Le Magasin aux Vivres à l'hôtel de la Citadelle
« Metz : un ban pour Dufossé ! »
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Attention, poids lourd ! Et depuis le temps qu’on le suit sans complaisance, depuis le Royal Champagne à Champillon-Bellevue , en passant par le Domaine du Roncemay à Aillant sur Tholon, et bien sûr depuis la création de cette Citadelle dans un ancien magasin aux vivres de 1559, face au palais du Gouverneur Militaire de Metz, on peut dire que Christophe Dufossé est passé du stade de bon à grand chef. Depuis près de quatorze ans ici même, il a développé son empire, précisé sa manière, élargi sa palette, doublé sa table étoilée d’une brasserie performante, peaufiné son hôtel, s’apprêtant à « tout casser » pour passer de quatre à cinq étoiles, officiant aussi en Chine, en chef voyageur et conquérant, à Cheng Du.
Dans sa table gourmande devenu très sobre et contemporaine, avec ses grosses tables en bois clair sans nappes, comme des établis d’artisan de haute volée, le gars Christophe, que relaye sa gracieuse épouse Delphine à l’accueil, donne le meilleur de lui-même, avec des produits d’exception, traités au mieux de leur fraîcheur et de leur vérité. Ses morceaux de bravoure? La variation, en amuse-bouche, sur le thème du foie gras marié au coing, la superbe grosse langoustine du Guilvinec snackée, servie avec ses pommes bouchons au safran, haddock fumé et raifort, les belles saint-jacques dieppoise contisées à la truffe fraîche avec un risotto « virtuel » au céleri et une vapeur d’épinards: du bel art sans chichi.
Le point d’orgue du repas? Ce pourrait être cette malicieuse quiche lorraine 2018 revue avec son oeuf parfait et qui constitue le plus malicieux des « plats signature » régionaux. Il y a encore, sur le même thème lorrains, les cuissots de grenouille au poêlon avec son velours de cresson des fontaines, son mousseux à l’ail (même s’il est rose et donc de Lautrec côté Tarn). Il y a encore le filet de boeuf de chez Christophe Noël à Vionville en Moselle, si tendre et savoureux, avec ses oignons doux des Cévennes, son jus fumé, ses champignons sauvages, son tartare servi en consommé, histoire d’achever de vous convaincre de faire ici étape.
Là-dessus, les meilleurs vins d’ici et d’ailleurs, conseillés par l’excellent sommelier vosgien, qu’on connut au Soldat de l’An 2 à Phalsbourg, Alexandre Michel, jouent les accompagnements subtils : frais blanc muller-thurgau cuvée Maddalena des Molozay au voisin Château de Vaux, charpenté saint-aubin de même couleur de Sylvain Langoureau en Côte de Beaune, voluptueux condrieu « la Petite Côte » – la quintessence du viogner avec ses arômes de pêche, de miel, de tilleul et d’abricot!- signé Cuilleron en vallée du Rhône septentrionale, enfin somptueux gevrey-chambertin clos village de Philippe Livera si charmeur, si framboisé en 2015, avant la rituelle mirabelle cuvée noire de Mélanie Demange, histoire de se rappeler qu’on est bien là en Moselle.
Grande table donc, avec son service de classe, son cadre épuré et clair, où les tables semblent se réjouir, communiant dans une sorte d’harmonie heureuse. Où les desserts rappellent les souvenirs d’enfance comme ce « goûter de pain au chocolat » et sa crêpe dentelle plus une tablette croquante de cacao amer et de la confiture de lait façon dulce de leche. Voilà une table qui vaut d’accomplir le voyage à Metz (1h20 en TGV depuis Paris-Metz). A découvrir avant que la mode ne s’y mette!