Hommage à Muriel Barbery

Article du 18 octobre 2010

Je viens d’achever, avec quatre ans de retard – mais tout arrive à point nommé -,  l’Elégance du Hérisson, épaté par cette concierge cultivée qui adore Ozu, le cinéaste japonais, qui porte le même nom que son nouveau locataire du 7, rue de Grenelle, et la petite Paloma, surdouée, qui a réponse à (presque) tout. Et, je viens de me rappeler que son premier livre, une Gourmandise, racontait la fin d’un critique gastronomique, le plus grand de tous, en quête de l’ultime saveur. Je viens de retrouver juste pour vous ma chronique parue dans le Point dans le Point sur ce livre. C’était en 2000. Il y a dix ans déjà et les prix étaient en francs…


Un premier roman gastronomico-scientifico-littéraire pour rire ? Pas vraiment. Quand le Grimod de la Reynière des temps modernes, le Brillat-Savarin de la fin de siècle, le Vatel de la chronique, l’arbitre de nos élégances culinaires se meurt, l’on s’émeut : quel dernier plat lui préparer ? Lui se souvient de ses émois d’enfance. Une sardine grillée, un légume du potager, un magique sushi ou de bêtes chouquettes sous plastique, le cuit et le cru, la galinette ou la poulette ? Muriel Barbery, qui signe ici une jolie oeuvrette entre en litres et ratures, s’amuse, recopie la carte de Pierre Gagnaire, le plus savant de nos grands chefs, joue avec les mots et les mets, convoque le chœur des soupirants, des courtisans, des plaideurs. On s’étonne, tout de même, que le dit critique ne laisse autant de lui que soupirs et cendres, pleutres souvenirs, vagues émotions, larmes profondes et souveraines déchirures. Une maîtresse délaissée, une épouse maltraitée, des enfants endoloris et, tout de même, une femme de ménage admirative. C’est caricatural à l’envi, quoique brillamment écrit. En forme d’exercice de stèle, ce premier ouvrage ne manque pas de piquant. A défaut d’être plaisamment gourmand, il est joliment troussé, finement ciselé, patiemment doré, au four et sans chipotage inutile.

Une Gourmandise, de Muriel Barbery (Gallimard, 146 Pages, 82 F).


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Publié le 18 octobre 2010 par

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