Chez Fuchs

C’était « le » bistrot tropézien, où l’on venait acheter ses cigares près du bar, boire la « mauresque » (Ricard plus sirop d’orgeat) ou la « tomate » (le même avec de la grenadine), goûter les seiches sautées à la tomate et le poisson du moment. Bref, si Fuchs n’est plus chez Fuchs (maman a vendu, Olivier lui a ouvert son bistrot rue de la Citadelle), si la boîte à cigares a disparu, Christophe Leroy (la Table du Marché, les Moulins de Ramatuelle, la Maison Fetter, c’est lui!) lui a redonné son bel esprit et son franc caractère. Jouant la cuisine comme aime, sa chichi, ni fanfreluche, pratiquant des prix aimables et un tour ménager bienvenu.

Bref, à deux pas du port, côté Sénéquier, et à côté de la rustique place aux herbes, voilà un bistrot de village, relax charmant, drôle, sympa, avec son beau zinc, ses apéros, ses personnages. Nano, ce midi, le « vrai », celui d’ici, pas Jean-Marc Fanara qui porte le même surnom à Megève, mais a 35 ans de moins, y contait des histoires du Saint-Tropez d’avant, verre de rosé de Matton en main. A table, sur de belles nappes blanchées immaculées, une joyeuse bande de copains – dont j’étais – devisaient en taquinant la salade de crabe, celle d’artichauts poivrades et parmesan, les asperges vertes sauce mousseline, les artichauts barigoule simplement délicieux, les merveilleux encornets à la provençale. La dorade en croûte et le loup grillé sauce vierge étaient des moments de grâce.

Mais la rustique daube de joue de boeuf comme le gâteau de pommes de terre et céleri, avec, en issue, la vraie tropézienne crémeuse et  la divine tarte aux framboises et pignons donnaient envie d’avoir son rond de serviette. On ajoute qu’ici le château Minuty sonne juste, l’ambiance joyeuse, bref,  la simplicité conçue comme un bel art.