F-O Giesbert (juste derrière Gilles Mutel au service) © GP

Sur la photo, juste derrière FOG, il est le monsieur qui sert les verres, verse les précieux liquides, qu’il a choisi avec une ferveur rare et attentionnée. Ce jour-là, après le champagne blanc de blanc (j’avoue avoir oublié la provenance exacte, c’était en 2013…), on aura bu ensemble le riesling vieilles vignes 2010 de Pierre-Henri Ginglinger et le corbières « Ni Dieu Ni Maître » de Castelmaure, issu de grenache, cinsault, syrah, si séducteur, tous deux sélectionnés avec un art consommé par Gilles Mutel pour accompagner les mets raffinés de son épouse Françoise. Chaque année, ses choix de vins ressemblaient à des choix de vie, comme des prouesses. Pour le repas de prestige du « Livre sur la Place » à Nancy, organisé par le Point avec la municipalité de la ville, les Académiciens français et Goncourt, les grands éditeurs, durant cette belle fête littéraire, à la fois populaire et mondaine, Gilles témoignait de son savoir-faire. Celui dont il avait fait montre, déjà, plus de vingt ans auparavant au Ban des Vendanges, toujours en compagnie de Françoise. Alors, ce n’était qu’un bar à vins, mais si gourmand, que tout Nancy, toute la Lorraine gourmande en avait fait un QG d’élite. Depuis les Mutel étaient devenus les étoilés de charme de leur ville, à l’enseigne de la Maison dans le Parc, à deux pas de la place Stanislas et de l’Opéra local, dans une sorte de demeure bourgeoise de grand style, revue sobre, contemporaine et feutrée dans les tons taupe par le décorateur local, Dominique Babigeon. Lui, venu du travail temporaire mais passionné de vin tout azimuts, elle, issu du prêt porter, mais stagiaire chez les grands comme Alain Passard, étaient devenus les aubergistes séducteurs de leur ville. La maison continue sans Gilles, disparu hier, après une longue maladie, et le Livre sur la Place débute dans dix jours à Nancy, avec ses écrivains venus de toute la France. Mais sans lui, l’ambiance ne sera plus la même.