Les chuchotis du lundi : un reconfinement pour rien? – Christophe Leroy ou l’éternel retour – les tables de Rungis peuvent ouvrir – La Savoie aux abois – Hélène Darroze chez elle – Le Cerf fête ses 90 ans – Menaces sur la gastronomie française

Article du 16 novembre 2020

Un reconfinement pour rien ?

Non Essentiel © Stéphane Jego

On regrette Edouard Philippe, qui avait du charisme, savait s’affirmer et booster ses troupes. Jeudi dernier, on a vu un premier ministre mué en « Docteur Tant Pis », laissant entendre au petit commerce qu’il n’avait guère de perspective d’avenir devant lui, que tout était de la faute du virus et que l’on verrait bien ce que l’on verrait après le 1er décembre. On n’a évidemment rien contre Jean Castex et son délicieux accent du Sud Ouest. Mais à qui faire croire que l’ex-maire de Prades (Pyrénées Orientales), ex secrétaire général adjoint de la présidence de la République (époque Sarkozy) et natif de Vic-Fezensac (Gers), va redonner le moral aux Français? Les restaurateurs, les cuisiniers, les cafetiers, comme les libraires, jugés « non essentiels« , s’interrogent à bon droit sur leur devenir. « Rien ne devrait s’achever le 1er décembre prochain, ni aller mieux« : c’est bien ce que l’on a retenu de sa dernière intervention télévisée où les métiers d’accueil, de bouche et les vendeurs de produits culturels figuraient bien comme des « laissés pour compte« . Le pire scénario? Il est hélas fort probable. C’est celui évoqué vendredi par Philippe Etchebest dans l’émission les Grandes Gueules sur RMC : « il va y avoir un confinement dur jusqu’au 15 décembre, puis un allégement pour les fêtes. Les restaurants, il y a peu de chances qu’ils soient ouverts. Et après la courbe va repartir donc il y aura un reconfinement plus dur. C’est les montagnes russes. Donc, pour nous, l’avenir est très sombre. »

Christophe Leroy ou l’éternel retour

Christophe Leroy © GP

On l’a suivi partout, à Avoriaz, à Saint-Martin, à Marrakech, à Paris, jadis, rue de Marignan, à Ramatuelle, bien sûr, dans son ancien moulin de la route des plages mué en table de charme, au coeur de Saint-Tropez, où il fut à la fois bistrotier, reprenant l’ancien Fuchs, restaurateur de charme et traiteur, mais aussi animateur des nuits blanches de la station. On l’a découvert jadis à la Messardière, où il signa le repas de mariage de Johnny Hallyday. Normand de Montpinchon, formé chez Maximin, Ducasse, Senderens, la Poste à Avallon, le Crillon à Paris, chef au domaine de Belieu à Gassin, longtemps adopté par la côte varoise, il revient à Paris dans un lieu un peu secret, façon club privé : un chic appartement de la rue Quentin-Bauchard, sis juste derrière le Prince de Galles et le George V, avec sa salle de restaurant sélect, sa belle collection de photos souvenirs, ses canapés profonds. Où il mitonne des mets de haute volée en sur-mesure avec des vins adéquats. Pour tout savoir, cliquez .

Les tables de Rungis ouvertes

L’équipe de la cantine du Troquet Rungis en décembre 2016 © GP

Le sait-on? Les restaurants de Rungis, comme la Marée, l’Aloyau, la Cantine du Troquet plus une quinzaine d’autres – ils sont dix huit en tout – , bénéficient d’une dérogation au confinement et sont ouverts pour « répondre aux besoins quotidiens des opérateurs du MIN et les acheteurs ».  On peut donc venir à Rungis faire un sort aux belles huîtres et aux poissons des Le Puy, aux belles viandes des Soulenq, comme aux jolis plats du jour de Stéphane Bertignac et de Christian Etchebest, tout près du Pavillon Bio. Seule condition pour être admis à ces tables : bénéficier d’une carte d’accès au Marché d’Intérêt National. Attention il n’y a pas de réservation et les places – protocole sanitaire strict obligé- sont limitées.

La Savoie aux abois

Le K2 Chogori à Val d’Isère © DR

Les stations de montagne ouvriront-elles aux dates prévues (5 décembre pour Courchevel, Méribel ou l’Alpe d’Huez, 11 décembre pour Avoriaz, 12 décembre pour Megève ou Serre-Chevalier, et oublions celles initialement prévues fin novembre pour Chamonix et Val d’Isère )? Rien n’est moins sûr. Savoie et Haute-Savoie sont aujourd’hui les deux départements les plus impactés par la propagation du coronavirus, ceux où la vitesse de progression est la plus forte. Et l’Isère n’est guère mieux lotie. « Les hôpitaux de Sallanches, Annecy, Chambéry ou d’Albertville sont déjà débordés. On ne les imagine pas, recevoir, en plus, les accidentés du ski« , nous assure-t-on du côté de Combloux, Cordon et Megève. Même si chaque station annonce ses nouveautés hôtelières et gourmandes (le K2 Chogori, hôtel style chalet de grand luxe, à Val d’Isère, le Marielle, hommage à Marielle Goitschel à Val Thorens, le très novateur Diamond Rock à Tignes, l’arrivée théorique de Anne-Sophie Pic le 18 décembre au Four Seasons megevan, la nouvelle version de la Sauvageonne repris par un groupe parisien et le nouveau restaurant de Julien Gatillon, comme, à Courchevel, l’ex Katz du Chabichou repris par David Brémond avec Eric Frechon pour une nouvelle version de la Ferme de Saint-Amour), l’ouverture des stations pourrait être retardée à mi-janvier. Et l’on y espère tout sauf une saison blanche au pire sens du terme.

Hélène Darroze chez elle

On ne sait si Hélène Darroze avait prévu ce second confinement, mais, là, elle est vraiment au coeur du sujet, avec ces suggestions faciles, ces incitations à faire bien au fil des idées du jour. Cela s’appelle Chez Moi, tout simplement. Et ce livre-ci, elle l’a vraiment fait, pensé, écrit, illustré, elle-même, de « A à Z ». Avec 50 recettes, autant de photos, des astuces et conseils, livrant ses adresses secrètes pour elle, ses filles, ses amies. Une salade au stilton (qu’on peut remplacer par n’importe quel bleu) et aux noix, des travers de porc au sirop d’érable et noix de pécan, des linguine tomate/burrata/basilic, une brandade de morue, un poulet (évidemment des Landes, on ne se refait pas) aux coquillettes, un gâteau de pommes de terre et d’andouille béarnaise, un burger de foie gras, des haricots cocos à la tomate, des figues rôties au romarin, du riz au lait, et voilà le type même de « cuisine du placard » sachant utiliser tous les ingrédients d’une cuisine à bon escient. Hélène chez elle? On a bien envie d’y être.

Le Cerf fête ses 90 ans

Melina, Clara, Michel Husser et Joël Philips © DR

C’est la plus ancienne maison étoilée d’Alsace, pile au début de la route du vin, qui détient son macaron depuis 1936 (la première étoile de l’Auberge de l’Ill date, elle, de 1952). Tenue de bout en bout par la même famille. L’Hostellerie du Cerf à Marlenheim, emmenée par l’arrière-grand-père Paul Wagner, qui conquiert le succès avec son presskopf, sa fameuse bouchée à la reine (qui restera le plat emblématique de la maison) ou sa charlotte au kirsch, fête ses temps-ci ses 90 ans d’existence. Après Paul Wagner, c’est son petit-fils Robert Husser qui conserve l’aura, gagnant même une seconde étoile avec son fils Michel. Aujourd’hui, c’est la 5e génération qui est au pouvoir, avec Clara et Melina, les filles de Michel Husser, associées au chef Joël Philipps. C’est cette Saga du Cerf que conte Claude Keiflin aux éditions du Signe, dans un petit livre haut en couleurs, riches en documents d’archives et anecdotes variées. Une histoire qui continue au quotidien dans la gourmandise et la bonne humeur.

Menaces sur la gastronomie française

Ils ont accompli le tour du monde des popotes, n’oublient personne, citent à tout va, se baladent chez les grands comme chez les moins connus, notent l’énorme pluie d’étoiles déversée par le Michelin sur le Japon, mais font remarquer que « l’Asie peut être difficilement considérée comme une source de concurrence » (pour la gastronomie française), évoquent l’Espagne et la Scandinavie, les pays d’Amérique Latine et les anglo-saxons, relèvent la baisse d’influence des guides mais traitent les « 50best » avec des pincettes, sans indulgence particulière. Lui est énarque, elle biologiste de formation. Patrice et Christine van Ackere, passionnés de cuisine, livrent le fruit de leurs recherches dans un gros livre de près de 400 pages, richement documenté, où des esquisses de solutions, sinon des recettes pour le futur, permettent d’envisager l’avenir de la gastronomie française avec sérénité. L’ouvrage est préfacé par Pascal Ory, historien passionné et auteur du « Discours gastronomique français« , une référence.

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Publié le 16 novembre 2020 par

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