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Quand Régine balance… avec bonheur

Article du 20 juillet 2010

Au moins, on ne m’accusera pas de flagornerie: du temps de son époque gastronomico-étoilée chez Ledoyen, avec le conseil de Jacques Maximin et la complicité aux fourneaux du disciple de ce dernier Philippe Dorange, elle m’avait fait un procès (qui s’est, bien sûr, retourné contre elle…). Mais c’est une vieille histoire (j’avais critiqué la cuisine, le décor – « du plus pur mauve égout« , avais-je écrit, ce qui était, je le concède volontiers, bien provocateur).

Bref, Régine m’avait apporté la gloire (« la justice reconnaît la critique gastronomique« , avait titré le Figaro dans ses pages communication). Et son attachée de presse d’alors, Yanou Collart, vieille gloire de la profession, mais qui avait bêtement témoigné contre moi au procès, en avait perdu pas mal de son aura.

Ce préliminaire pour louer sans mesure le livre qu’elle, la grande Régine (alias la grande Zoa) publie avec bonheur. Cela s’appelle, tout simplement, « A toi Lionel mon fils ». Et c’est une déclaration d’amour doublée d’une confession. Son fils, c’était Lionel Rotcage, journaliste passionné, qui collabora à Rolling Stone, au Nouvel Obs, à Libé, créa Challenge, dirigea l’hôtel Romora Bay aux Bahamas, se rendit célèbre en refusant d’éteindre sa cigarette sur un vol d’American Airlines. Régine, mère vibrante, le défend avec fougue, s’explique par-delà la mort, relatant sa propre carrière, réglant ses comptes, renouant les fils de sa vie. Et, ô miracle, on l’écoute bouche bée.

Lorsque qu’elle parle de Claude, premier homme de sa vie, raflé tout jeune, à Lyon, par les nazis, lorsqu’elle évoque sa carrière de chanteuse (sur des paroles de Gainsbourg), comédienne (avec Berri ou Zidi), animatrice de discothèques à succès, rassembleuse de la Jet Set, lanceuse de petits génies en herbe, elle convainc avec émotion, sans forcer le ton, ni la voix.

Au passage, Régine en profite pour « balancer » ceux dont elle a propulsé la carrière et qui l’ont oubliée. Comme Drucker, le petit Michel, inconnu au bataillon des stars, qui ne lui a jamais consacré de « Vivement dimanche ! ». Ou Julio Iglésias, qui s’est fait opérer avec elle et finit par lui tourner le dos. Mais elle sait rendre hommage à ses amis fidèles, à sa copine Sagan, qui la baptisa « reine noire de nos nuits blanches ». A Aznavour, son « premier tuteur » en chanson, à Claude Perdriel, à Jacques Chazot. A tous ceux-là, Régine, qui « a de la mémoire pour dix », sait rendre hommage.

De St Tropez à Miami, de New-York à Marrakech, elle conte à sa manière vive, joue le grand jeu de la franchise, fait revivre sa « Ferme Célébrités », n’hésitant pas, à plus de 80 ans, à se donner en pâture à ceux qui la contestent.

Difficile alors de ne pas l’aimer, grande gueule, forte tête, généreuse, courageuse, casse-cou. Cette lettre à son fils est d’abord une dette payée à elle-même. Chère Régine, même si tu ne me parles plus depuis vingt ans, sache que je t’embrasse!

« A toi Lionel, mon fils … », de Régine Zylberberg (Flammarion, 312 pages, 20 €).

A propos de cet article

Publié le 20 juillet 2010 par

Quand Régine balance… avec bonheur” : 1 avis

  • BENICHOU Marcel

    Je viens de terminer votre dernier livre « A toi LIONEL mon fils » la fin est émouvante au possible ! Je l’ai lu en quatre soirées !
    J’écris les MEMOIRES de ma famille SEFARADE d’ORAN! Je suis à PARIS depuis1935 ! en 1942 j’ai fait partie des enfants cachés dans l’Allier à BROÛT VERNET grâce à l’O.S.E ! Au travers votre livre, j’ai revécu avec beaucoup d’émotion et de nostalgie certains lieux à PARIS et en France et les nombreuses personnalités évoquées dont j’ai connu un peu le parcours! Orphelin dans les années 1940, heureusement, j’avais 7 sœurs et frères! Mon beau- frère était Jean DURKHEIM, spécialiste des spectacles dans le journalisme! Pour conclure, votre livre, pour de nombreuses raisons, je l’ai trouvé vraiment admirable de sincérité et de sensibilité et ce dialogue avec LIONEL, votre fils trop tôt disparu m’a ému aux larmes! Je suis
    père de deux fils et papy de huit petits enfants ! Comme je partage et comprend ce que vous ressentez; ma grande émotion en fermant votre livre, ne m’a pas étonné ! BRAVO pour ce texte qui vous a certainement demandé beaucoup de courage, mais aussi une grande lucidité!
    Avec mon affection, recevez, chère GRANDE DAME, toute ma considération et mon profond respect ! Marcel (84 ans en novembre prochain) « dit le PARISIEN d’ORAN  » sous titre de mes
    écrits! le titre est « DEUX siècles de l’histoire originale d’une famille Séfarade » -écriture privée-

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