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Le Comptoir du Relais

« Les malices de Camdeborde (Paris 6e) »

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Article du 30 mars 2011

Un hommage à Yves Camdeborde, maestro du Comptoir du Relais, roi précurseur du « bistrot gastro », homme d’influence, Palois devenu parisien et un râleur généreux, avec ce portrait tiré des « Grandes Gueules et leurs recettes » (Glénat), illustré des photos de mon complice Maurice Rougemont.

Yves Camdeborde © Maurice Rougemont

Il est né en 1964 à Pau, où il apprit le métier à l’hôtel des Pyrénées. Il part se former au dur métier de chef des grosses brigades d’été à Saint-Tropez, aux Mouscardins, pile sur le port, sous les ordres de M. Lions, qui a alors  deux étoiles. Il monte à Paris, intègre la grosse équipe de Guy Legay au Ritz : 80 personnes, pas moins dont Christian Constant qui deviendra son maître et qu’il suivra au Crillon.

Il décide de quitter les ors et les lustres de la cuisine de palace, s’installe à son compte, avec l’aide de Christian C. Il crée la Régalade, autant dire une révolution, en 1992. Il y fait un tabac en offrant du bonheur pour une somme dérisoire (son menu à 120 F passera, in fine, à 30 €).  Le lieu est bruyant, genre rade parisien typique, avec banquettes, comptoirs, tables serrées. Les gens se précipitent, acceptent de manger vite, puis de laisser leur place.

Il y a, en plus du couple Camdeborde, trois personnes en salle et trois en cuisine. Le tout Paris gourmand y retrouve des fringales d’enfance et se régale de charcuteries servies sur la planche et venu de l’atelier du frère d’Yves, Philippe à Pau. Il y aussi l’emblématique boudin pomme Macaire, les chipirons à l’encre et le soufflé au Grand Marnier : trois plats qui ont fait l’histoire de la maison.

En cuisine © Maurice Rougemont

Tous ses copains du Crillon imitent Yves, après le départ de Constant, créant eux aussi des « bistrots gastros ». Il y a Thierry Faucher (l’Os à Moelle, dans le 15e), Eric Fréchon (la Verrière, dans le 20e, avant de revenir côté palace aux fourneaux du Bristol), Thierry Breton (Chez Michel dans le 10e, près des gares de l’Est et du Nord), Didier Varnier (le C’amelot dans le 11e), Pierre Jay (l’Ardoise dans le 1er), Sylvain Danière (l’Ourcine dans le 13e), Martin Etchebest (le Troquet dans le 15e), Stéphane Jégo (l’Ami Jean dans le 7e). Ce n’est pas un phénomène de mode, plutôt une vague générale qui envahit tout Paris.

En salle © Maurice Rougemont

Même s’ils ne sont pas du sud ouest, comme Jégo qui est breton et Fréchon normand, ces chefs bistrot « nouveau style » raffolent des plats de là bas, chantent la convivialité avec l’accent et la fraternité d’une équipe de rugby. « Pour bien faire la cuisine, il faut d’abord aimer les gens, glisse Camdeborde. On est une génération de cuisiniers qui trouvent normal d’aller en salle. On veut savoir à qui l’on fait à manger ». Une nouvelle manière de raconter, de recevoir, autant que de donner du bonheur ? C’est exactement ça.

Ce qu’Yves le débonnaire met en pratique dans son nouvel « outil de travail », le Comptoir du Relais. Il reprend en 2004 un vieil hôtel de charme, le Relais de l’Odéon, qu’il rénove et fleurit, transforme le café années 1920, qui vit autrefois passer la « génération perdue » chère à Gertrude Stein, entre papa Hemingway et Fitzgerald.  Il gère 42 employés, aussi bien à l’hôtel, qu’au restaurant ou à la crêperie voisine. Au Comptoir du Relais, le spectacle est permanent. Chaque midi, la queue est incessante, car on vient ici déjeuner sans pouvoir réserver : 200 couverts de midi à 18h, non-stop, 40 couverts le soir, avec une réservation faite un an à l’avance, la presse et le bouche à oreille s’en mêlant.

Yves Camdeborde © Maurice Rougemont

On goûte le pressé de cèpes au foie gras, l’œuf mayo, le poireau mimosa et vinaigrette, le pied de porc désossé (« le même qu’au Crillon, mais sans truffe et à la plaque ! ») avec sa belle purée, la joue de bœuf  ou le tablier de sapeur aux carottes en retrouvant les saveurs d’enfance. Les desserts, comme la crème brûlée au café, les gaufres, avec glace et chocolat ou encore la glace au rhum avec son baba bouchon, sont pareillement nostalgiques et savoureux. Mais le lieu est devenu un phénomène sans perdre sa nature. Yves râle, s’essouffle, tonitrue, mais sert tout le monde et fait même quelques sourires en salle.

Coeur de palmiers à l’avruga © Maurice Rougemont

Il lui arrive aussi de sortir, d’aller voir ses collègues qui démarrent. « Etre en cuisine toute la journée, ça rend dingue, il faut aussi aimer allez voir ce qui se passe dehors », glisse-t-il, ajoutant : « je suis un curieux né, je vais chez les collègues, pour voir ce qui se fait et comment c’est fait. Quand on a été formé au moule du Ritz ou du Crillon, on est forcément passionné par ce qui se trame ailleurs et vient d’ailleurs ».  Mais Yves aime aussi leur laisser la place aux autres.

J’en sais quelque chose. En 2005, alors qu’il recevait le trophée du bistrot gourmand de l’année, il refusait de se déplacer sur le thème de : « donnez le plutôt aux jeunes ». De même que le Michelin qui lui avait pourtant accordé son bib gourmand à la Régalade se voyait tancé sur l’air de : « le Michelin ? C’est pratique : je m’en sers pour caler une vieille armoire ».

Tablier de sapeur, carottes et châtaignes © Maurice Rougemont

Grande gueule, grand cœur, mauvais caractère, il récrimine, affirme tout faire (« y compris la plonge »). Mais reconnaît l’influence des guides (« c’est totalement indispensable pour se faire connaître, surtout quand on est dans un coin  paumé »). Ajoutant encore : « je suis un petit artisan, qui a les qualités de ses défauts. Je ne sais pas faire deux choses en même temps. Je suis admiratif d’Alain Ducasse qui parvient à être partout à la fois, parvenant à ce que tous les boulons soient parfaitement vissés. Mais je serai incapable de faire ça ».

Gaufres, glace, chocolat © Maurice Rougemont

Comme Joël Robuchon, en son temps, il affirme vouloir s’arrêter à 51 ans, trouver un lieu intime, servir dix couverts seulement. Et « travailler pour ceux que j’aime ». Chiche ? Il donne un conseil aux « jeunes » – lui qui influença toute une générations de chefs de talent créateurs de rades de haut goût: « faites ce que vous savez faire et surtout, faites ce qui vous ressemble et ce que vous avez sur le cœur ».

Le Comptoir du Relais

9, Carrefour de l'Odéon
Paris 6e
Tél. 01 44 27 07 97
Menus : 50 (dîn. sem.) €
Carte : 40-70 €
Fermeture hebdo. : Ouvert tous les jours
Métro(s) proche(s) : Odéon
Site: www.hotel-paris-relais-saint-germain.com

Le Comptoir du Relais” : 5 avis

  • Benoit

    C’est avec plaisir que nous sommes retournés hier midi au Comptoir !
    Un personnel au top , sympathique et efficace.
    Un entrée très réussie, œuf au plat, cèpes et jambon de porc noir, avec, original, une pointe de citron !
    Suivie par un suprême de volaille, fricassée de légumes verts et sauce à la sauge: cuisson parfaite, tendre et goûteuse
    Enfin pour finir, un paris Brest, caramel beurre salé : cherchez l’erreur….la mode du caramel beurre salé nous tue! Alors que le praliné était merveilleux, le voilà gâché par un coulis de caramel sur les choux. Dommage, sinon cela aurait été parfait.
    Un verre de crozes ermitage bien gras comme je les aime…
    Je reviendrai

  • JPG

    Quelle excellente adresse. Il faut arriver tot si vous ne souhaitez pas attendre debout dans la rue pendant 45 minutes (minimum). Une salles garnie d’étrangers bien renseignés et adeptes des diners dès 19h sont attablées et l’étroitesse du lieu rendent l’ambiance festive, riant et un soupçopn trop bruyante. L’écrin est définitivement trop étroit pour le talent de Mr Candeborde!! Le service est parfait: efficace, rapide et souriant. Les plats, qui sont montés de façon incessante par un « emplyé-athléthe » qui doit gravir pas moins de 250 fois les 15 marches qui séparent la cuisine du sous-sol de la salle de restaurant !( et cela sert à quoi que nos ailleux aient inventé le passe-plat ! 😉 ), arrivent chaud et très bien présentés ! Bon venons en à l’assiette :une vrai bonne surprise ! La charcuterie du frère, un oeuf mayo tout simple, des pieds de cochons croustillants et gélatineux à la fois, un carré d’agneau parfaitement cuit et bien parfumé au thym et baignant dans des haricots blancs, un peu de fromage, et en dessert une soupe de maïs glaçée au gout et saveur incroyable ou encore des billes de pommes sur un lit de lait caillé…un vrai moment de plaisir gustatif. Une régalade ! A recommander très chaudement. Je ne comprends pas pourquoi l’exellent Blog de Mr G. Pudlowski n’accorde pas un coeur et une fourchette à cette adresse ! Un oubli ?

  • Al

    J’y ai dîné avec ma mère en été. Excellent carpaccio de tête de veau, sublime boeuf aux coquillettes, les meilleures pâtes de ma vie (et pourtant j’ai déja été dans pas mal de restaurants italiens). L’addition était assez douce. Nous avions dû attendre quelque temps pour obtenir la table cependant (la formule étant victime de son succés j’imagine). Serveur très agréable et très aimable. Pour moi a refaire sans hésiter et une adresse a recommander. Cependant n’y allez pas si vous faites un régime, entrée+plat+dessert c’est presque trop si vous n’êtes pas un gros mangeur/se.

  • colleau

    Bonjour Monsieur Camdeborde
    Je ne comprends pas que vous soyez aussi strict avec les candidats sur la présentation de leurs mets alors que dans votre restaurant certes les produits sont excellents mais la présentation est quasi nulle. Donc je ne comprends pas cet acharnement. Je préfère et de loin une présentation moins raffinée mais pouvoir trouver toutes les saveurs du plat dans mon assiette.

  • NOEL CORIANDRE

    Le Comptoir du Relais, fait brasserie, le soir, durant l’été.
    Excellente poitrine de veau tandoori accompagnée de délicieux haricots tarbais. Le Bandol rosé, entre la vigne et le néant, est servi tiédasse. Comme les SOS n’intéressent personne, il faut se lever pour obtenir le seau à glaces providentiel. Le service, dépassé, mi-figue, mi-raisin a un petit côté « je suis quand même au dessus du tout venant d’une brasserie ».
    J’oubliai de préciser que le maître de maison, pape de la bistronomie et chouchou de la critique, est aussi, désormais, un des héros de la téléréalité culinaire sauce TF1.
    Alors, master chef, la télé c’est bien mais une attention un peu plus vive au dîneur, c’est encore mieux.

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