La Pergola au Rome Cavalieri
« Rome : le roi Beck à la Pergola »
Il est le nouveau roi de Rome, depuis 25 ans déjà. Allemand, natif de Bavière, 58 ans, il a travaillé jadis, quatre ans, chez Heinz Winkler, natif de Bolzano, à Aschau près de Munich, et exerce sur la terrasse à 180° de l’hôtel Cavialeri. Eh oui, ce petit bonhomme haut comme trois pommes, qui parle italien avec l’accent traînant de l’Allemagne du Sud, est bien le chef le plus brillant, plus créatif, le plus technique sans doute, de la cité éternelle.
Son domaine se nomme la Pergola. Autant dire qu’on y domine Rome. On est « dedans » et « dehors » à la fois, au-dessus d’un blockhaus de luxe revu en hôtel fonctionnel, non sans charme moderne. Il y a le vaste hall, le jardin ombragé, la piscine. Puis la terrasse au dernier étage panoramique, la salle ouvragée avec ses boiseries, le service au petit point, mené par Simone Pinoli, italien de Côme, si proche de la Suisse, qui travailla d’ailleurs au Cygne à Genève, et parle français comme vous et moi.
Il est le meilleur ambassadeur d’Heinz Beck, adopté par le pays de son épouse, sicilienne, qui imagine une cuisine transalpine avec une technique très française, et des instruments de cuisine ultra moderne pour réaliser, avec finesse, précision, légèreté, au service de produits 100 % italiens, au « top » de leur registre, des mets de haute volée et aussi, eh oui, de santé. Il y a du naturopathe chez Beck, qui propose, outre de belles huiles, une fougasse à tomber par terre, avec une mise de table raffinée, des menus vifs, sains, équilibrés.
Des exemples de ce qu’il propose? Il y a d’abord les amuse-bouche de choix, comme les cannoli de pommes de terre violettes avec ricotta de buffle et tomate liquide, la polenta croustillante aux oignons nouveaux et tamarin, la tartelette de sureau noir et queue de boeuf ou encore l’omble-chevalier mariné avec sa mayonnaise au concombre et sa fine sauce aux agrumes. Tonique !
Les choses sérieuses? Elles arrivent avec la langoustine aux racines et châtaignes avec son infusion de poire et sa râpée de truffe blanche d’Alba, la sériole marinée au céleri-rave à l’eau de mer et sa pomme oxydée, la fine salade de seiches grillées et gel de vinaigre fumé ou encore la composition de champignons et légumineuses, sans omettre ce chef d’oeuvre italien que constituent les admirables « fagotteli la Pergola », qui revoit la carbonara en légèreté sous formes de ravioles légères et divines.
Il y a encore les gambero rosso de Sicile (crevette rouge), avec quinoa, sauce curry, salsifis lyophilisés, le fin turbot au potiron, carotte et sauge, puis l’agneau sauce alla Coratella, splendide sauce aux abats d’agneau (poumon, cœur, foie, thymus) mijotés avec des oignons dans du vin blanc et de l’huile d’olive, aux fleurs de fenouil sauvage. Là-dessus, le Ca del Bosco d’Annamaria Clémenti 2013 qui fait le plus loyal concurrent de nos champagnes, côté Franciacorta, en Lombardie, élaboré en « méthode classique », avec du chardonnay, et le superbe Habemus San Giovenale du Latium 2011, mariant syrah, grenache, tempranillo, carignan, si charmeur, font des escortes de grande classe, choisies par le disert Marco Reitano, l’un des meilleurs sommeliers de la Botte.
On jette un oeil au magnificent chariot de fromages et on achève sur des douceurs légères : boule glacée coco, fruits exotiques, sphère glacée aux fruits rouges sur crème au thé et framboises cristallisées ou encore crème de ricotta au massepain, moelleux à la pistache et sorbet à l’orange confite. Sans négliger les infusions maison qui permettent de clore ces agapes de haute volée en fraîcheur. Vive le roi Beck !