7

40 tables pour rêver

Article du 18 avril 2011

Sortie cette semaine des « Plus belles tables de France » (chez Flammarion), signé de votre serviteur et du photographe Maurice Rougemont. Voici, pour les lecteurs de ce blog, en exclusivité, la préface.

Les plus belles tables de France

Soyons injustes : voici les quarante plus belles tables de France. Soyons chauvins et restrictifs : nulle part ailleurs, ni à New York, ni à Londres, ni à Tokyo, ni à Sydney, vous ne trouverez des tables plus splendides, des chefs plus créatifs, des mets plus savoureux, des odes à la tradition plus justes, des hymnes à l’art de vivre plus convaincants. Soyons précis : voilà non pas nos quarante tables préférées, mais bien celles qui nous offrent du rêve, de la légende et du mythe à tous les étages.

Forçons le trait : aller au restaurant pour découvrir un moment de rêve, ce n’est pas seulement céder aux plaisirs de l’assiette et du goût. Mais c’est entrer soi-même dans la légende, participer à une aventure, aller à la rencontre d’une idée, d’une famille, d’une histoire, d’un pays. Nos maisons parisiennes racontent elles-mêmes, fort souvent, un morceau de l’histoire gourmande de la capitale. Lasserre ne fut, après tout, qu’un petit pavillon de planches de l’exposition universelle, Ledoyen, une guinguette des Champs-Elysées, le Pré Catelan, un restaurant/casino du Bois de Boulogne, le Grand Véfour, un café sous les arcades du Palais Royal.

Certaines maisons sont d’ailleurs plus célèbres que les villes ou les bourgs qui les abritent. On connaît davantage Paul Bocuse que Collonges-au-Mont-d’Or, Troisgros que Roanne, l’Auberge de l’Ill des Haeberlin qu’Illhaeusern ou Georges Blanc que Vonnas. Certaines demeures changent de chefs, mais leur renom demeurent. Nous aimons et aimerons toujours les Templiers, royaume du gibier aux Bézards en Gâtinais, les Crayères, table d’élite rémoise au cœur de la Champagne, ou l’Huîtrière, la première maison marine de France, sise à Lille, rue des Chats-Bossus,  quel que soit le nom du maître queux en charge de ses fourneaux.

A l’inverse, il est ici des chefs créateurs dont le renom, la folie, la passion volent très au-dessus de l’histoire de leur maison. Régis Marcon a, pour ainsi dire, créé son domaine à St Bonnet le Froid, comme Michel Bras a établi le sien, avec bravoure et panache, sur les hauteurs de l’Aubrac près de Laguiole ou Michel Trama, non sans courage, en sa bastide agenaise de Puymirol. Pierre Gagnaire a transporté ses idées virevoltantes de St Etienne à Paris, avec le succès que l’on sait. Alain Passard a fait de l’Arpège, dans l’ancien Archestrate où il fit ses classes, sa demeure propre, avec un brio sans pareil.

Il y a aussi ces chefs mercenaires qui nous émeuvent et nous passionnent car ils ont donné à des palaces de renom un son autre. C’est le cas d’Alain Ducasse, cuisinier « gobe trotter », au Plaza Athénée ou au Louis XV, d’Eric Briffard, génie insolite sorti de sa boîte au George V, Yannick Alleno, qui réinvente la cuisine de Paris au Meurice, Eric Fréchon qui rameute l’Elysée et ses abords au Bristol.

Il y a enfin ces fidèles du terroir qui s’identifient si bien à leur lieu qu’on pensera forcément à eux en évoquant la tradition qui les a fait naître ou grandir. Ainsi, la Bourgogne selon Marc Meneau, Jean-Michel Lorain ou Patrick Bertron sous le sceau de Bernard Loiseau. Ainsi, le Lyonnais de la Mère Brazier, revisité par le jeune Matthieu Viannay, le Nord de Marc Meurin, l’Alsace du Crocodile, hier sous l’égide d’Emile Jung aujourd’hui sous celle de Philippe Bohrer. Sans omettre les Landes de Michel Guérard, la Provence selon Baumanière de Jean-André Charial, Gérald Passédat au Petit Nice si marseillais ou Jacques Chibois à la Bastide St Antoine grassoise dans les oliviers, comme les Dombes façon Alain Chapel, sous la signature de Philippe Jousse.

Il y aussi ceux que nous n’avons pas cités et qui semblent jouer « bande à part », même si, peu ou prou, nous pourrions les ranger dans l’une ou l’autre de ces catégories : Bernard Pacaud, le maestro solitaire de l’Ambroisie, la petite Anne-Sophie Pic, qui fait des prouesses à Valence la drômoise, Guy Savoy, qui est l’ami du genre humain, le cuisinier le plus subtil qui soit, à deux pas de la place de l’Etoile, ou encore Taillevent, club parisien s’il en est, la Tour d’Argent, mythe vivant et incarné, toujours debout, malgré la mode et ses diktats.

Et c’est bien ce qui nous guide ici : nous avons le cœur large, Maurice, mon compagnon de voyage de trente ans, l’œil averti, et moi-même, le gastronome impénitent. Nous aimons autant le merveilleux Arnsbourg des Klein à Baerenthal, dans le très secret pays de Bitche, que le très landais Carré des Feuillants d’Alain Dutournier, en lisière de la place Vendôme et des Tuileries. Mais ce sont bien quarante coups de projecteurs, avec les yeux comme avec le cœur, que nous avons voulus ici donner. Quarante maisons qui racontent la gourmandise française, d’aujourd’hui et de toujours. Quarante maisons qui nous font rêver et qui, nous l’espérons, vous passionneront à votre tour.

Venez, tournez les pages. Il est temps de vous mettre à table.

Les plus belles tables de France, chez Flammarion de Gilles Pudlowski & Maurice Rougemont

A propos de cet article

Publié le 18 avril 2011 par

40 tables pour rêver” : 7 avis

  • Bonjour,

    … et « merci » pour ce très joli ouvrage.

    Je connais un certain nombre de ces tables pour les avoir dégustées (Monsieur Paul, Georges Blanc, les Templiers, Marc Meurin, Anne Sophie Pic, Bernard Loiseau et Patrick Bertron, etc…), et je retrouve dans les textes et les photos de Gilles et Maurice les atmosphères, les sensations, les vibrations de ces très belles Maisons.

    OUI, prenez ce livre comme un recueil de Tables dans lequel vous pourrez puiser afin de vous restaurer au quotidien… ou comme moi, de réaliser des escapades gastronomiques extraordinaires !!!

    Bopnne lecture et bonnes dégustations,
    Bien cordialement,
    Phil

  • J.F SECOUER

    Bonjour il semblerais que les photos du livre sont faite avec un appareil jetable ou l’auteur du guide c’est mal entourer.

    Coml dab!!!!!!!!!!

  • Jean-Pierre

    M. Wallace, heureusement, dans l’hexagone il n’y a pas que les 2 ou 3 étoiles pour rêver, car chacun rêve selon ses moyens. Vos affirmations tiennent plus de la fable (c’est votre côté La Fontaine) que du fruit du vécu. Dans l’hexagone, il y surtout une myriade d’établissements qui n’ont pas ou ne courent pas après les distinctions suprêmes. Le site de Gilles Pudlowski et ses articles en sont un excellent exemple, avec plein d’adresses méconnues où il fait bon s’arrêter. Si vous alliez vraiment au restaurant, étoilé ou non, vous vous apercevriez que la gastronomie française n’est pas du tout en perdition. Pour cela, il faut aimer aller au restaurant, et non pas se contenter de suivre et d’amplifier comme un simple perroquet les racontars de ceux qui passent leur temps à vilipender la cuisine française pour faire et vendre du buzz. Au fait, puisque vous affirmez, sans preuves pour l’instant, que la cuisine française est médiocre voir immonde, auriez-vous le courage et l’honnêteté de me donner juste 4 ou 5 noms d’établissements, dates à l’appui, dans lesquels vous avez posé réellement et récemment votre séant et qui seraient médiocres, voire immondes? J’attends, et certainement pour longtemps.

  • Webmaster

    @wallace : je ne comprends pas très bien vos propos.. s’il est vrai que ce nouvel ouvrage met l’accent sur 40 tables d’exception, il existe, sans aucun doute, des centaines, si ce n’est des milliers de bonnes et belles tables dans toute la France qui déclinent nos terroirs avec talent.
    Et si aucune ne vous vient à l’esprit, sentez-vous libre de faire un tour dans les sections « coup de coeur » et « restaurants » de ce site pour en découvrir quelques unes.

    Cordialement,
    Michaël

  • wallace

     » à la recherche de la jouissance gourmande » dommage que toute France est résumé que à 40 tables (que pour les chanceux nantis) et le reste du territoire français a sombré dans une médiocrité de la cuisine ciseaux si ce n’est pas pire – la cuisine immonde

  • Jean-Pierre

    Et si la table de l’Auberge Bretonne du facétieux mais talentueux Jacques Thorel (bien que ces dernières années, le pire pouvait côtoyer le meilleur), fait partie de votre ouvrage, il en reste encore 39 pour rêver, Audrey et Benoît Gauchet ayant repris le flambeau du maître breton depuis le 10 novembre 2010.
    Mais je retiens surtout de cette présentation engageante son côté festif et plaisirs qui rend hommage à A B-S quand celui-ci déclarait dans sa méditation III de la gastronomie : « Les connaissances gastronomiques sont nécessaires à tous les hommes, puisqu’elles tendent à augmenter la somme de plaisir qui leur est destinée »; un concept que j’ai adopté depuis belle lurette quand je pars truffe au vent, en frétillant comme un goujon, à la recherche de la jouissance gourmande.

  • renemarc

    enfin un vrai livre destiné à un succès éditorial mérité..

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !