Sauver les meubles de Céline Zufferey

Article du 25 août 2017

Un premier roman comme un pied de nez, à la bienséance, aux belles idées, aux belles images: ni autofiction, ni récit d’apprentissage. Céline Zufferey, qui porte un joli nom valaisan et qui est diplômée de la haute école des arts de Berne, se met dans la peau d’un photographe qu’on pourrait croire parisien, aux ambitions déçues. Il se plie aux directives de son « Assistant », jamais nommé ni prénommé, se fond dans une équipe de publicitaires résignés, et se livre à d’innombrable séances de photos pour le catalogue d’une maison de meubles. Ses interlocuteurs l’acceptent dans leur monde. Lui garde sa réserve. Il se laisse séduire par Nathalie, un de ses mannequins fétiches, entretient des rapports affectueux avec une toute jeune « Miss Kikat » chaperonnée par sa méchante mère, se livre, le soir venu, de retour chez lui, à des échanges sur internet avec des voix improbables et se résoudra à rejoindre, en douce, l’un de ses collègues, Christophe, qui le convainc d’accepter de travailler pour un site pornographique. Ce qui ressemble fort à une descente aux enfers est une critique en biais, discrète, furtive, de notre société de consommation tout azimut. Tout est consommation, nous dit Céline Zufferey, et son bréviaire qui mêle échanges cursifs et récit désabusé se lit comme une satire grinçante qu’un rien de romantisme – l’échange amoureux entre le héros et Nathalie – sauve de l’abîme. Mais de justesse.

 Sauver les meubles de Céline Zufferey (Gallimard, 227 pages, 19 €)

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Publié le 25 août 2017 par

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