Haerlin au Fairmont Hotel Vier Jahreszeiten
« Hambourg: luxe et gourmandise au Haerlin »
C’est la table de grand luxe du Vier Jahreszeiten, tenue à bout de bras par un service aux petits oignons et, depuis onze ans déjà, par le sage Christoph Rüffer. Ce natif d’Essen, formé à la Residenz dans sa ville natale, mais aussi aux fameux Bareiss et Traube Tonbach de Baiersbronn, avant le Gourmet d’Otto Koch à Munich, joue là une partition solide, vive, ouvragée, pédagogique.
Chaque plat est expliqué avec force petits papiers qui content le détail de chaque ingrédient, son traitement, voire son histoire. Et l’on se régale au gré de deux menus alertes et séduisants. Les amuse-gueule sont précieux, les mets savants, les goûts précis, nets, aiguisés. La maison possède deux étoiles. Elle lorgne à l’évidence sur les trois. Ce que peut suggérer une cave aguicheuse, un cadre clair, cosy, ornemental, mais sans chichi. Bref, on prend place ici, face au lac, et on se laisse faire.
Crème de maïs et « neige » de beurre et noix, foie gras à l’orange, thon et cacahuète sont des prémices minis. Le festival commence déjà avec l’omble chevalier revu au goût local avec blanc d’œuf à la crème de raifort, betterave, glace de moutarde, cresson – superbe! On a oublié au passage une langoustine bretonne goûtée en cuisine avec pommes purée et caviar. Royal…
Ensuite? le foie gras à l’ananas, thym citron et noix de macadamia, un peu riche, esthétisant et pâtissier, mais fort gourmet. Puis encore le « fish & chips » de sole avec salade romaine et truffe. Et puis le skrei des îles Lofoten – décliné en filet et tripes- avec son splendide jus de chanterelles aux artichauts. Les vins de l’Allemagne fortiche suivent comme ce frais riesling Herrenberg de Von Schubert en vallée de Ruwer ou ce pinot noir Kammerberg du Palatinat signé Friedrich Becker aux airs de grand bourgogne.
Ce dernier s’accorde sans mal avec le lièvre aux oignons, concombre et crème aigre, comme à l’agneau du Limousin aux poires Nashi et tapenade d’olives noires. Les fromages de Bernard Antony à Vieux-Ferrette sont là en embuscade. En issue, on joue la fraîcheur avec le faux oeuf du sud (chocolat banc en coq et fruit de la passion aux airs de jaune d’oeuf) avec sorbet et noix de coco, plus mangue passion, avant l’orange sanguine en sorbet et fruit confit, parfait au thé yaourt croustillant et croûte de cacao caramélisé. Savant et digeste à la fois. Bref, une grande table de l’Allemagne qui sait jouer de l’air du temps sans oublier ses racines.