Le 39V
« Paris 8e : Y’a bon Vardon ! »
Frédéric Vardon ? Il est le sérieux incarné. Trône au dernier étage d’un immeuble haussmannien ouvert sur le ciel de Paris. La manière du gars Frédéric, natif de Flers dans l’Orne, élève des trois Alain (Dutournier, durant deux ans et demi, Chapel, chez qui il passa six ans, enfin Ducasse durant quatorze ans), il n’a jamais oublié qu’il était fils de charcutier-traiteur, vouant un culte à la grande tradition, aux produits de qualité mis en valeur avec netteté, quitte à se remettre et à revendiquer sa liberté au gré de l’air du temps.
Un repas chez lui, ces temps-ci? Les hors d’oeuvre en rafale, le tartare de veau, sauce tonnato, en guise de fringant amuse bouche, puis en façon « tapas » à grignoter tartare de thon rouge de Méditerranée avec ajo blanco (façon soupe blanche à l’ail et aux amandes à l’andalouse), tourteau de Boulogne-sur-mer emietté relevé de concombre et sarrasin, superbe pâté en croûte de foie gras, canard, échine de porc, pickles de moutarde plus saint-jacques de la baie de Seine aux agrumes bio de Corse.
Fraicheur ici, générosité gourmande là: on aime forcément ce balancement circonspect entre tradition et modernité. Un coup de chapeau au riz Fukumaru à la fois gluant et crémeux, sur lequel la truffe noire fait merveille et au Pithiviers de colvert et foie gras avec condiment au yuzu de Corse, qui constituent les morceaux de bravoure du repas.
On y ajoute les jolis douceurs, crème glacée de Normandie, miel et pollen (clin d’oeil à la fameuse glace au fromage blanc badigeonnée de miel amer d’Alain Chapel), les pommes en Römertopf, avec cerfeuil et pommé normand (un jus façon concentré de pommes), plus clafoutis aux poires conférence.
On a accompagné le tout d’un superbe vin effervescent, élégant, vif, noiseté et beurré, long en bouche, produit au bord du si romantique lac du Bourget (« Les amants du lac ») produit par le producteur de films Jean-Luc Michaux avec l’aide du talentueux vigneron Michel Grisard. Une belle alliance !