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Au Pont du Corbeau

« Strasbourg: Pont Corbeau, le dernier des Mohicans ! »

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Article du 8 mars 2011

Christophe et ses mets © GP

Me voilà de retour au beau pays d’Alsace et de quelle manière! Dans un endroit sur lequel le temps n’a guère de prise. Imaginé il y a plus de trois décennies par Christophe Andt – c’était jadis le Beau Rivage, une table, avec chambres, de petite réputation et bien oubliée-, qu’on croit être là depuis un siècle. Il y a l’ambiance de stub comme avec splendides boiseries façon Renaissance, son plafond à caissons, avec fresques, imaginées, non sans génie, par un duo insolite, Edgar Mahler, l’homme des belles façades néo-gothiques, et Raymond-Emile Waydelich, le papa artiste de Lydia Jacob, l’archéologue du futur. Christophe, natif de Brumath, éduqué, en salle et en cuisine à l’Ecrevisse, maison reine de sa cité natale, puis passé au Soleil à la Wantzenau, a créé là la plus authentique des winstubs « comme avant ».

Presskopf et salade de choucroute © GP

Aujourd’hui, donc, si le lieu paraît antédiluvien, avec son ambiance chaleureuse, ses tablées serrées et joyeuses, ses nappes en kelsch couvertes de papier blanc, sa carte des vins incroyable, digne d’un grand restaurant, sa théorie de jolis sylvaners, de francs rieslings, de gouleyant pinots blancs, de beaux pinots noirs, mais pas seulement, avec ses clins d’oeil côté Bourgogne, Bordelais, vallée du Rhône ou Languedoc, on se dit qu’elle joue jeu à part. Une winstub avec une carte des vins? Et pourquoi pas! Même si au départ, le genre existait pour que le négociant du vignoble vienne se débarrasser du surplus de sa production et nourrir le chaland de hasard de quelques plats de terroir.

Mais, on le sait, la winstub a évolué. Les trois stars du triangle d’Or (Yvonne dans la demeure qui porte toujours son prénom, Robert au Saint Sépulcre, Christine au Clou) ont pris leur retraite, passé la main, et les choses continuent sans eux. Christophe, qui était « le petit jeune » de l’époque, est devenu, à 56 ans, le doyen du genre à l’ancienne si l’on peut dire. Ou encore le dernier des Mohicans. La carte est en deux temps. Il y a les mets de toujours et ceux du jour. Mais, que les intégristes de la winstub se rassurent (je pense aux lecteurs de Robert Werner et de son classique et délicieux « Je suis une Winstub » , la Nuée Bleue, 1996) : tout ici est alsacien, purement régional, bref solidement pur cru.

La tête de veau © GP

Bref, et pardonnez-moi si je m’épanche un peu, mais le jeu en vaut la chandelle et le lieu mérite une exégèse: si vous avez des amis d’ailleurs à qui faire découvrir l’Alsace, à travers Strasbourg, son coeur historique, son ambiance de toujours, sa gourmandise, ses rites, ses tics, ses amours éternelles, ses belles fringales, même tardives (Christophe sert et accueille jusque 23h), c’est, bien sûr, là qu’il faut les emmener en priorité. Il y a le décor, les jours d’ouverture bien pratiques (c’est notamment ouvert, eh oui, le dimanche soir et le lundi, c’est rare!), l’environnement, avec le musée alsacien voisin, l’Ancienne Douane, les quais de l’Ill, le musée historique juste en face, plus la cathédrale et la place Gutenberg, avec son précieux parking à proximité. Mais voilà que je m’emballe, vous vante le lieu et omet de vous parler de ce qu’on y sert.

Le bibeleskäs © GP

C’est qu’on va y venir. Il y a les rituels presskopf de cochon à l’ancienne avec sa vinaigrette plus une jolie salade de choucroute, la salade mixte, cervelas/gruyère, les filets de harengs Matjes, pommes à l’huile, la quiche au jambon, la fondante tarte à l’oignon, puis, côté mets solides, généreux et sûrs, servis dans leur plat en abondance, la rituelle tête de veau, l’une des meilleures de la ville, fraîche, rôtie à point, avec ses morceaux de langue, sa vinaigrette, ses pommes sautées, ou encore le boudin noir aux oignons, la choucroute garnie aux pommes vapeur, le pavé de saumon sur choucroute au beurre blanc et le bibeleskäse aux herbes fines. J’en oublie? Mais bien sûr, la carte, chez Christophe Andt, relève de l’anthologie alsacienne façon terroir.

Poires au vin, gâteau de semoule, glace caramel © GP

Et les desserts n’oublient pas d’être gourmands. Il y a le délicat sorbet quetsches arrosé d’eau de vie du même fruit emblématique de l’Alsace éternelle ou encore cette jolie composition aussi digeste sur le thème de la poire au vin avec gâteau de semoule et glace caramel: superbes! On a bu un pinot blanc en pichet de chez Marc Anstoltz à Balbronn. Et voilà qu’on se remet à parler alsacien à toute la compagnie. « Salut bisamme! », comme dirait l’ami Werner. Tiens, on reconnaît là au fond de la salle Thérèse Willer qui anima jadis l’Arsenal au temps du bien aimé Tony Schneider et qui est présentement conservatrice du musée Tomi Ungerer. C’est un signe. Un dessin de Tomi trône au mur non loin d’autres en clin d’oeil de Claude Fuchs. Voilà, ce Pont du Corbeau, toujours jeune et seulement trentenaire, mérite une revisite appliquée. Il semble dire à tous, simplement: bienvenue à Strasbourg!

Au Pont du Corbeau

21, quai Saint Nicolas
67000 Strasbourg
Tél. 03 88 35 60 68
Menus : 12,50 (déj.) €
Carte : 35 €
Fermeture hebdo. : Samedi (sauf décembre), dimanche midi
Fermeture annuelle : Vacances de février, août

A propos de cet article

Publié le 8 mars 2011 par

Au Pont du Corbeau” : 5 avis

  • dee

    Une excellente adresse. Un super accueil. De très bons plats et Si la carte des vins vous deroute un peu, ne pas hesiter a demander au patron ! Une adresse que je recommande vivement.

  • CAPLIER Francis

    Article très intéressant et vraiment de très bonnes adresses

  • grimmelpont jean louis

    Un dîner puis un déjeuner le lendemain midi…dommage,on ne restait que deux jours ! accueil et sourires; délicatesse et justesse des saveurs ; rognons de veau très justement cuits et « grosse pièce de cochon  » rose et fondante ; beau Pinot noir plein de fruit de J.M Dreyer.
    Mille mercis mesdames et monsieur DU CORBEAU . jean louis

  • Bastien

    Nous sommes passes vendredi à sept sans avoir retenu! Nous avons été accueilli avec beaucoup de gentillesse,et quel bonheur!Ce fut un dîner super délicieux, arrosé de très bon vin.
    merci Monsieur,nos papilles chantent encore les merveilleux parfums des mets et du vin.
    il faut absolument y aller
    Mireille

  • Flex

    hello Gilles !

    tiens, un article sur une adresse Strasbourgeoise… il était temps 😉
    je vais tester d’urgence! Mais qu’est ce qu’un Alsacien va chercher dans une Winstub ou un bistrot à cuisine locale ? pour moi c’est simple, je vais y manger ce que je ne cuisine pas chez moi ! Soit parce que, à cuisiner pour 2 c’est trop de boulot, ou que ça nécessite du matériel que je n’ai pas, ou simplement que je ne sais pas faire !
    à quand une nouvelle mouture de nos Winstub’s ?
    ps: il y a encore de bonnes petites adresses (qui ne sont pas des pièges à touriste) qui sont ouvertes dimanche et lundi: au Tonnelet rue des Moulins !

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !

Au Pont du Corbeau