Les élucubrations d’Edouard Baer

Article du 28 février 2021

On connaissait celles d’Antoine, le chanteur. Voici celles d’Edouard Baer, le comédien, tirées de sa pièce jouée, sans mauvais jeu de mots, au Théâtre Antoine, en 2019, préfacées avec d’un mélange d’emphase, de modestie, d’outrance, d’humour potache et de clins d’oeil appuyés par l’auteur soi-même, additionné de jolis dessins de Stéphane Manuel. Le texte? Un homme arrive sur une scène, tente de s’échapper sans cesse, de se cacher derrière les autres, de se fuir lui-même, rendant hommage à quelques auteurs illustres qui usent de la vertu des mots pour combattre le vide qui est peut être celui de la mort. Ainsi André Malraux – dont le mythique discours pour le transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon est largement reproduit -, Thomas Bernhard, Charles Bukowski, Albert Camus (celui de « la Chute », son magnifique monologue sur une femme se noyant à Amsterdam que le héros ne peut sauver), Romain Gary et Boris Vian (celui de « Je voudrais pas crever »). Un mystérieux régisseur lui répond de temps à autre, lui faisant office de choeur unique et singulier. Mais on sent bien la voix grave, musicale, cadencée d’Edouard Baer, s’insinuer entre les lignes, à peine cachée, derrière son personnage. Cela se lit vite, désarçonne, remue, puis se reprend avec douceur, lenteur, amitié, complicité. Le personnage – l’a-t-on dit? – s’appelle Edouard. Voilà un petit livre qui, mine de rien, joue, déjà, l’ouvrage de chevet, le bréviaire amical, le carnet dérobé.

Les élucubrations d’un homme soudain frappé par la grâce d’Edouard Baer, dessins de Stéphane Manuel (Seuil, 146 pagesdé, 16 €).

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Publié le 28 février 2021 par

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