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Bras

« Laguiole : la magie Bras règne sur l’Aubrac »

Article du 20 juin 2018

Sébastien Bras © GP

Rien n’a changé. La maison Bras affiche complet, se moque des étoiles, vit à l’écart des guides, règne sur l’Aubrac, avance ses pions en quête du bonheur. Michel est là en visiteur. Sébastien semble apaisé, gérant une équipe détendue qui propose la plus jolie des leçons de choses sur les hauts de l’Aveyron, à 1200 m. d’altitude, là où le département flirte avec ses voisins, Lozère et Cantal. A la croisée des mondes, Sébastien peaufine un style.

Oeuf coque, mouillettes, tarte aux cèpes © GP

En famille © GP

Cette école des herbes, qu’on connut jadis à Veyrier-du-Lac (Veyrat), St Bonnet le Froid (Marcon), Arbois (Jeunet), qu’on vit se déployer hors de nos frontières (comme au In de Wulf de Kobe Desramaults), c’est bien ici, et même au coeur de village de Laguiole, au Lou Mazuc, qu’elle prit son envol, jadis et se développa sur le plateau, à l’enseigne de Suquet. Ce qui se propose là? Balade et gourmandise, enracinement et délicatesse. Un menu ici ressemble à une tendre balade entre drailles et lacs, halliers et sentes buissonnières.

Bar, tagette, petits pois © GP

Sébastien et Michel Bras © GP

Cela démarre avec la belle assiette d’oeuf coque et mouillettes, plus fine tarte aux cèpes, se prolonge avec le caillé de brebis, morue, betterave, carotte, puis le filet de bar ikejimé assaisonné de tagette acidulée, avec son émincé de pois croque-tout en salade, ses olives à la grecque, ses fleurs de fèves, bourrache et mélisse, et encore la formidable endive de pleine terre de Lagardelle pochée au safran de Saint-Geniez, relevé de citron mexicain fermenté, cerfeuil musqué plus la feuille de réglisse (glycyrrhiza echinata) .

Endives au safran © GP

Céline Ruet, sommelière, et Sergio Calderon © GP

Céline Ruet, sommelière et Sergio Calderon © GP

On n’oublie pas, au passage, les herbes rares, les légumes bien typés, les poissons d’eau douce. Comme l’omble chevalier en filet poché dans une huile parfumée aux alliacées, ses coques de cèbes de Lézignan assaisonnées de ciboulette, pimprenelle et oseille du jardin. C’est une cuisine vie, douce, paisible, des mets qui ne pèsent pas, jouant légèreté et fraîcheur. Sur laquelle le malicieux sommelier argentin Sergio Calderon et son adjointe Cécile Ruet propose un blanc frais d’Argentine, Amalaya, issu de torrontes et de riesling, le blanc côtes du marmandais, Coucou Blanc d’Elian Daros , avec ses notes vives et oxydées, le charmeur « derniers états d’âme » du Mas Jullien en rouge, sur les Terrasses du Larzac.

Omble chevalier poché dans une huile aux alliacées © GP

Foie gras rôti/poché, betteraves, purée de chou à l’amandon © GP

On reprend avec le foie gras de canard rôti et poché du domaine de Rouilly, flanqué de jeunes betteraves à l’aigre-doux, d’une purée de chou fleur à l’amandon, d’une julienne de chiogga et de raifort officinal (qu’on nomme aussi cranson). Et puis les asperges vertes de Villereyrac croûtées au pain à la noisette, avec son émulsion à la carotte parfumée à la badiane, ses mousserons, ses feuilles de moutarde. Avant le rare carré de brebis de Rignac marqué à la grillade, avec sa touche de fromage de chèvre relevé d’anis vert, blé dur façon condiment, chou kale et poirée.

Asperges vertes croutées au pain et à la noisette, émulsion à la carotte © GP

Carré de brebis au grill, fromage de chèvre à l’anis vert © GP

Il y a encore l’aligot revisité, le grand chariot de fromage aveyronnais  (pérail, écir, laguiole, therondel, bleu des causses) et, bien sûr, ces fines douceurs de fin de repas: cerises Burlat de Moissac pochées au thym-serpolet, biscuit Ibarria 67 %, mousse légère à l’amande, sorbet au thym, sorbet au thym, enfin nougatine au sarrazin avec sa crème à l’orge malté, son biscuit de Savoie imbibé à la cardamome, ses céréales au sureau glacé et vin réduit, avec les petits cornets glacés d’enfance.

Présentation des fromages © GP

Cerises burlat, biscuit Ibarria, mousse amandon, sorbet au thym © GP

Voilà de la cuisine comme de la poésie pure, une symphonie gourmande comme une balade, un agape de rêve comme une fête hors norme. La magie Bras est bien intacte.

Nougatine au sarrasin, crème à l’orge malté, biscuit Savoie à la cardamome © GP

Bras

route de l’Aubrac
12210 Laguiole
Tél. 05 65 51 18 20
Menus : 145, 178, 230 €
Carte : 180-250 €
Fermeture hebdo. : Lundi, mardi, mercredi midi
Site: www.bras.fr

A propos de cet article

Publié le 20 juin 2018 par

Bras” : 9 avis

  • Negrita

    Bonjour à tous
    J avoue que je trouve etrange de parler de pathos et autres avis assez negatifs
    Je salue la liberté de sebastien Bras
    Je salue le courage qu il a eu poir prendre cette decision , sachant pertinnement qu il serait critiqué
    Je le salue de decider de travailler sans cette tyrannie exterieure et de ne vouloir exercer que sous sa propre pression et continuer a exiger de lui meme ce niveau d excellence .
    J ai vu cet homme à la chambre des metiers de Rodez , partager sa passion aupres des apprentis simplement parler de cuisine , d’excellence , de passion, de terroir , de la vocation necessaire .
    J ai trouvé formidable son engagement et son intégrité.
    Chapeau bas l artiste et longue vie à Bras

  • Philippe Lou

    Jean-Pierre,
    Je partage en grande partie votre point de vue. Je trouve cela un peu facile. Se pose la question de savoir si l’on peut également demander à être retiré d’un guide. Il m’aurait paru beaucoup plus noble de voir une déclaration de Sébastien Bras disant qu’il ne jouait plus dans la cour du Michelin et de ses critères et que de ce fait l’on pouvait s’attendre à le voir perdre une ou deux étoiles dans les prochaines années, mais qu’il préférait travailler librement. Demander un retrait pur et dur plein de pathos avec vidéo publique m’a gêné. En effet le Michelin est un gros coup de pouce pour la notoriété et le nier d’un coup me semble abusif. Après je ne suis qu’un consommateur et je ne me représente sans doute pas la pression que cela peut représenter pour un chef.

  • Boubou

    Jean Pierre… Soyons sérieux.. Ils ont eux même dis qu’ils partaient du guide car il imposé trop de choses pour qu’ils puissent exprimer leurs talents… Gault et Millau ne fais pas cela. C’est peut être simplement la raison… Et ce n’est pas parce-que l’on apprend à l’école que l’on y reste à vie !!

  • ERIC COMMANDRE

    Pfffffffffffffffffffffff , jaloux , je connais tres bien les Bras , une famille formidable et exemplaire de part leur parole , leur éthique et leur gentillesse .

  • Sans les étoiles Michelin, le Suquet de Michel Bras n’aurait jamais vu le jour ! Un peu trop facile aujourd’hui de vouloir maintenant vivre sans les étoiles après en avoir tant profité !
    Et au final, l’ego de Sébastien Bras est ainsi préservé puisqu’il ne les perd pas.
    Enfin, que je sache, la Maison Bras est toujours dans le Gault et Millau 2018 avec 4 toques et 18/20, deux poids deux mesures …

  • Viguier Marie Françoise

    C était tout simplement fabuleux le repas le cadre le service l accueil ! À refaire et j oubliais le petit cadeau après le repas !

  • Glorieux

    J’y ai mangé début juin… Et Déception ++
    Si voulez ça voir pourquoi… (Mail)

  • J’ai été à bonne école, cher Francis! Amitiés

  • jalain

    Quel photographe ce Gilles Pudlowski ! fait pas que d’manger !

    amitiés

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !

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