque, dont le fils Bertrand prolonge le bel héritage aujourd’hui, et Jacques Puisais, le prophète tourangeau du « goût juste » et des savants mariages vins/mets sur le modèle de la paulée de Meursault, cet événement a pour but de mettre en valeur les vins et vignerons de la Loire dans ses grandes largeurs. Du Berry au Muscadet, de Chinon à Bourgueil, de Sologne en Anjou, sans oublier Vouvray et Montlouis, toute la Loire vineuse se donnera rendez-vous d’abord sous la halle de Chartres le 26 mars pour une fête des vignerons, qui se prolongera sous une charpente de la cathédrale, avant de connaître son apothéose avec un repas chez les Jallerat, ancien et nouvelle génération, Nathalie, Bertrand et Georges, pour lequel officiera Christophe Hay, le nouveau deux étoiles de Blois.

Les chuchotis du lundi : Bernard Loiseau 20 ans après, l’Alsace attend, Jean Imbert en Polynésie, Jean-Michel Lorain passe la main à Alexandre Bondoux, et Michel Troisgros transmet le flambeau à son fils César, le mystère Vong, le Paris de Nicolas Sale, le Grand Monarque fête la 40e paulée des vins de Loire” : 2 avis

  • Dominique

    Bonjour Gérard, un Canard Laqué à me conseiller à Paris ?

  • Gérard

    Le mystère Vong ? Le mystère se situe plutôt dans votre permanente mise en avant de cette mauvaise table chinoise… Hélas j’y suis allé deux fois et je déplore ses prix bien trop chers et sa qualité très ordinaire… Ayant eu la chance de déguster sur place lors de nombreux voyages les vraies cuisines chinoises de différentes régions de cet immense pays, je peux affirmer que celle de Chez Vong est une pâle copie qui ne reflète nullement leurs subtilités et leurs saveurs originelles. Vous vantez aussi de temps en temps Lili au Peninsula à Paris alors que ce restaurant offre un très mauvais rapport qualité-prix ; seul le décor peut impressionner. A se demander si votre objectivité fluctue au gré des invitations et du traitement VIP dont vous bénéficiez de la part de certains restaurateurs ?

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