Audley

Au Audley © GP

Je suis un vieux londonien, aux airs madrés. J’ai mes habitudes à Mayfair, entre Audley Street et Mount Street, non loin du Gavroche des Roux, à mi chemin du Dorchester et du Connaught, juste en face de Purdey, fournisseur fameux des amoureux de la chasse et, désormais, de la boutique relax de Marc Jacobs. Mon QG se nomme Audley, qui est sans nul doute le plus victorien des pubs londoniens.

Chacun a son pub chéri, le Prospect of Withby, dans les docks pour les amoureux de la Tamise, le Salisbury, si joliment Art nouveau, près  de Covent Garden, dans St Martins Lane, le Ye Grapes dans Shepherd Market, le Sherlock Holmes, dans Northumberland, le Cock ou le Ye Old Sheshire Cheese dans Fleet Street. Et j’oublie le Coach & Horses, aux pans de bois pieusement tudor dans Bruton Street, et le Grenadier, charmant dans Wilton Row et Belgravia. Je cite de mémoire. Mais je garde pour la bonne bouche le Audley, sa situation d’angle, ses boiseries, ses moulures, ses teintes rouges, son bar lustré, ses vieux messieurs dignes, donc cet habitué barbu et charmant qui vient là tous les jours, à la même place, à l’extrême droite du bar vers le coin lounge, mais qui se montre, hélas, rétif à la photographie.

Audley côté lounge © GP

So pub et so Mayfair, ou so Audley! Je donne maints cafés parisiens pour ce lieu que je fréquente depuis quelques trente cinq ans au moins, où je suis venu tout à l’heure, sur le coup de midi trente, boire un gin and orange comme dans le bon vieux temps. Devant moi, défilaient les sandwiches au saumon et le fish & chips. Et puis surtout les années anciennes et qui reviennent. Je me récitais en moi même la dédicace de Verlaine à Germain Nouveau, que cite Morand dans son Londres éternel.

« Vers des bars attractifs comme de vieilles fées

Où de longues misses, plus blanches que l’hermine

Font couler l’ale et le bitter dans l’étain clair…«