Le Servan

Tatiana et Katia Levha © GP

C’est la belle surprise des parages du 11e dont le charme ne retombe pas. Deux sœurs eurasiennes – maman philippine, papa polonais d’où leurs prénoms slaves – Tatiana et Katia Levha animent avec grâce cette demeure ouverte au printemps dernier en lieu et place d’un anodin café d’angle. La façade extérieure ne paye pas de mine. L’intérieur, avec ses tables en bois, son comptoir noir et jaune avec ses tabourets, sa cuisine ouverte, sa clientèle d’afficionados passionnés (ce midi, mes confrères Alec Lobrano et Julie Andrieu étaient présents – à des tables séparées), donne le sentiment qu’il se passe ici quelque chose à tout instant.

Chinchard, artichaut, sarrasin © GP

Les mets, signés de Tatiana qui a travaillé notamment à l’Arpège et à l’Astrance, défilent avec joliesse. Le midi, le menu à 25 € est une grandissime affaire. Ce jour, bouillon genre pho, oeuf, champignons et nouilles ou chinchard, artichaut cru et sarrasin, puis cabillaud au pomelo, sésame noir, légumes rôtis ou onglet cuit cuit saignant avec sauce moutarde et chou de Pontoise assurent joliment. On n’oublie pas la tarte aux pralines et sa crème vanille, la poire Belle Hélène nouvelle vague et la tarte citron meringuée: du joli travail en vérité.

Oeuf, bouillon, nouilles © GP

On ne pinaillera pas si le chou de Pontoise, carrément exquis et gentiment acidulé, est un brin carbonisé sur les bords, si le chinchard est badigeonné d’un peu trop d’huile. C’est la musique d’ensemble qui est bonne, sonne juste. On est ici entre amateurs passionnés et on est prêt à tout pardonner. Une remarque tout de même, comme récemment chez Heimat, avec ces « vins naturels » qui le sont tellement qu’ils finissent par ressembler à du jus de fruit avec un brin de vinaigre. Comme ce gamay de Pouillé en Loir-et-Cher de chez Laurent Saillard manifestement « pas fait », mais le beaujolais village bio de chez Guigner à Faudon dit « la Bonne Pioche » est nettement mieux.

Cabillaud © GP

Onglet et chou de Pontoise © GP

Enfin, on précisera que si le menu on propose des zakouskis à 8 € en dehors du menu (coques, wonton de fromage et tofu, chicken wings fumés et frits), le soir, on joue ici la carte avec quelques produits plus coûteux, comme la barbue (au beurre de coquillages), l’agneau de lait (avec harissa et fromage frais) ou encore le ris de veau avec artichaut et citron confit …à 38 € ce dernier, qui peuvent donc aisément faire monter la note.

Tarte aux pralines © GP

Tarte au citron meringuée © GP

Poire belle Hélène © GP

Mais, tel quel, avec ses défauts, ses qualités, son charme, sa singularité, voilà un lieu à fréquenter en douceur et surveiller avec tendresse, complicité, mais non sans complaisance. Le service est prompt, vif, gracieux et Katia, qui est la vivacité même en salle, a réponse à tout.

Katia au service © GP