Jean-Claude Ribaut, on le connaît de longue main: c’est cet architecte dévoyé en gourmandise par la magie d’une série de jolis repas chez le maître Jacques Manière au Pactole puis au Dodin-Bouffant. Il tint deux décennies durant la chronique gastronomique au Monde, succédant à Robert Courtine alias la Reynière. Et ce n’est guère perfide que lui faire remarquer que son nouveau livre – somme de ses balades savoureuses dans Paris – fait songer à la manière de ce dernier – qu’il ne cite pourtant pas dans sa bibliographie- , mêlant, d’agréable façon, balade géographique, randonnée culturelle et guide non dit. Il y a là le souci de tout raconter, de n’oublier personne, de louanger Ducasse, Rostang, Dutournier ou Savoy avec science, de rendre hommage à Raquel Carena au Baratin de la rue Jouye Rouve sans omettre Yannick Alléno et son « Terroir Parisien », dont Ribaut fut le transcripteur précis et fin. Féru de gourmandise autant que de culture éclectique, JCR puise aux meilleures sources d’un genre usité depuis Grimod ou Curnonsky. Il cite Proust, Fargue, narre la saga des bistrots comme celle des maisons de plaisir, évoque les vogues nouvelles moléculaires, sent, avec précision, revenir le balancier de la tradition. Autant dire que rien ne lui échappe. Même si, ça et là, de petites erreurs se sont glissées sous sa plume fertile. Les Nouyrigat de Pierre au Palais Royal sont devenus Nourrigat (p. 47) et Marc Marchand du Meurice est devenu, par deux fois, Maurice Marchand (p. 72). C’est, me direz-vous, de peu d’importance. Prouvant au moins qu’on l’a lu. Gastronomade patenté et bavard talentueux, Jean-Claude Ribaut qui sait lire – et peut sans doute mieux se relire – donne surtout envie de redécouvrir la capitale d’un oeil gourmand, furtif, joliment aiguisé.

Voyage d’un gourmet à Paris, de Jean-Claude Ribaut (Calmann-Lévy, 300 pages, 19 €).