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Le Buerehiesel

« Connaissez vous Eric? »

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Article du 7 juin 2010
Eric Westermann ©Maurice Rougemont

Eric Westermann ©Maurice Rougemont

Dans la famille Westermann, je demande Eric. Papa Antoine est parti à Paris, investissant Drouant et Mon Vieil Ami dans l’île St Louis, conseillant des tables au Portugal, au Luxembourg et aux USA. Eric, le cadet (l’aîné Jean anime deux fast food chics: Secrets de Table) est, depuis trois ans déjà, maître chez lui, dans ce qui fut la demeure trois fois étoilée de son père. Il a mis son nom sur la carte, au dessus du nom du lieu: un signe!

Celle-ci  reproduit une toile de Muhl représentant un paysage d’eau et de forêt dans les tons verts qui trône dans l’entrée du « Bubu ». Bref, la sérénité baigne désormais dans la ferme jadis rapportée de Molsheim au cœur du parc de l’Orangerie. Modernisée,  avec sa  terrasse d’été, son service relax, mais précis, son maître d’hôtel sommelier d’exception, Jean-Marc Zimmermann, fidèle à la demeure depuis trois décennies, la maison ne manque pas d’allure.

Il possède une unique étoile chez Michelin. On attend la seconde pour cette année. On sait que depuis la retraite d’Emile Jung, succédant au départ d’Antoine Westermann, il n’y a plus de trois ni même de deux étoiles à Strasbourg – injustice ou non, surtout si l’on tient compte de l’aggiornamento opéré par Philippe Bohrer rue de l’Outre, on comprend qu’une part de l’avenir gourmand de la ville repose sur les épaules du petit Eric.

La vérité oblige à dire que tout ce que propose ce grand timide, sage,  réservé, mais sûr de ses gestes et de sa manière, est largement au niveau des plus solides espérances. Il y a bien une grande maison au cœur de l’Orangerie, pas seulement parce que la mise de table est soignée, le service précis, les vins splendides, proposés au mieux de leur fraîcheur et de leur forme (le muscat de Mochel à Traenheim en 2008 éclatant de fruit, le riesling Clos St Hune de Trimbach en 2003 d’une élégance altière avec une belle longueur en bouche,  le pinot noir 2005 du Clos St Landelin de René Muré), mais parce que la cuisine suit avec maestria.

L’Alsace revue au Sud : ce fut toujours ici le style tenu par Antoine ici jadis. Ce natif de Wissembourg a toujours eu le cœur ancré vers le midi, jouant de l’huile d’olive, de l’aubergine, des poissons de l’Atlantique et de la Méditerranée avec allant. Eric, qui lui a emboîté le pas sur ce terrain, n’oublie pas de saluer l’Alsace avec sûreté. Il reprend à sa manière docile le chant de la tradition et du plat breveté « Alsace de toujours » avec le souci de leur faire rendre un son neuf. Ainsi les schniederspätle, ces pâtes « de tailleur » devenues de fins oignons à l’oignons doux, flanquant les cuisses de grenouilles au cerfeuil, ainsi le dos de brochet avec ses quenelles soufflées, ses écrevisses pattes rouges en fines bouchées, ses taglioni à la poudre d’orange et sa sauce Nantua.

Côté Sud, les queues de langoustines juste raidies avec  encornets, moules et coques, praires et bulot, comme le homard bleu rôti avec sa crème d’asperge tranchée à l’huile de curry, comme le turbot rôti avec nage de coquillages au citron confit sont d’une limpidité et d’une fraîcheur éclatante. On ajoute, pour la note carnassière, les deux beaux exercices de viandes ménagères, devenues sophistiquées, que font la pièce de veau de lait élevé sous la mère poêlée et braisée, avec sa fricassée de morilles, ses asperges vertes, ses pommes macaires, ou le cochon fermier de Lapoutroie avec le carré rôti, la poitrine confite, les gnocchis de pommes de terre et le fritots de jeunes légumes, on se dit que le grand air de la tradition sonne là une musique d’une belle harmonie.

Ajoutons y des desserts de classe (allumettes feuilletées à la rhubarbe, amandes et sorbet aux fraises ou croustillant café au caramel au beurre salé et glace blanche au café), on se dit que le fiston Eric n’est pas indigne des trois étoiles de papa. Un mot donc au Michelin qui achève ces temps ses enquêtes : allez donc ce voir ce garçon en pleine force, maîtrise souveraine et personnalité entière recouvrée et dites vous que l’avenir de l’Alsace gourmande passe inévitablement par le beau chemin de l’Orangerie, semée de cigognes venues du parc tout voisin.

Le Buerehiesel

4, parc de l’Orangerie
67000 Strasbourg
Tél. 03 88 45 56 65
Menus : 33 (déj.), 65, 86 €
Carte : 75-95 €
Site: www.buerehiesel.fr

A propos de cet article

Publié le 7 juin 2010 par

Le Buerehiesel” : 5 avis

  • cadinot

    Bonjour et merci
    Mon mari et moi même avons regardé l’émission de Petitrenaud, et nous aimerions déguster ces bonnes choses qui nous faisaient saliver
    J’aimerai savoir où nous pourrions coucher car nous sommes de Rouen
    Cordialement
    Annick

  • alain

    nous n’avons pas encore essayé à la carte, mais il y a 2 semaines nous y avons déjeuné ( en prenant la précaution de réserver 1 semaine auparavant, heureusement!!)
    le menu ( entrée, plat + dessert ) est à 33€ !!!
    tout bonnement incroyable rapport qualité/prix
    c’est beau
    c’est bon
    non,c’est délicieux
    et copieux
    le plat change tous les jours et est très « canaille », plat « classique tradition » mais revisité façon Eric Westermann
    Quant à Jean Marc Zimmermann il est toujours d’aussi bon conseil
    bref, à conseiller vivement

  • On est bien d’accord!

  • Marc

    je n’ai pas encore essayé la nouvelle version du croco mais pour moi le buerehiesel est l’une des deux meilleures tables de strasbourg. La cuisine est excellente, les plats sont revisités, les desserts exquis. Du grand art! J’ai hâte de réessayer le grand menu.
    A bientôt

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Le Buerehiesel