Le Pudlo Alsace 2016 est arrivé !

Article du 23 novembre 2015

guide-pudlo-2016

Voilà, pour les lecteurs de ce blog, la liste de nos lauréats de l’année en Alsace. La moisson est riche !

Chef de l’année: Bernard Leray

Wihr au Val,  La Nouvelle Auberge

Bernard Leray

Depuis vingt ans, il refait le monde, à fleur de route. Bernard Leray est devenu un chef étincelant multipliant les allusions à ses divers terroirs : l’Alsace côté val de Munster avec des clins d’œil au repas marcaire, breton étincelant avec un travail sur le poisson, les crustacés et des légumes de là-bas comme le chou-fleur ; drômois, aussi, car cet ancien de Loiseau fut chef du Mas des Sources à Malataverne. Au premier étage, ce qui fut un relais routier, Bernard Leray propose une grande cuisine alsaco-bretonne ancrée dans le temps présent sans jamais négliger le terroir ni la tradition. Son épouse Martine, native du Florival, veille avec dynamisme sur un service féminin charmeur qui apporte des assiettes séductrices et colorées. Le cadre du premier étage, entre colombage mural et joli parquet, possède le charme champêtre. Les menus offrent un condensé de ce qui se propose de mieux dans l’Alsace d’aujourd’hui.

Evénement de l’année: Jean-Georges Klein

Jean-Georges-Klein - DR - copie

Villa René Lalique, Wingen-sur-Moder

L’événement de luxe en Alsace : la transformation de l’ancienne villa de René Lalique en hôtel de grand style avec chambres cossues, cristal opalescent à tous les étages, grande table au cadre sobre et ouvert sur le vert dehors signée de l’architecte Mario Botta. Et, bien sûr, la cuisine de Jean-Georges Klein, ex-maestro de l’Arnsbourg, assisté de Jérôme Schilling. Le mécène de l’opération : Silvio Denz, le patron de Lalique, pour qui cette demeure hors normes constitue le plus glamour des showroom. La gloire maison : cette cave monumentale avec des flacons du monde entier, composée sous la houlette du MOF sommelier Romain Iltis. Le style gourmand ? Beaucoup de concret, guère de moléculaire. Des idées en rafale, de la finesse, du doigté, de la couleur, de l’aigre-doux et une manière agile et légère de composer avec les saveurs du temps. On n’oublie pas la mise de table soignée, les cristaux de Lalique au plafond, le service plein d’allant sous la houlette de Patrick Meyer. Bref, une grande table, un lieu d’une folle séduction.

Révélation de l’année: Jérôme Jaeglé

JéromeJaeglé

L’Alchémille, à Kaysersberg

Jérôme Jaeglé ? On l’a connu à Jungholtz aux Violettes, il fut le second de Têtedoie à Lyon. Représentant français au Bocuse d’Or 2010, lauréat du prix Taittinger 2008, il fait son retour dans son village natal. Il a repris un ancien PMU, l’a transformé en auberge contemporaine avec sa déco zen, ses billots de boucher, ses fauteuils high-tech, ses tables de bois. Il y joue le produit local avec verve, propose des idées de saison dans des menus épatants (celui du déjeuner est imbattable) à l’enseigne de l’alchémille, plante reconnue pour ses bienfaits digestifs et ses vertus de fertilité. Cet ancien du JY’S, à Colmar, Nasti au Chambard, Stucki à Bâle et du Ritz à Paris, qui fut apprenti chez Gaertner à Ammerschwihr et au Père Floranc à Wettolsheim, sait tout faire. C’est dire qu’il accomplit un retour aux sources à la fois brillant, léger, éclatant. Ebouriffant, léger, frais, séducteur : l’élève Jaeglé se révèle un maître.

Outsider de l’année: Pierre Irion

PierreIrion

Côté Lac, à Schilitigheim

Il y a le bâtiment de verre, futuriste, le vaste lac artificiel, la grande terrasse qui donne le sentiment le soir d’être en pays lointain. Aux fourneaux, le talentueux Pierre Irion. Ce natif de Sarre-Union, passé à l’Arnsbourg, à la Poste à la Wantzenau et chez Lameloise à Chagny, mène là une partition agile, pimpante, séductrice. Il s’agit de faire simple et rapide le midi, vif et frais le soir, gastro mais sans chichis. La partition comme l’ambition sont parfaitement tenues. Avec des mets dans l’air du temps révélant de bons produits traités avec doigté. Les vins au verre sont choisis avec nez et les desserts ont du répondant. Bref, voilà un lieu exotique à visiter. Sachez que Pierre Weller, de la Source des Sens à Morsbronn, veille sur le lieu avec acuité. Mais qu’il a la discrétion de laisser la bride sur le cou à une équipe rodée menée par le discret Pierre qui figure l’un des brillants outsiders de l’Alsace nouvelle vague.

Table étrangère de l’année: Cosimo et David Gabriele

Aromi e Sapori

Aromi & Sapori, à Zimmersheim

Cosimo et David Gabriele, père et fils, ont transformé l’ancien Jules en table italienne de choix, avec sa formule façon pizza chic au premier. La décoration est sobre, élégante, sans effets. En cuisine, un chef vénitien, formé dans la grande restauration en Italie (le Calandre à Rubano des Alajmo, Cracco à Milan), Francesco Armato, que relaye un second également formé à bonne école, Gabriele David, propose des assiettes sérieuses qui s’harmonisent avec des vins choisis. L’addition est plutôt douce, au regard de l’ambition affichée, et la bonne affaire du lieu ce peut être le formidable menu de midi qui offre, par exemple, risotto au pecorino, fèves et pancetta, le ris de veau pané à la milanaise avec sa salade mélangée du jour, enfin le carpaccio d’ananas avec sa glace à la fraise. On ajoute les glaces maison (exquise ricotta, café expresso, fruits rouges) et les vins au verre en provenance de la Botte. Réservez !

Bistrot de l’année: Marco Heimlich et Christophe Fischer

Musauerstuebel

S’Musauer Stuebel, Strasbourg

Cette demeure champêtre, sise non loin du Rhin et du port autonome de Strasbourg, vous la connaissez. Marco Heimlich et Christophe Fischer la tiennent avec ferveur et chaleur, jouant les aubergistes d’apparence délurée, quoique mettant beaucoup de sérieux dans leur démarche. Leur maison à l’ancienne, dans son jardin, avec son cadre cosy, a du charme. Les menus font bel effet, la carte des vins est riche de belles bouteilles de toutes sortes. L’ambiance est chaleureuse, les couleurs sont douces et les assiettes ne déçoivent pas, les plats d’inspiration carnassière et canaille ont du coffre. Pas d’innovations spectaculaires, ni de chichis, mais de l’archi-classique revisité : voilà ce qui vous attend là. Bref, du bon, du solide, du savoureux, auquel on ajoute des desserts au goût d’enfance. Voilà une petite maison du bonheur. A redécouvrir !

Accueil de l’année: Claude et Lydie Fuchs

Claude et Lydie Fuchs (Loejelgucker) - copie

Zum Loejelgücker, à Traenheim

Les Fuchs sont formidables ! Ils ont réussi à garder l’esprit de leur maison de village avec sa façade à colombage si fleurie en saison, tout en modernisant l’entrée sur l’arrière et jouant la cuisine du marché au jour le jour. Claude cuisine avec joliesse, tandis que Lydie, qui sourit avec l’évidence du naturel, accueille avec amour, explique les mets de l’ardoise avec faconde, les vante avec entrain. Et cela fait quinze ans, déjà, que ça dure. Les plats du répertoire plus ou moins revus font tranquillement plaisir. Il y a le cadre de taverne de village avec ses fresques vigneronnes, l’ambiance douce et gaie, l’ardoise qui change, la carte des vins qui fait honneur aux vignerons du cru à prix d’amis mais aussi les crus d’ailleurs tout aussi gentiment tarifés. Voilà une demeure exemplaire dont on ferait bien son ordinaire.

Winstub de l’année: Séverine de Valmigère et Serge Cutillo

Séverine de Valmigere Le RUTSCH

Le Rutsch, à Strasbourg

C’est la dernière winstub dont Strasbourg cause : neuve, mais à l’ancienne, qui a choisi pour nom le verre traditionnel dans lequel on boit le vin (d’Alsace) en pichet. Aux commandes de la demeure, dans une rue piétonne de la Krutenau, le quartier bohème et un brin artiste de la capitale alsacienne : Séverine de Valmigère, dont le père Jean-Louis a repris jadis Yvonne. Séverine, qui tint, un temps, le Strissel, y connut le chef Serge Cutillo. Elle l’a embarqué dans l’aventure, prenant une assurance neuve dans la demeure dédiée aux mets de terroir et aux petits crus d’ici, décoré le lieu avec sagacité. Elle propose une cuisine à l’ardoise et des mets de toujours sur une carte d’anthologie bien vue, avec en prime les légumes primeurs de Marthe Kehren la fermière bio du Kochersberg. C’est vif, frais, simple, bien vu. Il y a une terrasse d’été sur la rue. Voilà une adresse toute neuve. Attention, ne la gâchez pas !

Brasserie de l’année: Eric et Marylin Girardin

Marylin et Eric Girardin Maison des Tetes

La Maison des Têtes, à Colmar

Les Girardin ont quitté Strasbourg et leur Casserole pour reprendre l’historique Maison des Têtes colmarienne. Et c’est assurément l’événement du moment dans la cité d’Hansi. Eric et Marylin ont plein de belles ambitions pour cette demeure à la fameuse façade sculptée de 1609, qui fait auberge depuis 1898. On en est pour l’heure aux prémices, avec de délicieux repas dans la cour ou dans la belle salle historique, avec des mets de tradition genre brasserie chic revisitée – le restaurant gastronomique dans une ancienne salle revue ultra-contemporaine et zen, ce devrait être pour le début de l’an prochain. Ce qui vous attend là ? Du bon, sage, de l’éprouvé, du régional, de l’enraciné, avec la touche Girardin, malicieuse fraîche et légère, revue à sa façon bourgeoise. Ajoutons des vins issus de la compagnie des vignerons propriétaires de murs à tarifs sages.

Tradition de l’année: Christophe Andt

Christophe Andt - copie

Au Pont du Corbeau, à Strasbourg

Ce voisin du Musée Alsacien constitue la Rolls du genre winstub. Le lieu existe depuis trente-six ans, ouvre le dimanche soir et le lundi, est animé avec maestria par Christophe Andt. Ce lutin rieur, qui est un goûteur redoutable et aussi un gourmet sans pareil. Il ne sert que les plats de son cœur. Et celui-ci, bien sûr, est enraciné au cœur de l’Alsace de ses racines. Manière de souligner que tout ce qu’il propose est frappé du sceau du régionalisme autant que de la qualité. Sa formule du déjeuner offre un condensé du bon goût à la mode d’ici, avec ce qu’il faut de cochonnailles pour comprendre le bel esprit bucolique de la région. Bref, avec le beau cadre boisé, peint, signé Waydelich et Mahler, avec ses fenêtres en culs de bouteille, qui ne laissent filtrer qu’à peine la lumière du jour venant des proches quais de l’Ill, on se croirait dans un film sur une winstub. Au sommet du genre !

Hôtelier de l’année: Michel Baly

Michel-Baly-dit-au-revoir

Le Colombier Suites à Colmar

Du neuf dans de l’ancien, avec du contemporain, du design, du fonctionnel : voilà la « marque » Baly. Michel, relayé par ses fils Thomas et Julien, est devenu le petit roi de l’hostellerie en Alsace de Molsheim à … Bâle (presqu’en Alsace!), de Strasbourg à Obernai et bien sûr à Colmar avec le Colombier classique, dans une demeure ancienne de la rue de Turenne, prolongé de quelques chambres et suites dites « Colombier Suites » dans deux demeures du XVIIIe siècle. Nous sommes là au cœur de la Petite Venise colmarienne, le quai de la Poissonnerie et le proche marché couvert 1880 sont là comme des balises. Ce lieu à part permet de se ressourcer lors d’une promenade au cœur des choses, de la ville, de l’histoire. L’air conditionné, par période de grande chaleur, est un bienfait. Bref, voilà un lieu idéal pour une pause dans le folklore – sans folklore aucun…

Rapport qualité-prix de l’année: Jean-Bernard Hermann

Les Hermann à l'Auberge Sundgovienne

Auberge Sundgovienne, à Carspach-Altkirch

Ce qui fut un Logis de France années 1960 trouve son unité et son look contemporain sous la houlette de l’architecte designer Bernard Wilhelm à qui on doit le nouveau visage de l’Arnsbourg. Les Hermann jouent là dans une catégorie plus modeste, même s’ils sont les aubergistes stars de leur bout de région. Chambres de bon confort, regard sur la forêt – depuis l’arrière de la demeure –, salle à manger alerte, wifi rapide, air conditionné : il y a tout cela ici, en ligne de mire sur Altkirch, la petite capitale du Sundgau, avec une bonne table en prime. Formé chez Gaertner, Haeberlin, Chapel, Jean-Bernard Hermann sait ce que cuisiner veut dire. La sagesse de ses menus et la générosité de ses assiettes va de pair avec une qualité sans faille et un doigté véritable pour mettre en valeur des produits de qualité. Prix gentils, service vif et prompt. Voilà, vous l’avez compris, une maison amie.

Rendez-Vous de l’année: Jean-Noël Dron

Café Brant

Café Brant, à Strasbourg

C’est « le » spot du moment à Strasbourg : un café historique, proche de la statue de Goethe et de l’université, dans le quartier « impérial » de la ville, évoquant les cafés viennois, « lieux de vie », où l’on se rencontre, boit, mange, grignote, éprouve le mouvement des choses, sentant battre le pouls de la ville. Bref, un lieu de vie, remis au goût du jour – et de toujours – par Jean-Noël Dron de la Kammerzell, avec l’aide de Christian Maître, l’architecte-décorateur du Stella à Paris. Côté déco, c’est réussi avec plafond et colonnades à stucs, luminaires Art déco, murs à la feuille d’or, fauteuils de velours beige. Et, côté ambiance et affluence, tout Strasbourg semble s’être donné le mot. On petit-déjeune, on vient boire à toute heure. Et Stéphane Fieger, ex de la Vignette à la Robertsau, propose une petite restauration de qualité. En prime, une terrasse d’été qui est la vedette de la ville.

Charcutier de l’année: Eric Lorch

Lorch

Lorch, Ingwiller

Si le cousin de Bouwiller, Jean-Louis, continue de tenir la demeure qui fut le berceau de la famille, Eric Lorch mène sa barque avec allant. Il a essaimé à Niederbronn, racheté ici même l’ancienne maison Uhry. Le voilà proposant, au cœur du pays de Hanau et en lisière des Vosges du Nord, le meilleur de la charcuterie d’Alsace, au naturel et sans phosphate. Saucisse de foie, de viande, à tartiner, sèche, comme les tourtes, presskopf, knacks légèrement fumées et épicées sont au top du genre, vendues sous vide à emporter. Le jambon, le lard, les divers éléments pour la choucroute, celle-ci, cuite au vin blanc, figurent également au panthéon de l’artisanat régional. Et les plats traiteur, dont les familles d’ici font leur miel (terrine de gibier, assiette terre-mer, canette farcie aux cèpes) valent le détour. Voilà un bel artisan de bouche à saluer comme il se doit. Adorable accueil d’Elisabeth.

Pâtissier de l’année: Jean-Michel et Thomas Helterlé

Helterlé père et fils

 Helterlé, à Strasbourg-Cronenbourg

Jean-Michel et Thomas Helterlé père et fils, qui ont travaillé dans la restauration de haut niveau – le premier chez Haeberlin, le second au Jules Verne, au Lutetia et au Meurice–, ont fait de cette pâtisserie rénovée dans l’esprit contemporain, le temple des douceurs. Tout ce qu’ils proposent relève de la qualité fine, de la fraîcheur, du sucré à mezza voce. Arlequin (mousse chocolat au lait, mousse chocolat blanc, biscuit tendre aux amandes, crémeux de chocolat noir), malice (mousse chocolat au lait cannelle, bavaroise vanille, poires rôties caramélisées, biscuit aux épices et sablé, avec un sourire et des yeux sur le dessus), religieuse caramel-fruit de la passion, tarte aux fraises, crème à la verveine, compotée de rhubarbe, vacherin glacé en version légère et superbes éclairs chocolat (du Caraïbes de Valrhona), vanille ou café sont tous à fondre sur place. Voilà une transition père-fils à saluer comme il se doit.

Pudlo Alsace 2016, par Gilles Pudlowski, ed. Michel Lafon

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