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Les mystères de la rue Férou

Article du 4 mars 2021

Une mince ruelle qui fait le joint entre la place Saint-Sulpice et la rue de Vaugirard vers le jardin Luxembourg, quelques maisons, quelques numéros et de grands artistes, des écrivains, des éditeurs et une mine de souvenirs: Lydia Flem raconte sa rue Férou, où l’on trouve la trace des Trois Mousquetaires et la résidence d’Athos, la présence de Madame de Lafayette, de Michel Déon à ses débuts, en grand flirt avec la jeune Françoise Sagan, de Man Ray (son meilleur morceau) et de tant d’autres. Photographe, écrivain, psychanalyste, Lydia Flem ausculte sa rue et son petit monde, se coule dans les vies de ses personnages, mêle ses souvenirs et quelques jolies recettes (comme le strudel au pavot de sa grand-mère), raconte les histoires en train de se faire et l’édition qui tient ici ses quartiers, entre Plon, voisin de la rue Garancière, et Belin qui eut pignon ici même.

Atget, photographe précurseur, ou Mahé de la Bourdonné, grand voyageur, qui possède là son hôtel, Henri de Jouvenel, le beau-fils de Colette, qui lui inspira « Chéri », à qui un bout de la dite rue fut offert, Prévert, poète buissonnier et éclectique, et Mlle de Luzy, comédienne du Français, appartiennent aussi à cette ruelle des rêves. Comme Georges Pérec, qui entreprit non loin, au Café de la Mairie, la tentative d’épuisement d’un lieu parisien, Lydia Flem prend son temps et délaye son propos.

500 pages, c’est sans doute beaucoup, voire trop. Mais elle l’avoue en liminaire: « une rue, dix maisons, cent romans« . Voilà son propos, son défi. Réussi. On la suit à la paresseuse. Sachant qu’en bonne analyste des âmes, elle s’interroge sur la notion de demeure, de « chez soi ». Grâce à elle, on ne verra plus la rue Férou, ni la place Saint-Sulpice, ni Saint-Germain-des-Près, son berceau, de la même manière.

Paris Fantasme de Lydia Flem (Seuil, 512 pages, 24 €.)

A propos de cet article

Publié le 4 mars 2021 par

Les mystères de la rue Férou” : 3 avis

  • Kneusé

    Bonjour, en faisant des recherches sur le livre de Lydia Flem je suis tombé sur votre blog. Malgré les visages masqués d’aujourd’hui où l’on ne sait plus très bien qui est qui, quelque chose me dit que nous nous sommes croisés hier à la sortie du jardin du Luxembourg. Il y a comme ça des rencontres impromptues et bien sympathiques. Merci pour cette visite guidée et improvisée de la rue Ferou qui donne envie de lire le livre de Lydia Flen. Bonne journée à vous. Gilles Kneusé

  • Vous avez raison. Cela fait plaisir d’avoir de bons lecteurs! Merci et bon week-end.

  • Éric Le Guen

    Il me semble que c’est Athos et non Porthos qu’Alexandre Dumas fait loger rue Ferou ?

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