L'Epicure à l’hôtel Bristol
« Paris 8e : la sagesse d’Epicure »
Il y a un an, on parlait de sérénité. Aujourd’hui, on peut parler de sagesse pour cette table trois étoiles, signée Eric Fréchon, qui joue le plus que parfait en toute tranquillité. L’équipe est rodée, les relais sont là. Les fourneaux gérés par Eric Fréchon et son second, MOF comme lui, et normand pareillement, Franck Leroy, assurent la ronde des mets de saison, avec une délicatesse insigne. Le service, où le jeune Thomas Pfeiffer, relaye Eric Kayser, joue le sérieux à toute épreuve.
L’émotion du moment ? Ce pourra être au travers de ces artichauts de Provence, rôtis à l’huile d’olive, garnis des premières truffes blanches d’Alba, avec leur fine poudre d’œuf haché et leurs chips d’artichauts aux noisettes : du grand art, sublimant l’extrême simplicité de beaux produits traités au mieux de leur fraîcheur, de leur saveur, leur vérité. Mais les idées tirées du menu de saison, servi au déjeuner, tarifé 145 €, ce qui pour cette belle salle toute en douceur et clarté face à leur beau jardin, est fort raisonnable, livrant le meilleur du moment.
Ainsi l’oignon de rose de Roscoff cuisiné façon Carbonara avec sa royale de lard fumé, ses champignons sauvages, les noix de saint jacques dorées à la plancha avec sa purée de topinambours, son émulsion au jus de truffe noire, enfin l’étonnant ris de veau piqué d’anchois et citron confit marié au jus de céleri, mais surtout aux coques et au raifort, pour une cinglante symphonie terre/mer jouent une partition de haute volée et de grand style.
Là-dessus, le champagne Larmandier-Bernier « Latitude » très vineux, le côtes catalanes « la Truffière » du domaine Danjou-Banessy, issu de carignan gris, et que l’on prendrait à l’aveugle pour un cousin de puligny, le château Moulin Saint-Georges signée de la famille Vauthier en saint-émilion grand cru 2007 jouent la sarabande vineuse avec classe. Il y a encore le très vieux pineau des Charentes de Guy Lhéraud qui s’harmonisent avec les beaux fromages du chariot de Marie-Anne Cantin et Bernard Antony, comme le riesling vt de Fritz Haag en Moselle allemande et le banyuls Quintessence de la Coume Del Mas qui se marient avec les jolis desserts maison.
Le successeur du grand et regretté pâtissier Laurent Jeannin vient d’être désigné (il s’agit de Julien Alvarez), mais ce qui se trame ici, portant sa griffe, frise toujours le sublime: la poire streussel en pré-dessert, puis le fameux citron de Menton givré au limoncello et citron confit aux saveurs de poires et enfin le chocolat du Pérou en cabosse, mousseux et croquant, avec son sorbet chocolat infusé aux bâtons de citronnelle. Bref, cela swingue avec légèreté, finesse, singularité et cela signe, in fine, la griffe d’une des toutes premières tables de Paris.