Le Bistrot du Mois – Paris 2e : un Gavroche en or
Le saucisson (chaud) de Lyon pommes à l’huile, le coq au vin, la blanquette de veau, la côte de boeuf pour deux, les (divines) tripes à la lyonnaise, joliment tomatées, le petit salé aux lentilles cuit en cocotte, la saucisse sèche, la terrine de campagne et le pâté de tête, le cervelas vinaigrette et les oeufs mayo : il y a, certes, tout cela chez l’excellent Nicolas Decatoire, qui a fait de son repaire proche de la Bourse un QG d’amis. Mais il y a surtout ce qui ne saurait se réduire à un plat, à un énoncé sur l’ardoise, ni à une mode, et c’est tout simplement l’ambiance unique qui règne chez lui.
Son Gavroche, si bien nommé, – dont le deuxième nom, inscrit sur une enseigne, doublant la première est « le coeur du beaujolais » – est bien un bistrot en or. On y est allé le 16 novembre dernier – 3e jeudi du mois -, le jour de l’arrivée du beaujolais nouveau, et il y régnait là, dans un cadre de rade de toujours, avec ses tables archétypiques nappées de vichy rouge et blanc, une gaité unique, une manière d’être, une joie véritable de se retrouver tous ensemble pour fêter un événement gourmand, de trinquer sans façon au bar, d’échanger en riant des paroles au vent, plus un rien d’électricité dans l’air, bref une joie bonhomme, des sourires clairs et une envie d’être là devenue rare dans la restauration contemporaine. Certes, le bon frichti, sa qualité, sa sincérité, sa franchise n’échappent là à personne.
Reste qu’on vient d’abord se retrouver au 19 rue Saint-Marc, à deux pas du Palais Brongniart, comme on se rend à son club de copains farceurs, mais qui prennent la bonne vie au sérieux. On ne triche pas ici avec les produits, ni avec les jolis vins ici servis, comme ce beaujolais du domaine Garlon Theizé, au coeur des Pierres Dorées, qui coule en bouche comme du velours. Certes, Nicolas devrait le servir plus frais – il y gagnerait en fruit – mais c’est là reproche mineur. Les prix ont su raison garder. La Bourse est à côté, qui envoie ici ses courtiers, ses employés des maisons de change toutes voisines ou ses commissionnaires qui savent qu’ils trouveront ici pitance et crus honnêtes à fort bon compte.
Le moment où un garçon complice arrose le saint-marcellin (coulant) d’un brin d’huile d’olive et lui prodigue un tour de moulin à poivre est un instant béni des dieux de la gourmandise, enrobé de joie profonde. Les desserts sont des souvenirs d’enfance, qui se nomment gâteau aux pommes, tarte aux prunes rouges, crème caramel, baba au rhum ou fondant au chocolat. Le marc de Bourgogne du pays beaujolais signé de la maison Jacoulot à Romanèche-Thorins (Saône-et-Loire) coule dans le verre avec aise et escorte le café avec panache. Un ange passe. Voilà un bistrot heureux.
Le Gavroche
19 Rue Saint-Marc
Paris 2e
Tél. : 01 42 96 89 70
Fermeture hebdo. : dim.
Horaires : 8h-minuit.
Carte : 30-50 €.
Le plaisir de voir ta « frimousse » mon cher Nicolas et une visite me semble de rigueur !