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Les chuchotis du lundi : Silva le patron, suspense au Royal Monceau, Decoret le maudit, le raté de Saintagne, du neuf à Pleyel, Bordier rebondit, l’Italien de Roanne, Pétrus s’en va, Ancher prend congé, 3 étoiles pour Veyrat, enfin Pertinence

Article du 3 avril 2017

Silva le patron

José Silva © Stéphane de Bourgies

Il a réussi son pari: faire, en trois ans seulement, du Four Seasons George V Paris le palace le plus étoilé au monde. Natif du Portugal, élevé au Québec, ex patron du Four Seasons les Bergues à Genève (où il obtint la première étoile italienne du Léman au Il Lago), José Silva est devenu le big boss gourmand des palaces parisiens où la concurrence est forte (le Bristol, rappelons-le, détient quatre étoiles entre l’Epicure et le 114 Faubourg, le Ritz trois entre l’Espadon et ses Jardins, le Plaza-Athénée trois avec Alain Ducasse et le Meurice deux avec le même). A partir du 17 avril et tout l’été, de midi à 22h30, José Silva fera montre de son savoir et de son pouvoir, avec sa « cour aux étoiles« : trois pour Christian Le Squer au V, une pour David Bizet à l’Orangerie (qui en vaut déjà deux), une pour Simone Zanoni au George.  On pourra désormais goûter les mets ciselés de ses 5 étoiles et de leurs trois chefs étoilés, présentés côte à côte et vis à vis au patio maison. Une belle démonstration de pouvoir et de talent.

Zanoni, Bizet, Silva, Le Squer © FS

Suspense au Royal Monceau

L’équipe du Carpaccio en octobre 2015 © GP

Dernier round et suspense au Royal Monceau pour le choix du successeur de Roberto Rispoli, chef de l’étoilé Il Carpaccio pour la maison Mavrommatis. La place est fort convoitée, avec cinq postulants qui s’étaient déplacés à tour de rôle pour confectionner un repas de cinq plats (sept pour l’un d’entre eux). Parmi les postulants, reste toujours en piste Marco Garfagnini, dont nous avions déjà parlé, natif de Carrare en Toscane, qui lança le George au George V, travailla ici même au temps de Davide Bisetto et oeuvre actuellement en chef-directeur du Relais&Châteaux domaine de Noirieux près d’Angers. A noter que, malgré son absence de chef, Il Carpaccio est toujours crédité d’une étoile au Michelin 2017.

Decoret le maudit

Jacques Decoret © Maurice Rougemont

Le El Bulli auvergnat, le génie de Vichy, le Mozart de l’Allier: que n’a-t-on pas dit sur Jacques Decoret, appelé, depuis belle lurette, à décrocher la seconde étoile, déménageant, il y a près de neuf ans déjà dans un splendide pavillon Napoléon III et demeurant toujours aux portes de la récompense michelinesque. Un gag? Un oubli? On s’interroge sur le pourquoi de la chose depuis des lustres. Et notre collègue la Montagne pareillement cette année. On rappellera qu’Alain Passard, lui même, a longuement attendu la récompense suprême et l’a obtenue au moment où on ne l’attendait plus. Decoret, qui a suivi la même ligne que Pascal Barbot de l’Astrance, né comme lui à la Palisse, passa, avec lui, d’ailleurs chez Passard,  avant de fréquenter les fourneaux – excusez du peu – de Troisgros, Marcon, Lorain. Il a obtenu le titre de MOF en 1996. Depuis vingt ans, il éblouit les gourmets de Vichy et environs de ses bons tours, attire les curieux, les passionnés, les fous de cuisine. Sera-ce pour l’an prochain?

Le raté de Saintagne

Christophe Saintagne © GP

Beaucoup lui voyaient obtenir une étoile. Mais le Michelin n’a accordé qu’un seul couvert, avec l’assiette dévolue à tous les non- étoilés dans l’édition 2017 et rien de plus, à l’ex chef trois étoiles d’Alain Ducasse au Meurice. « Tel Papillon échappé du bagne de Cayenne, Christophe Saintagne a accompli sa mue en s’installant à son compte après avoir dirigé les cuisines du Plaza Athénée, puis du Meurice« , note le guide rouge. Moyennement flatteur pour la nouvelle coqueluche de la planète Fooding

Du neuf à Pleyel

Une table chez Noto © GP

Noto: notez le nom, celui d’une cité baroque  de Sicile dont s’est inspiré le groupe Moma de Benjamin Patou pour créer, au deuxième étage de la salle Pleyel, une table en vogue, chic, belle, savoureuse, méditerranéenne. La déco colorée, mêlant marbre et tissus, avec son bar en tadelakt, est signée Laura Gonzalès. Aux fourneaux, Patrick Charvet, ex second de Jean-François Rouquette au Park Hyatt Vendôme, s’essaye à une cuisine italienne dans le vent. La maison ouvre ces jours-ci et l’on vous en reparle vite.

La salle © GP

Bordier rebondit

Benoît et Catherine Bordier © Laurent Seminel

Il a fait le Bristol époque Del Burgo, a pratiqué Rouquette à la Cantine des Gourmets, a eu son étoile Chez Jean rue Saint-Lazare, devient le compagnon de route de Bruno Doucet dans ses diverses Régalade. Il s’apprête à ouvrir sa première table en reprenant, avec son épouse Catherine, jadis rencontrée au Crillon, Le Saint Joseph, bon bistrot gourmand de la Garenne Colombes. Il jouera le menu-carte, les beaux produits de saison, l’ardoise avec des suggestions raffinées (pigeon, bar…), des mets bourgeois revisités (poitrine de cochon confite, carottes à la sauge et citron confit, tête de veau aux gambas et coulis d’épinards), sans omettre une ganache chocolat, caramel et badiane, qui devrait faire parler d’elle. Ouverture prévue: mi-avril.

L’Italien de Roanne

Marco Vigano © GP

Des italiens étoilés au Michelin France, il en est peu: Il Carpaccio, Penati al Baretto et Simone Zanoni au George, tous trois à Paris, Il Cortile de Stefano d’Onghia à Mulhouse, enfin Marco Vigano, qui est le méconnu de la bande, a obtenu cette année son étoile après dix ans de présence au restaurant les Anges. Ce Milanais, passé chez Gualtiero Marchesi à Erbusco, puis chez Troisgros et Gagnaire, joue un registre italien créatif plein de fraicheur, où le riz Carnaroli, les gambas vapeur et les fusilloni mantecati forment une palette séductrice. On en reparle.

Pétrus s’en va

Antoine Pétrus © Maurice Rougemont

Après avoir abandonné Lasserre au faîte de sa gloire, voilà qu’il quitte le voisin Clarence, alors qu’il vient d’obtenir une seconde étoile, en compagnie du chef star de la maison, Christophe Pelé. Motif officiel: il change d’orientation, peut être de vie, va se consacrer à ses cuvées en Suisse dans le Valais, et à Châteauneuf du Pape, au sud de la Vallée du Rhône. Il annonce son départ en mai prochain. Officieusement, le sommelier vedette de la maison Clarence Dillon, géré par le prince Robert de Luxembourg, qui possède notamment le grand cru classé de Graves en Pessac-Leognan Château Haut Brion, prend un peu trop la lumière. Il ferait ainsi de l’ombre à son chef comme à son propriétaire. Tout cela est évidemment dans le non-dit. Agé de 33 ans, MOF 2001 et sommelier de l’année au Pudlo 2016, Antoine Pétrus a encore de beaux jours devant lui…

Ancher prend congé

Jean-Marie Ancher © Maurice Rougemont

Après 43 ans de bons et loyaux services au Taillevent, Jean-Marie Ancher tire sa révérence, annonce sa retraite et s’apprête à publier ses mémoires chez Flammarion. Titre envisagé: « mes années Taillevent ». Même si rien n’est encore arrêté ni défini officiellement pour le directeur de salle de la grande maison de la rue Lamennais qui a remplacé son patron et maître Jean-Claude Vrinat, après sa disparition il y a sept ans. Son successeur n’a pas encore été désigné par les frères Gardinier, propriétaire de la demeure.

Trois étoiles chez Marc Veyrat

C. Aznavour, L. Gerra, MV et Eddy Mitchel © Nobert Falco/le Dauphiné Libéré

Une légende de la chanson française, une gloire du rock, un humoriste de haut vol, tous les trois chez Marc Veyrat, à Manigod, le temps d’une grande fête gourmande: c’était la semaine passée – vendredi 31 mars au déjeuner – à la Maison des Bois, avec Charles Aznavour, juste avant son concert à Genève, Eddy Mitchell venu là pour l’occasion et Laurent Gerra en habitué de la maison, à qui un chemin est dédié. Au programme, les derniers mets issus de la cueillette du grand Marc. Et une photo signée Norbert Falco pour notre confrère Le Dauphiné Libéré.

Pertinence, enfin!

Ryunosuke Naito et Kwen Liew © DR

On l’annonçait tôt. Trop tôt? Ryunosuke Naito vient enfin d’ouvrir, avec son épouse, Kwen Liew, leur table de dix huit couverts, au 29 rue de l’Exposition, à deux pas de la Fontaine de Mars. Ce Japonais, passé au Taillevent, avec Alain Solivérès (qui glisse volontiers son adresse), au Meurice, aux côtés de Yannick Alléno puis Alain Ducasse, enfin au 1947 du Cheval Blanc à Courchevel avec le grand Yannick, qui a rencontré son épouse d’origine malaise chez Antoine avenue de New York, ne manque ni de talent ni d’ambition. Et c’est déjà l’événement secret du moment. Menus créatifs de 29 € (au déjeuner) à 85 € (dégustation, au dîner). On parie déjà pour l’étoile en février 2018! Réservations au 0145552096. La maison ferme dimanche et lundi.

La façade © DR

A propos de cet article

Publié le 3 avril 2017 par

Les chuchotis du lundi : Silva le patron, suspense au Royal Monceau, Decoret le maudit, le raté de Saintagne, du neuf à Pleyel, Bordier rebondit, l’Italien de Roanne, Pétrus s’en va, Ancher prend congé, 3 étoiles pour Veyrat, enfin Pertinence” : 7 avis

  • Sur Christophe Saintagne que l’on suit avec application depuis le Meurice: le billet le concernant est la suite de l’article du 21 décembre, https://www.gillespudlowski.com/161284/restaurants/paris-17e-quand-pol-roger-sencanaille-chez-saintagne, où Hubert de Billy de Pol Roger le présentait à une trentaine de journalistes, en indiquant qu’il s’agissait là d’un futur étoilé. Il est vrai que le repas était moyen et le « message » de Saintagne sans doute mal compris.

  • Lavauzelle

    Entièrement d’accord pour Decoret… A n’y rien comprendre… Kei a été enfin reconnu cette année, Decoret l’année prochaine ? Pour le Papillon de C. Saintagne, pouvez-vous nous dire en quoi consiste le menu du soir ? Grande envie d’essayer…

  • Bonnat Thierry

    Je suis en effet , helas , d accord avec Paule Neyrat. Il n a jamais voulu d etoiles meme si il en merite une . La qualite de ces assiettes est fabuleuse et il est vrai qu il est hors contexte .
    c est d ailleurs pour ca qu il est tres difficile d avoir une table . Il a voulu accesibiliser la cuisine pour tout le monde.

  • Reneau sylvain

    Très s bel article pour ce palace néanmoins je ne suis pas convaincu de vos sources en ce qui concerne le fait que ce soit le palace le plus étoilé au monde.
    Merci

  • J’ai également eu ce sentiment de remplissage… 11 nouvelles dont 3 qui n’apportent rien, c’est trois de trop…

  • Thibault

    Merci Paule Neyrat, pour ce commentaire. les Etoiles ne m’attirent pas.. je préfère vos mots « Plaisir et régaler.

  • Paule Neyrat

    Pourquoi ce billet acide et gratuit sur Saintagne ? Pour faire du remplissage ? Il n’a rien raté du tout puisqu’il ne visait pas une étoile ! Ce billet montre que vous ne le connaissez pas bien. Il y a plein de chefs maintenant qui ne résonnent plus en fonction des étoiles mais uniquement du plaisir de cuisiner et de régaler leurs clients. Son succès montre qu’il a raison.

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