Les chuchotis du lundi : la révolution Nasti, Frechon à Saint-Trop, Nibaudeau le retour, un italien à la Chèvre d’Or, Jolibois au Ferret, les 28 ans du Pudlo, les Lanher au Moulleau, Savoy consacré à Nevers, Gicquel au Crillon
La révolution Nasti
Plus régional, plus chaleureux, plus vosgien, plus alsacien, moins technicien, moins gadget et sans esbroufe: c’est la nouvelle table d’Olivier Nasti. Le MOF 2007 et deux étoiles à Kayserberg a profité du départ de son frère Emmanuel, architecte et désormais caviste près de Mulhouse, pour bouleverser radicalement l’ancien décor de son restaurant – jadis vert et or, avec des tables sans nappes – en en changeant le nom – c’était jadis 64 °, façon laboratoire -, histoire de se réapproprier le lieu. Place donc à « la Table d’Olivier Nasti », avec un cadre qui met le bois en valeur, un grand chariot de fromages composé avec la production des fermes environnantes, des guéridons qui évoquent des cigognes et des plats qui disent leurs racines comme cette neuve pomme soufflée au « bibeleskäse » (le fromage blanc alsacien). La nouvelle perspective: évidemment la 3e étoile.
Eric Frechon à Saint-Tropez
Il est partout, au Bristol, bien sûr, où il détient 3 étoiles, au 114 Faubourg, qu’il supervise, et en a une, au Mini-Palais, avec son élève Stéphane d’Aboville, au Saint-Lazare, dans la gare Saint-Lazare, à Londres, au Lanesborough du groupe Oetker, enfin au Drugstore parisien, avec son disciple Julien Chicoisne. Eric Frechon, qui sait déléguer et a le don de se démultiplier, sera également, cet été à Saint-Tropez, aux côtés d’Annie Famose, ex-championne de ski devenue aubergiste à Avoriaz et dans la fameuse cité varoise. Frechon n’aura pas les pieds dans le sable, mais signe une carte, à l’enseigne de la Petite Plage, qui sera en fonction sur le port mondain le plus célèbre du monde, à côté de la fameuse terrasse du Girelier (également propriété d’Annie Famose) et non loin de Sénéquier (de Thierry Bourdoncle).
La maison où il pose ses couteaux s’appelait l’Escale. Cela devient « la Petite Plage« . Au programme: carpaccio de loup mariné, citron, piment et coriandre, concombre givré à la menthe, daurade sauvage grillée et vapeur de légumes, gigot d’agneau au feu de bois et vraie ratatouille ou encore millefeuille tropézien. Sans oublier, le « retour de pêche », la manière du natif de la Somme élevé au Tréport, Eric Frechon, d’imaginer la bouillabaisse.
Pascal Nibaudeau le retour
Pascal Nibaudeau? On l’a connu au Pressoir d’Argent, la table étoilée du Grand Hôtel de Bordeaux, première manière. Ce natif de Montmorillon, élevé en Charente-Maritime, qui a travaillé au Hilton Bruxelles avec Michel Theurel, puis à Londres au Hilton Park Lane, avant de rester quinze ans avec le roi belge de la cuisine de la mer, Yves Mattagne au SAS Sea Grill, avait quitté Bordeaux en 2014 pour prendre en main les fourneaux du Pinasse Café. Il vient de reprendre au Canon une boutique de traiteur qui eut jadis son heure de gloire et à laquelle, il tente de redonner des lettres de noblesse, en mélanger les condiments, produits d’épicerie fine, vins divers et charcuteries. Son originalité les plats tout prêts à réchauffer à la maison, comme la lotte au lait de oie gras, le lomo à la basquaise, les ribs marinés sauce barbecue, le pad thai au poulet, le curry vert de volaille, le ris de veau aux écrevisses et bisque de homard et la soupe de fraise à la rhubarbe. Accueil dynamique de sa compagne Marion Natalis qu’on a connu au service à l’hôtel de la Plage à l’Herbe et au Bouchon du Ferret.
Un Italien à la Chèvre d’Or
La Chèvre d’Or à Eze, dont le chef exécutif est Arnaud Faye, inaugure un nouvelle table italienne qui sera ouverte au dîner d’avril à fin septembre. Disposant d’une vue phénoménale sur la Riviera, Le Stagioni proposera une cuisine ambassadrice de toutes les traditions culinaires de la Botte. Aux commandes des fourneaux, Ugo Gastaldi, natif de Turin, passé à Washington au Café Milano et qu’on vit récemment à l’Assaggio, le restaurant de l’Hôtel Castille rue Cambon. Il y fera découvrir sa version à lui du vitello tonnato au veau fassonne, mais aussi l’oeuf mariné et croquant aux asperges avec son fromage fondu de Castelmagno, les linguine au loup et pesto genovese, les agnolotti del plin façon piémontaise ou encore le filet de grondin aux cébettes et coquillages avec sa soupe façon brodetto. Quelques délices en perspective. Etoile en vue, d’autant que les tables italiennes laurées au Michelin sont rares, sinon inexistantes, sur la Côte. On en parle très vite.
Eric Jolibois au Ferret
Vous souvenez-vous d’Eric Jolibois, qu’on connut jadis au Clocher Péreire et qui travailla au Bristol, au Taillevent et au Drouant, à l’époque de Louis Grondard et de Yannick Alléno? On a retrouvé ce quadra solide au Bouchon du Ferret, la table en vue du Cap-Ferret, en bout de Bassin d’Arcachon, dans la quartier ostréicole, face à la dune du Pyla. Le lieu, jadis créé par Damien Boulan, ostréiculteur local, et Nicolas Lascombes, du Bouchon Bordelais et de la Brasserie Bordelaise, a été repris par Jonathan Gomez, qui dirigeait l’Escale sur la Jetée, et David Lafargue, associé à Jean-François Tastet, qui possède une douzaine de tables sur le Bassin. Ils en ont conservé l’esprit et le goût du bon produit frais du jour, avec l’accueil dans la simplicité. Il y a du monde, certes, mais la qualité est là, imparable. L’ardoise du jour reflète les idées du moment. Encornets persillés, cannelloni de brousse au tourteau, crème de fèves, duo d’asperges et sorbet aux huîtres ou velouté de petits pois avec sa crème fouettée à l’huile de noisette régalent sans mal. On en reparle prochainement.
Les 28 ans du Pudlo
Allez, on ne va pas tout vous raconter. Mais on promet de tout vous révéler ce soir de la 28e édition de ce guide de Paris, dont l’aventure débuta en 1990 – eh oui, déjà… Des assiettes qui montent et celles qui descendent, des lauréats (chefs de haute volée, bistrots gourmands, artisans des métiers de bouche) qui font honneur à un Paris qui change et qui, en 2018, n’a jamais été aussi gourmand, convivial, varié, offrant un rapport qualité prix sans pareil, surtout si on la compare à ses grandes voisines européennes. Les chefs du monde entier, du Liban, du Mexique, d’Israël, du Japon et d’ailleurs, viennent d’ailleurs enrichir sa riche palette. Un peu de patience… vous allez très vite tout savoir.
Les Lanher au Moulleau
David Lanher? On connaît par coeur ce roi du bistrot parisien, qui a essaimé entre Bastille (Maison Breguet), Saint-Germain-des-Pères (Racines des Près, le Bon Saint-Pourçain, Anima), les grands boulevards (Racines, No Glu, Caffé Stern, Panache) et même … New York (Racines). Ce qu’on sait moins c’est que David qui possède une maison au Moulleau, le quartier tendance d’Arcachon (son Saint-Germain-des-Près, alors que le Pyla serait son seizième), veille de loin sur sa petite soeur Marie, qui est « la » fromagère locale, à l’enseigne de la Fille du Fromager, non loin du mythique Bar de l’Oubli animé par Philippe Berbizier. L’explication de l’enseigne à leur beau-père, créateur de la Fromagerie Le Gall à Versailles.
Guy Savoy consacré par Nevers
Etre prophète en son pays natal: pas si courant! Mais couronné de son vivant et sacré par et parmi les siens : plus rare encore. C’est ce qui arrive à Guy Savoy à qui Nevers, sa ville natale, vient de consacrer une esplanade sise plein centre, avec un panneau explicite (« chef cuisinier français né à Nevers en 1953, connu mondialement »). On imagine toujours que le trois étoiles de l’hôtel de la Monnaie à Paris, qui régna si longtemps rue Troyon, et fut aussi chez lui rue Duret, jadis, dans le 16e, est originaire de Bourgoin-Jallieu en Isère. C’est oublier que s’il fut élevé dans cette dernière commune où sa mère, Marie-Léonie, tenait la Buvette de l’Esplanade, et où il fut apprenti chez le pâtissier Louis Marchand, il reste attaché à sa ville natale et à sa région bourguignonne natale. Lors de son apprentissage chez les Troisgros à Roanne, il se liera d’amitié avec Bernard Loiseau, le légendaire. cuisinier de Saulieu, en Côte d’Or.
Pablo Gicquel au Crillon
Ce lundi, le Crillon l’annonce: Pablo Gicquel, 28 ans, remplace le MOF Jérôme Chaucesse, dont il fut l’adjoint, comme chef pâtissier au Crillon. Ce jeune basque, élevé en Bretagne, a été formé par Thierry Bamas à Anglet et Louis Le Daniel à Rennes, deux MOF qui reflètent bien ses deux origines, passé au Bristol avec le génial et regretté Laurent Jeannin et au Péninsula. Modernes et savoureuses, ne dédaignant pas l’esthétisme – à l’image de l’hématite en chocolat – ses douces et craquantes créations révèlent un passionné singulier. A suivre de près.