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Les chuchotis du lundi : l’embrouillamini des World Restaurant Awards, l’hémorragie de la Scène Thélème, la nouvelle donne de l’Oasis, les MOF attendent leur col, l’avènement de Jérôme Schilling, le succès du 2e Bouillon Chartier, dernières nouvelles de Saint-Tropez

Article du 25 février 2019

L’embrouillamini des World Restaurant Awards

Andrea Petrini © GP

Une liste de plus ? Un classement de trop? Une suite de récompenses bien dosées? Un embrouillamini réussi? Ou encore un palmarès à paillettes pour mieux perdre sa boussole? C’était lundi dernier à Paris, un panel de chefs digne des 50best, une montée des escaliers sur moquettes rouges comparable à celle du festival de Cannes, des belles en robe longue, des messieurs en tenues de gala, le tout au Palais Brongniart devenu pour un soir la rampe de lancement des World Restaurant Awards, le tout orchestré par Andrea Petrini, italien résident à Lyon, citoyen du monde, ex président français des 50best, travaillant désormais pour lui-même avec son complice Joe Warwick, qui s’était fait, pour la soirée, la tête de Jean-Pierre Coffe. « Dieu de la gastronomie » pour les uns, selon la formule de Verane Frediani, auteur d’un livre et film sur les femmes chefs, présente dans la salle, clown céleste et « go-between » de talent  pour les autres, il a su fédérer le temps d’une soirée de prestige les bonnes volontés des anciens et des modernes. Pour les premiers, Alain Ducasse, promu « chef non tatoué » de l’année, Alain Passard, vanté pour son compte instagram ou encore Matthieu Viannay de la Mère Brazier, en défenseur zélé de la tradition à Lyon. On n’oublie pas la consécration comme table « hors carte » de Wolfgat, une table de pêcheur en Afrique du Sud, et à Paris, de notre chef de l’année au Pudlo 2018, Christophe Pelé au Clarence pour sa « pensée original ». Le tout était orchestré, en anglais, par Antoine de Caunes  qui animait une soirée qui faisait de l’oeil à celle du Fooding en plus glamour. Bref, avec un large panel de juges issus de 37 nationalités différentes, ce premier palmarès tonique donnait le ton d’un gastronomie décomplexée. La liste des lauréats, ici-même.

Alain Ducasse « Tattoo-Free Chef » © Dominique Charriau/Getty Images

L’hémorragie de la Scène Thélème

Julien Roucheteau © Alban Couturier

Après deux ans et demi d’existence, la Scène Thélème s’apprête à changer de visage(s). Son 3e chef arrive. Il est japonais, se nomme Yoshitaka Takayanagi, vient de Neige d’Eté, a travaillé à l’Agapé, chez Alléno (chez Ledouyen), Ducasse (au Meurice), Kura, Ze Kitchen Gallery et le Grand Véfour. Sa mission : conserver l’étoile à cette maison qui se veut « restaurant culturel », avec sa salle de spectacle contigue du restaurant (ce fut jadis la maison de Guy Savoy rue Troyon), baisse ses prix, sinon son ambition, sous la houlette de son gourmand patron, Jean-Marie Gurné, ancien de Nestlé. La loge Thélème, son bistrot vis à vis, qui a pris la place de l’Huîtrade continue. Du côté des chefs et du personnel, c’est en tout cas l’hémorragie avec le départ de Julien Roucheteau, qui venait de gagner ses galons tricolores de MOF, avait conquis la 2e au Lancaster et souhaiter faire de même rue Troyon, mais aussi de Frédéric Pedrono, ex directeur de salle de Ledoyen avec Christian Le Squer puis Yannick Alléno, qui « attend de trouver la bonne opportunité« . Le sommelier Daniel Pires, venu de chez Laurent, était déjà parti, lui, cet été, vers l’Est, ralliant le Royal Champagne près d’Epernay.

Frédéric Pedrono © Alban Couturier

La nouvelle donne de l’Oasis

Alain Montigny et Nicolas Davouze © AA

C’est fait : l’Oasis de la Napoule, qui eut trois étoiles au temps de Louis Outhier, a définitivement tourné la page des frères Raimbault.  Iskandar Safa, le milliardaire franco-libanais propriétaire du Domaine de Barbossi, a confié les clés du lieu au MOF Alain Montigny et à son adjoint de cuisine Nicolas Davouze, ancien candidat français au Bocuse d’Or. Nouveau décor, un brin plus  contemporain avec ses clins d’oeil artistes, nouvelle vaisselle, équipe de salle renforcée, avec le MOF sommelier Pascal Paulze à la manoeuvre côté vins, cuisine ouvragée certes, mais plus épurée et sereine, avec l’ambition pour la maison de récupérer la seconde étoile envolée cette année. Prochaine étape: le recrutement d’un nouveau pâtissier avec des desserts à l’assiette. Pour l’heure, et comme en avant, on en reste au registre antédiluvien du chariot de douceurs, généreux, certes, mais guère propice aux novations d’usage. Pour tout savoir, cliquez là.

Les MOF attendent leur col tricolore

Frédéric Simonin et sa future veste © GP

Ils sont sept chefs titulaires du MOF cuisinier, qui ont gagné en novembre dernier, le droit de porter le fameux col tricolore. Ce sont Renaud Augier de la Tour D’Argent à Tokyo,  Stéphane Collet du lycée Hôtelier Saint-Martin à Amiens, Arnaud Faye de la Chèvre d’Or à Eze-Village, Fabrice Gendrier de chez Lenôtre à Plaisi, Franck Putelat de la table portant son nom à Carcassonne, Julien Roucheteau ex de La Scène Thélème à Paris 17e, enfin  Frédéric Simonin du restaurant éponyme, toujours à Paris 17e. Leur point commun? Une règle absurde, mise en application cette année, les empêche de  porter la veste avec son traditionnel col tricolore avant le 13 mai prochain, jour où ils recevront leur médaille et leur diplôme à la Sorbonne puis à l’Elysée des mains du président de la République. Ils ont pourtant triomphé aux épreuves en novembre dernier. Ce qui fera sept mois d’écart…

L’avènement de Jérôme Schilling

Jérôme Schilling © GP

On l’a connu en Alsace, à Wingen-sur-Moder, aux côtés de Jean-Georges Klein. Le voilà pleinement chez lui, toujours sous la houlette de Silvio Denz, le big boss suisse de Lalique, mais désormais pleinement maître des fourneaux, imprimant sa manière légère et technicienne, puisant son inspiration dans les vignes de Lafaurie-Peyraguey. Formé jadis en Alsace chez Hubert Maetz, au Rosenmeer, prolongeant chez Joël Robuchon et Roger Vergé, découvrant l’Aquitaine chez Thierry Marx et Jean-Luc Rocha à Cordeillan-Bages, puis dérivant côté lyonnais, sept ans durant chez Guy Lassausaie à Chasselay, Jérôme Schilling jouait jusqu’ici le rôle ambigu de « chef exécutif » à la Villa Lalique. Faisait-il « sa » cuisine ou celle de Jean-Georges Klein? Le voilà, désormais, chef tout court, étoilé depuis le 21 janvier, signant sa carte pleinement, usant du terroir de Bommes en Sauternais pour livrer ses bons tours, avec une équipe rôdée. La salle sous verrière, signée Mario Botta, comme à Wingen, quoiqu’en version plus intime, est le cadre de ses réinterprétations douces. Les assiettes sont esthétisantes, mais sans excès, les goûts précis, les assaisonnements bien dosés. Des exemples de sa manière? Les « sensations » d’un verre de sauternes à travers trois amuse-bouche subtils entre doux et amer:  avec le jambon noir de Bigorre, les légumes d’hiver et la sardine grillée. Puis le met signature que constitue le surprenant et fort subtil moelleux de chou fleur au caviar Sturia, avec sa fine sauce vodka beluga: cinglant et séducteur! On vous  raconte la suite très vite. En tout cas, sachez que ce natif de Gries (Bas-Rhin) est l’homme à suivre cette année en Nouvelle Aquitaine. Deux étoiles en vue…

Le succès du 2e Bouillon Chartier

Façade © GP

De la restauration philanthropique? Il y a de ça. En lieu et et place de son Montparnasse 1900, qui, il est vrai, ne marchait pas fort, Christophe Joulie, propriétaire déjà du Bouillon Chartier des Grands Boulevards, a imaginé revenir à la vocation de ce lieu historique qui retrouve ainsi sa vocation populaire, sur le boulevard Montparnasse, à quelques pas de la rue de Rennes. Salles en dédales labyrinthiques, miroirs, volutes fleuries, céramiques choisies, patères en cuivre, banquettes, chaises bistrot, vitraux et boiseries modern’ style accueillent le gourmand économe venu goûter des mets de toujours à prix angéliques. L’oeuf mayo est à 2 €, le pied de porc grillé avec ses frites fraîches à 10 € ou la grosse profiteroles au chocolat à 4 €. Réouverte après de brefs travaux fin janvier, la maison a connu un succès immédiat qui ne se dément guère. On sert là non stop, de 11h30 à minuit, face à la gare Montparnasse et la queue s’allonge aux heures de pointe- il est vrai qu’il n’y a pas de réservation. Dans l’entre deux, il est nettement plus facile de trouver de la place. On vous en reparle vite…

Dernières nouvelles de Saint-Tropez

Rocco Seminara © AA

Cela bouge à Saint-Tropez, même en hiver. La saison 2019 s’apprête à démarrer en fanfare avec le nouveau Byblos qui inaugure La Cucina, la nouvelle table d’Alain Ducasse, sur le mode de ce qu’il produit avec succès à la Mutualité à Paris, en lieu et en place du Rivea. Alain Ducasse y transporte un concept bien rôdé, mais adapté à la sauce tropézienne dans version italo/méditerranéenne plus gastronomique. Le nouveau chef exécutif du Byblos n’est autre que Rocco Seminara, ex second de Franck Cerutti à la SBM, qui mettra le tout en musique dès le 17 avril.

David Barokas © AA

Du neuf également au Café de Paris et à la Brasserie des Arts. David Barokas qui gère une pléiade d’établissements réputés de la Côte d’Azur, dont La Guérite sur l’île Sainte Marguerite, La Chunga, le Palm Beach, Le Pastis, et L’Aqua Club, reprend le Café de Paris, quai de Suffren, qui devrait se nommer à son tour La Guérite. Il devrait également prendre en main  la Brasserie des Arts, de la place des Lices, qui devrait se nommer Victoria, du nom de l’établissement situé près de l’Arc de Triomphe appartenant au groupe Moma de Benjamin Patou avec lequel il s’est associé pour l’occasion. Le groupe Barrière ferait aussi partie du joint venture. Quant au Benkiraï,  qui a abrité un temps le thaïlandais Oth Sombath puis la Régalade de Bruno Doucet, il change de mains et passe sous la gouverne du groupe des Maisons Pariente (qui possède notamment l’hôtellerie de Crillon Le Brave). Riccardo Giraudi, président du Giraudi Group, leader européen de l’import-export de viandes haut de gamme, qui est aussi créateur et développeur de concepts en restauration, tels Beefbar, Song QI, Moshi Moshi, Indochine, va y créer une table vouée aux belles viandes.

Riccardo Giraudi © DRéf

Les chuchotis du lundi : l’embrouillamini des World Restaurant Awards, l’hémorragie de la Scène Thélème, la nouvelle donne de l’Oasis, les MOF attendent leur col, l’avènement de Jérôme Schilling, le succès du 2e Bouillon Chartier, dernières nouvelles de Saint-Tropez” : 1 avis

  • Sanchez

    Embrouillamini !, du pain bénit pour blogueurs, journalistes, médias, amis … et agences de comm !,… franchement, par exemple, comment un A.D. peut-il cautionné un tel événement, un tel prix et le recevoir!…Il est grand temps, pour sa comm., qu’il pense à se faire tatouer, comme bien d’autres!… Vous me direz, il faut manger à tous les râteliers!…
    heureusement des articles, comme celui sur Jérôme Schilling et les M.O.F., font avancer la profession…!

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