Ce que l’homme a cru voir de Gautier Battistella

Article du 8 septembre 2018

Il nous avait intrigué avec « Un jeune homme prometteur » (l’histoire d’une jeune auteur venu des Pyrénées qui rêvait d’occire les écrivains qu’il détestait à Paris). Voilà que Gautier Battistella nous charme avec « Ce que l’homme a cru voir« , le mystérieux retour au pays d’un natif de Haute Garonne, rappelé vers les siens par la disparition de son plus vieux copain. Son héros Simon Reijik, polonais par son père (et surtout son grand-père, sorte de héros vagabond ayant traversé la guerre), italien par sa mère, toulousain revenu chez lui, aurait voulu oublier, voire nier ses racines. Grand effaceur de mémoire, spécialiste du blanchissement digital pour les autres, capable de gommer la mauvaise réputation de ses clients, Simon, héros contemporain retrouve sa famille, ses soucis, comme ses drames enfouis. Son ami Antoine est mort, incinéré. A charge pour lui de disperser ses cendres. Ce qui ne fera pas disparaître sa culpabilité ancienne. Il retrouve douloureusement son père, voit s’échapper l’ombre fragile de sa mère, se souvient de la disparition son petit frère. Sa compagne le rejoint, est proche de le quitter ou alors de nouer avec lui de nouveaux liens. On n’en dit pas plus… Même si on n’est pas là pour le suspense. Gautier Battistella raconte avec brio, décrit avec justesse, ajuste son tir, décoche ses flèches, transperce son personnage central comme un Saint Sébastien qui aurait tout raté, cisèle ses formules. Il se rappelle de cette femme qui lui fit connaître l’amour avec ses « seins comme des obus à vous donner envie de bombarder Dresde« . C’est à la fois tendre et cruel, amer et sensible, aigu et lucide. Un retour aux racines comme un aveu de culpabilité. En tout cas un second roman brillamment réussi.

Ce que l’homme a cru voir de Gautier Battistella (Grasset, 240 pages, 19 €).

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Publié le 8 septembre 2018 par

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