Le Cerf
« Cossonay: le voilà Crisci! »
Il est depuis trente ans le créateur zélé, un peu fou, si vif, si frais, des parages de Lausanne, le Veyrat helvète, jouant avec les herbes choisies avec son ami François Couplan, le mariage de la terre avec la mer, du végétal, du minéral et du fruité. Le coquelicot, la berce, la benoîte urbaine, le tussilage ou le lierre terrestre lui inspirent des compositions choisies, servies dans le cadre d’une taverne médiévale avec ses voûtes, revue chic et contemporaine. Lui? Carlo Crisci, artiste échevelé, technicien de haute volée, né en Suisse, de parents venus de Campanie, sachant jouer de l’huile d’olive avec une inspiration virtuose.
Ses menus? Des symphonies. Ses plats? Des poèmes. Ainsi les couteaux au lard d’Arnad, la mozzarella mariée avec la figue, la julienne de seiche au consommé thaï, la lasagne de pétoncle (le coquillage lui-même traité en pâte) au jus de mélilot et aux champignons des bois, le croustillant de grosse langoustine d’Afrique du Sud en marinade de vernis avec sa transparence de petits pois et ses senteurs de berce, le foie gras de canard cuit à la broche et parfumé au café, demeuré si juteux, comme le dos de lotte à peine cuite, roulé dans le quinoa, avec son jus de betterave rouge et sa carotte sauvage: jolis à voir, si colorés, autant que savoureux à déguster.
Les saveurs sont justes, le geste sûr, les jus légers. Bref, rien ici ne pèse, s’accordant avec les vins exquis de la nouvelle Helvétie en devenir, chasselas de Neufchâtel du domaine Saint Sébaste ou superbe gamay les Romaines des frères Dutruy. Et, in fine, le fin soufflé mangue-citronnelle en nage de thym, le sorbet liquide avec chasselas et sureau ou la pêche moelleuse revue façon Melba, avec meringue et glace « impératoire » font des moments de fraîcheur à déguster comme des élixirs de jouvence.