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Neso

« Paris 9e : la magie Neso »

Article du 28 juin 2018

Guillaume Sanchez © GP

Guillaume Sanchez n’est pas un inconnu pour les lecteurs de ce blog. On vous a parlé plusieurs fois de ce drôle de zigoto, mince comme un fil de fer, tatoué du haut en bas, qui n’a que 27 ans, mais une forte personnalité et toute une carrière, déjà, derrière lui. Formé en pâtisserie, notamment chez Ladurée, ouvrant à son compte, tout minot, une table rebelle dans le 18e (Nomos), revendiquant sa manière déjà singulière, il a changé son fusil d’épaule, déplacé sa demeure, agrandi et embelli sa tanière, on allait dire son atelier (« taller » en catalan). Un artiste? Sûrement. Un créateur? Bien sûr. Un charmeur? Evidemment.

Langoustine cuite et crue, topinambour, caviar, émulsion de carcasse  © GP

Petits pois, fleur de sureau, poutargue maison, couteau © GP

En ouvrant sa maison, pareille à nulle autre, jouant bois, briques, cuivre et couleurs tendres, dans les tons bleus et bruns, il séduit avec force. Certes, les prix à la carte volent haut. Mais ses deux menus expriment son talent rare, et, comme on prouve le mouvement en marchant, Sanchez démontre qu’il est le Dali de sa génération, le Mondrian de son registre. Avec une jeune équipe aux aguets, un livre de cave impressionnant d’aspect façon grimoire, mais court d’où on extrait des pépites comme ce grand champagne méconnu (Dhondt-Grellet, les Terres Fines à Flavigny) ou la magnidfique syrah Côte Nord de Laurent Combier en crozes hermitage.

Carottes confites, eau de pommes de terre, rafraîchies à la lavande © GP

Ravioles de homard, fermentation de marc de café © GP

Le fermentation, les extractions, les mariages rares, les alliances ludiques, les goûts bien exprimés: voilà sa marque. Que traduisant la langoustine cuite et crue, topinambour d’octobre 2017, caviar osciètre et émulsion de carcasse, l’aspic moderne de tomate, avec son jus de tomate fermenté, la tomate jaune confite au vin blanc, la tomate rouge confite au vin rouge, plus les ravioles de homard et son consommé, noisettes vinaigrées, fermentation de marc de café ou encore le curieux (et délicieux) gâteau de carottes – d’hier et d’aujourd’hui – confites en concentration d’eau de pommes de terre, rafraîchies à la lavande. Du bel art!

Lieu jaune, fumet d’arêtes monté au beurre cru caviar © GP

C’est à la fois cubique, ludique, rigoureux, fantaisiste, néo-dadaïste, un peu surréaliste, mais juste de ton, sincère et franc de goût. Il y a les petits pois, à la fleur de sureau, avec leur poutargue maison, couteau et le lieu jaune ikejime reconstitué en filet avec cendres de persil, fumet d’arêtes monté au beurre cru caviar Krista façon onctueux (et gourmand) beurre blanc. Puis le tendre, savoureux et si juteux agneau maturé de la ferme de Clavisy avec céleri confit 10h et son jus herbacé.

Agneau maturé de la ferme de Clavisy, céleri confit © GP

Briques et banquette © GP

En dessert, rhubarbe, miel fermenté et fleur d’oranger ou/et lait cru et œuf fermier donnent de la pêche et du tonus, comme le reste. Voilà une maison, d’où l’on sort en pleine forme, le coeur léger, la tête en flammes, une table d’élite déjà, vive à admirer telle quelle, sans trop de réserve, même si, ça et là, un rien d’amertume en trop peut faire tiquer. Mais n’est pas le propre du génie de créer et franchir ses propres limites ?

Rhubarbe, miel fermenté et fleur d’oranger © GP

Lait cru et œuf fermier © GP

Neso

6 rue Papillon
Paris 9e
Tél. 01 48 24 04 13
Menus : 55 (4 plats, déj.), 90 (7 plats), 120 (9 plats, dîn.)
Carte : 90-150 €
Horaires : 12h-13h30, 19h-22h
Fermeture hebdo. : Samedi, dimanche
Métro(s) proche(s) : Cadet
Site: www.neso.paris

A propos de cet article

Publié le 28 juin 2018 par

Neso” : 10 avis

  • FC

    Bonjour Monsieur Poirot,
    Un ratio de 3,3 sur une bouteille de vin est dans la norme comptable appliquée par tous les restaurateurs du monde entier (entre 3 et 4 pour le tout venant, on peut descendre sous les 3 pour les grands crus afin de les rendre accessibles suivant sa politique d’établissement). Outre qu’ils doivent payer des loyers, des salaires, des charges salariales, (les mecs doivent être 4 ou 5 pour envoyer 30 couverts dont un pâtissier), des crédits (travaux, mobiliers, équipement professionnel, mise aux normes des locaux parisiens exigûes, etc) supporter du stockage couteux (Vins, spiritueux, denrées), faire appel a des prestataires pour se concentrer sur son métier (lingerie, dératisation (obligatoire), ménage, )les restaurateurs doivent avoir une trésorerie assez solide pour parer toute éventualités (avarie, grève(nous sommes en france), travaux intérieurs ou extérieurs d’urgence) et je vous le donne en mille, même s’ils passent à la télé, arriver à se payer pour le nombre d’heures colossales que demande de faire ce métier exigeant. Enfin, (oui, ce n’est pas fini) comme toute entreprise, un restaurant doit, dans son bilan, afficher des ratios correspondant au domaine d’activité. Et donc avec des ratios en dessous de 3, un banquier ne peut vous faire confiance pour un prêt ou dans le cas d’une revente, vous ne pourrez obtenir le prix optimal de votre affaire, car comme vous l’avez surement saisi à la vue de ma liste à la Prévert des coûts, un restaurant ne peut être viable et pérenne en dessoude cette limite « quasi » plancher.
    Je me permet de finir en vous disant qu’aujourd’hui le type d’établissement duquel nous parlons, les chefs de nouvelles générations ou les patrons de restaurant de petite et moyenne taille recherchent tous a bien faire leur métier et qu’il est, je trouve, injuste de les attaquer sur des choses basiques et normales alors qu’ils mettent toute leur a^me, leur coeur, leur temps (leur vie de famille y passe souvent aussi), pour satisfaire une clientèle toujours plus exigeante.
    Bien à vous.
    FC

  • HELENE BOBICHON

    jeudi 16 mai
    Un accueil chaleureux et décontracté que l’on apprécie. Quant aux plats , c’est un festival de saveurs inconnues, une variation dans la densité de texture surprenante et agréable. Les vins choisis au verre ont parfaitement accompagné les plats. Une soirée fort agréable et quelque peu inoubliable. Félicitations et continuez dans cette voie.

  • GERARD POIROT

    Cap Nord 2016 est à 56 euros sur la carte. Belle sélection « d’étiquettes » classiques et onéreuses d’un ancien de Taillevent, qui a fourni les commentaires ‘clés en mains’ ; arrivée prochaine annoncée d’un sommelier expérimenté (au Bristol) qui devrait enrichir la cave.

  • Peta Arthur

    Bonjour,
    Le principe de fermentation est justement de prendre le produit au meilleur de sa saison, et de le resservir plus tard en tenant compte de sa transformation, d’ou Les topinambours en juin. Les quantités mise en fermentation sont pensé pour un trimestre ce qui nous permet de tenir une carte (4mois) ou plus si on fermente une plus grosse quantité.
    Pour la carte des vins elle est en collaboration avec manuel perrondet MOF sommelier.
    Pour le service, ce sont les cuisiniers ou pâtissier pour les dessert qui vous explique et vous présente tous les plats, vous éclaire si quelque questions.
    Arthur Peta

  • Cap Nord 2016, excellent flacon!

  • GERARD POIROT

    ‘Côte Nord ‘ ? Je suppose qu’il s’agit de Cap Nord… Vous pourriez préciser le millésime, qui a sans doute une influence sur le vin, sinon sur le tarif. Vous jugez raisonnable de payer 50 euros cette bouteille, qui a probablement été payée aux alentours de 15 euros par le restaurateur. Certes, il y a bien pire, mais c’est une jolie marge ! Justifiée ?? Combier est excellent, même si on n’a pas attendu Neso pour découvrir cette ‘pépite’. On ira se faire une idée du reste de la carte en allant jeter un oeil rue Papa, rue Papillon.

  • Bonsoir. Si vous avez bien lu le texte, vous savez que les topinambours sont précisément datés d’octobre 2017, que ce chef travaille la fermentation, le produit maturé. Pour ce qui est des photos, pareil : elles datent de cette semaine (cf instagram, facebook et tweeter). Merci de nous lire

  • foodie

    Bonjour à vous,
    je suis assez curieux de savoir si les photos sont récente, pourquoi en été il y a des topinambours.
    j’ai vu le même repas sur un autre site avec deux journalistes et c’était le même menu à 4 mois d’intervalle? la saisonnalité joue t’elle en premier avec ce chef qui je sais est un maitre à devenir, bien cordialement,

  • 50 € la bouteille de Cap Nord de Laurent Combier: voilà une folie bien raisonnable. Merci de nous lire avec autant de fidélité.

  • GERARD POIROT

    Votre texte et vos photos incitent à se précipiter rue Papillon… cependant… comme d’habitude, rien sur les tarifs des vins, le nerf de la guerre, ou la pertinence de la sélection, voire d’un sommelier ou du service, à part ‘un livre de cave impressionnant d’aspect façon grimoire, mais court d’où on extrait des pépites’. Nous voilà bien avancés… et ce n’est pas le site du resto qui risque de nous éclairer ! Encore un effort ! !

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !

Neso