Fortaleza do Guincho

Terrasse d’une suite © GP

Rien, sinon, la mer, le sable et le vent. Le lieu s’appelle Guincho : une plage, de la roche, des embruns. L’automne y est tardif, l’hiver doux, le printemps précoce. On y pratique surf, voile, ski nautique toute l’année. Le paysage y est aride, solitaire, presqu’ingrat. Et la grand’ville à deux pas. Lisbonne ? Comme une sentinelle ou un phare. Les deux cités proches, fausses jumelles, vraies voisines, se nomment Cascais et l’Estoril. Les analogies sont faciles. On songe à l’opposition Deauville-Trouville, Biarritz-Saint-Jean de Luz. L’une plus aristocratique: c’est l’Estoril. L’autre, plus populaire dévolue jadis aux pêcheurs : Cascais. Mais Sintra, ses parcs délicieux, comme ses palais seigneuriaux comme des folies néo renaissances, sont la porte à côté.

Vincent Farges et le service

La Fortaleza? Imaginez une kasbah baroque sur son promontoire face à la mer, ses  salons douillets, son patio mauresque, ses chambres au luxe sage avec son mobilier fait en sur mesure à Macao, son calme enchanteur: on croit s’être trompé de planète. Et puis non: le lieu existe, qui aussi est une très bonne table, sous la houlette du lyonnais de Rilleux-la-Pape, formé à Chamalières, Vincent Fages, supervisée de près par Antoine Westermann qui joue ici le rôle de grand manitou conseilleur. L’émietté de tourteau parfumé au yuzu avec sa fine gelée et ses petits légumes marinés à l’écorce de citron, le merlu poêlé à l’huile d’olive avec son jus vert à la coriandre ou le bar de ligne cuit à la vapeur aux algues font comme une ode savoureuse et légère à la mer, qui frappe de toutes ses vagues, contre les vitres et se rappelle au voyageur, en majesté.

Tourteau © GP

Merlu © GP

Chevreuil © GP

Biscuit à l’orange © GP

Il y a encore la noisette de chevreuil poêlée avec sa purée de courge Butternut aux cinq épices, ses fruits d’automne, ses splendides girolles persillée, sa sauce légère, juste relevée de poivre de Tasmanie, qu vous ramène en Alsace comme au temps du grand Antoine au Buerehiesel strasbourgeois. Sans omettre le service classieux, les jolis vins d’ici et là (blanc 10 Tiara de Niepoort dans le Douro, rouge Crasto supérieur de la même région dédiée au porto ou encore madeire Boal de Barbeito). On n’oublie pas, in fine, la petite touche exotique du biscuit à l’orange avec sa mousse de mandarine et son émulsion parfumée au cédrat « Main de Bouddah » plus une bien jolie crème glacée au combawa. On est ailleurs, à fleur d’océan, quelque part près du Cabo de la Roca, le point le plus occidental d’Europe, là où le vieux continent finit, là où il commence.

Vue d’une terrasse © GP