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La Mitteleuropa d’Olivier Barrot

Article du 9 mars 2015

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Bref, mais dense: un portrait en creux d’un écrivain voyageur – et un écrivain du voyage ce qui n’est pas forcément pareil -, sensible et cultivé, de cette « Europe du milieu » dont le trait commun est la langue allemande. Olivier Barrot, qui nous avait déjà donné un traité d’anglopathie (« Mon Angleterre »), se livre ici un bel exercice de germanomanie, dont le genre n’est guère usité. Il revient à ses origines – une grande mère juive native de Bessarabie, évoque des voyages, effectués dès sa prime jeunesse, entre République Tchèque et Moravie, de Prague à Brno – celle de Kundera et de Bohumil Hrabal, sans oublier la Slovaquie avec Bratislava, une plongée dans Vienne, traversée par le souvenir du « Troisième homme » et la musique d’Anton Karas, un voyage avec un ami puis sa soeur, dans une Europe de l’Est barrée par le rideau de fer, menacée par les chars russes, Budapest, son bastion et son café Gerbaud, Bucarest, Chisinau en Moldavie ou même Interlaken – car la Suisse germanophone ou romanche, mais pas seulement –  participe à ce périple de l’âme. On pourrait y inclure la Bordurie et la Syldavie chères au Tintin de l’Affaire Tournesol et du Sceptre d’Ottokar. On n’oublie pas non plus le Haut Adige côté Sud Tyrol italien, ni la Trieste de Claudio Magris, ni la Transnistrie ou la Bucovine de Czernowitz chère à Gregor Von Rezzori. Bref, voilà une balade dans l’histoire zigzagante de ce continent morcelé, où la Slovénie, l’Autriche, et, bien sûr, l’Allemagne, sans oublier ses colonies, comme la Namibie de Swakopmund à Windhoek, évoquent un passé présent et disparu, savamment recomposé et repensé. Olivier Barrot, qui oeuvre depuis belle lurette à la télévision pour défendre la littérature (« Un livre un jour »), est perméable à tous les modes de création. Il absorbe, telle une éponge, les noms d’écrivains, d’artistes, de cinéastes, les restituent dans les terres d’origine. Se souvient on ainsi que Johnny Weissmuller, qui incarna Tarzan, était natif de Freisdorf, alors partie de l’Empire austro-hongrois,  appartenant aujourd’hui à la Roumanie? Ce petit livre confession, riche, savant, qui charrie mille destins, à ranger du côté du « Monde d’hier » de Zweig, incite formidablement au voyage, ressuscitant à merveille un passé disparu.

Mitteleuropa, d’Olivier Barrot (Gallimard, 105 pages, 11,50 €).

A propos de cet article

Publié le 9 mars 2015 par

La Mitteleuropa d’Olivier Barrot” : 1 avis

  • JEPACI

    03.05.15
    ça m’a rappelé Stephane PIZZELA….il y a bien longtemps …..

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