La Table du Connétable à l'Auberge du Jeu de Paume
« Chantilly : l’avènement d’Anthony Denon »
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Il ne travaille plus au service des autres, signe ses propres cartes, lui qui suivit la trajectoire de Jean-François Piège au Crillon, œuvra pour Alain Ducasse chez Rech, après le Plaza Athénée, au Louis XV, au Meurice, époque Christophe Saintagne, qu’il suivit d’ailleurs chez Papillon, trace son propre chemin. Anthony Denon, guadeloupéen d’origine, dont le père travailla en brasserie notamment chez Chartier, est devenu le chef star – et étoilé – de la Table du Connétable à l’Auberge du Jeu de Paume. La maison n’ouvre que quelques soirs par semaine, au déjeuner le week-end, pour quelques privilégiés, qui viennent admirer les gestes des cuisiniers.
La cuisine, sous sa vitre transparente, figure une sorte de scène que l’on peut admirer comme au théâtre. Là, une mince équipe s’affaire à composer des mets délicats et fins, comme cette anguille en tourte avec sa fine pâte feuilletée, mariée aux poireaux et aux amandes, qui constitue le morceau de bravoure du moment. Mais le tourteau au chou fleur fumé, caviar et jeunes pousses de Didier Pil ou l’artichaut à cru, étuvé au vin d’Arbois et praliné aux noix font également des entrées de haute volée.
Côté plats de résistance, la langouste confite au lait d’amande avec son aubergine caramélisée (et vinaigrée) au citron et son joli bouillon à la citronnelle, comme la volaille de Culoiseau (dite « culoiselle ») dans le Perche, avec son maïs grillé et ses céréales, plus une fine crème au foin s’imposent avec force. Mais le saint-pierre au barbecue aux épinards et sarrasin soufflé au comté ou encore le ris de veau avec carotte et courge fermentée avec sa confiture d’oignons braisés donnent envie d’y revenir.
Là-dessus, sur une carte éclectique, où la Bourgogne a toujours joué le premier rôle, on déniche des pépites comme ce magnifique Chambolle-Musigny du domaine de la Pousse d’Or en 2017, plein de fruit et de fraîcheur, qui joue l’escorte agile. Et on ne fait l’impasse ni sur le glorieux chariot de fromages des frères Marchand à Nancy, avec son munster affiné, son roquefort artisanal, sa tomme de brebis au piment d’Espelette.
Et l’on fait un sort aux superbes desserts d’une pâtissière italienne pleine de tact : glace onctueuse au citron en liminaire, puis myrtille à l’amande torréfiée, amaretto et vanille, glace cassis, pomme et poire « souvenir d’une Tatin », chocolat grand cru aux graines de caroube et café. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, les prix sont tous en menus-carte et ces derniers ont baissé eût égard à ce qu’ils furent. Un dernier coup de chapeau au beau chariot d’eaux de vie où l’on déniche le beau calvados hors d’âge de Roger Groult à Saint-Cyr-du-Ronceray. Réservez !