Une promenade dans l’île St Louis avec Frédéric

Article du 11 février 2012

Jours inquiets dans l’île Saint-Louis, de Frédéric VitouxFrédéric Vitoux ? On l’aime bien pour sa manière légère de parler de l’Italie, de l’Ile Saint-Louis, de Céline, des chats, des stars comme des obscurs du cinéma. Quand il rassemble en une seule histoire (presque) toutes ses obsessions, c’est le bonheur sans ombre qui nous est promis, le temps de quelques heures de lecture exquise.

Lui qui nous avait promené dans sa douce île, imaginant ses habitants revendiquant leur indépendance comme, jadis, ceux de Venise (Sérénissime, Seuil, 1990), réalise la prouesse de nous offrir en tous les secrets en un seul roman un peu policier, beaucoup policé, en tout cas très littéraire, avec pas mal de clins d’œil à l’âge d’or du cinéma, de Robert Bresson à My Fair Laidy en passant par Diamants sur Canapé.

S’il est assez peu question ici de l’Italie et fort peu des chats, Céline, dont Vitoux fut le zélé biographe, y occupe une jolie place détournée. Résumons l’ouvrage en quelques traits : Charles, un avocat vieillissant, solitaire et fatigué, voit sa vie tranquille au cœur de l’île St Louis bouleversée par l’intrusion de la jolie Dorothy, qui ressemble beaucoup à Audrey Hepburn incarnant l’exquise Holly Golightly chère à Truman Capote (et à « Breakfast at Tiffany’s »). Mais aussi par les inquiétantes allers et venues d’un éditeur/écrivain sur le retour Jean Lefaur, qui lui réclame de l’aide, l’argent, avant de lui voler un exemplaire rare de « Mort à Crédit ». Mais on en déjà trop dit…

Il y a aussi deux agressions dont l’une mortelle sur le pavé de l’île, un jeune garagiste polonais timide, séducteur malgré lui, des habitants doux rêveurs, une vieille dame charmante, plus une librairie, des commerces de bouche (Berthillon, la Boulangerie Martin, le Boucher Gardil) et des tables avenantes (l’Escale, Mon Vieil Ami) qui donnent fortement envie au lecteur de planter sa tente quelque part entre le quai d’Anjou et le quai Bourbon.

Bref, Vitoux charme, raconte, disserte de l’air du temps, évoque les grèves du moment ou l’affaire Bettencourt tout en s’en moquant, nous promène, nous intrigue et nous séduit en nous menant par le bout du nez.

On finira par tout comprendre des crimes de l’île, et l’on en saisira mieux le goût profond, ses manies, ses habitudes. Lorsqu’il quitte son quai et sa demeure, Charles, son héros, franchit le pas vers « le continent ». Mais c’est pour mieux nous donner envie d’y revenir. Comme nous invite ce roman délicieux et rêveur.

Jours inquiets dans l’île Saint-Louis, de Frédéric Vitoux (Fayard, 298 pages, 19,50 €).

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Publié le 11 février 2012 par

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