Dantzig, l’amour, la haine et le brio

Article du 30 août 2015

Dantzig? Un bavard intarissable, à la fois homme de culture, bourreau éditorial, chroniqueur tout azimut, écrivain éclectique, auteur de dictionnaire (s) ou de fausse (s) encyclopédie (s), poète désaxé, romancier à l’emporte pièce (« En avion pour Caracas », « Nos vies hâtives »). Voilà qu’il nous glisse toutes ses obsessions dans un seul roman fourre-tout qui est la tour de Babel de la rentrée littéraire. Cela se lit comme une ode à la liberté sexuelle, des portraits croisés de bobos parisiens en proie au doute amoureux et à l’émoi existentiel. Il y a là plus d’intellect que de sentiment. Mais on ne va pas refaire l’auteur de l »‘Encyclopédie capricieuse du tout et du rien ».

Il prouve là, au moins, qu’il sait camper des personnages et les situer dans leur époque, ébaucher une intrigue, imaginer des chassés croisés. Surtout, au delà du propos dans lequel des observateurs voit une ode manifeste au « mariage pour tous » et un plaidoyer pour la liberté à disposer de son corps et de son âme, il y a là un brio du propos qui force l’attention et même un peu plus. Rien de ce qui s’écrit là, en près de cinq cent pages, n’ennuie. Dantzig, qui est un conteur d’occasion, est un moraliste qui ne s’ignore pas. Témoins cette succession d’aphorismes qui font de cet OVNI de la rentrée un objet précieusement identifiable. En voilà un florilège: « Les gens qui se vantent de leurs vices n’en ont généralement pas de bien grands », « la postérité est une frivole qui s’ennuie vite », « la France est un pays qui pense par rime, ayant été éduquée par des chansons », « en grandissant, la plupart des hommes ne font que changer de jouets », « si l’enfance est un monde, l’adolescence est un village », « un Français est quelqu’un qui croit tellement ce que les écrivains lui disent qu’il ne pense jamais qu’un moraliste est un monsieur qui a pu avoir une mauvaise digestion », « Paris est une ville où amitié est le nom donné à des habitudes de déjeuners », « un ami est quelqu’un qui vous téléphone alors qu’il est occupé et heureux », « un ami est quelqu’un qui voit le bien et le mal pour nous quand nous en sommes incapables », « l’amour libère de tout sauf de lui même », « je n’ai aucune admiration pour le malheur ». Bref, vous pouvez acheter cette étrange « Histoire de l’amour et de la haine », vous ne pleurerez pas vos 22 €.

Histoire de l’amour et de la haine, Charles Dantzig (Grasset, 476 pages, 22 €).

A propos de cet article

Publié le 30 août 2015 par

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !