Franck Maubert et les ombres du passé

Article du 11 octobre 2015

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On a connu Franck Maubert dans une vie antérieure, entre poésie et journalisme, période qu’il n’a jamais reniée. Au contraire, il en a fait des livres, certains avec succès, glanant le prix Renaudot de l’essai avec « le Dernier Modèle » et jouant, avec habileté, entre narration et autobiographie décalée (« Est-ce bien la nuit? »). « Les Uns contre les autres », c’est le récit très réel, fortement vécu, vivement ressenti, de ses années 1980, entre Bains Douches (rebaptisée « Lumières ») et débuts de la chaîne de télé la Cinq. Il y accompagne le vénéneux Rodolphe, tenancier de boîte, séducteur impénitent, découvre les talents naissants et éclatants de Christophe Mistral (autrement dit Christian Lacroix), joue les assistants malgré lui de Ferdyck, où l’on reconnaîtra aisément Thierry Ardisson. N’oublie pas au passage le parolier Etienne Roda-Gil revu en Roda, auteur, entre autres, d' »Alexandrie/Alexandra » et de quelques tubes pour Alain Souchon. Reste que ce livre n’est pas un document, mais davantage un roman d’apprentissage, comme l’itinéraire intellectuel d’une génération perdue entre sexe, drogue, art, littérature et rock & roll.  Maubert, dit Moby, passe avec agileté entre les lignes, traversant en somnambule éveillé les vies des uns et des autres, conduisant sa Saab, d’une résidence de campagne à l’autre et d’une boîte à un bar (comme celui du Bristol), avec une nonchalance qui confine à l’absence. C’est tout à tour instructif, sincère, poignant, émouvant, distancié, désabusé. Clair dans son propos, finalement joliment prenant. Comme une petite perle à saisir dans le gris ciel de la rentrée.

Les uns contre les autres, de Franck Maubert (Fayard, 214 pages, 17 €).

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Publié le 11 octobre 2015 par

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