Le Petit Trianon

La chef Linda et les desserts © GP

Magie d’internet, don d’ubiquité ou aide-express du TGV: j’étais hier soir le premier à goûter la cuisine du Petit Trianon. Le lieu ne vous dit rien? Ni son nom? Rassurez vous: vous n’êtes pas le seul… Aux commandes, une équipe jeune en duo Julien Labrousse, qui a créé plusieurs tables mode, tendance et à succès, dans Paris sous le sceau de la recréation historique (Hôtel du Nord) et Abel Nahmias, producteur de cinéma (de Michael Youn à Yann Moix), fils de la grande Olympe et qui vous savez (Albert N. pour les intimes) gère le grand théâtre proche, le Trianon, qui fut, dans une autre vie, l’Elysée Montmartre ou le Théâtre Victor Hugo, où Mistinguett fit ses débuts, avec ses stucs 1880, sa salle imposante, son escalier en fonte, sa façade chantournée sur le boulevard.L’idée ici même: compléter ces lieux appropriés pour les conférences, les mise en scène d’entreprise et les concerts (Higelin, Louis Chedid, Carla Bruni s’y sont produits) d’un bistrot/brasserie susceptible d’accueillir tout le monde et à toute heure.

Tartine de sardine Belle Iloise © GP

C’est donc chose faite depuis hier soir. Le miracle, le décor de bistrot 1900 plus vrai que nature aidant, avec ses tables, ses chaises, ses luminaires, son zinc du même acabit, est que l’on est bien en peine d’imaginer que ce Petit Trianon – c’est le nom du lieu tout neuf – n’ait pu être toujours là, tel quel. Comme Julien Labrousse le fit pour Hôtel du Nord, on a joué, avec un succès incontestable, la reconstitution historique et heureuse, dans ce qui fut, il n’y a guère, un magasin de souvenirs à « tout à un euro ». Mais il paraît qu’au début de l’autre siècle ce fut vraiment un Petit Trianon.

Cabillaud grillé sauce d’été © GP

Bref, et j’en viens aux choses sérieuses, on peut venir boire, grignoter, deviser, manger fort sérieusement à toute heure. La carte et la cuisine sont signées de la petite Linda, une jeune chef qui a travaillé chez Olympa, en sa Casa de la rue St Georges. Et l’on se doute que le registre canaille chic, relax bourgeois, ménager léger de la maison est supervisée dans l’ombre par cette dernière qui est après tout la maman d’Abel et veille aux destinées gourmandes de son producteur de fiston.

Sauté de veau, tomates et olives noires © GP

Hier soir, en tout cas, l’artichaut vinaigrette,  la tartine de la Belle Iloise au beurre salé, le cabillaud grillé avec sa sauce été (vinaigrette à l’huile d’olive et câpres), le sauté de veau (fondant) à la tomate et olives noires étaient fort bien mis. Comme le coeur de salade avec tomate et mozzarella, l’oeuf mayo,  le hamburger ou les pommes de terre sautées en tartare à la coriandre sauce verte de la table voisine.

Le Petit Trianon © GP

On ajoute, pour faire bonne mesure, les desserts dans le ton (oeufs en neige, crème brûlée citronnée, riz au lait vanillé, tartelette aux fruits rouges) et le choix de crus malicieux, comme ce petit rouge vin de pays du Mont Caume, proche de Bandol, signé du domaine Réjane à 11,50 cl la carafe en demi. Bref, ce n’est pas le restaurant du siècle, mais une bonne pioche sur un bout de boulevard, hier dévolué aux sex shops et assimilés, qui n’en possède pas tant que ça.