L'Amphitryon

Discret, modeste, ayant gardé son accent pyrénéen, ce natif de Lannemezan est devenu le bon génie de la cuisine de Bretagne Sud.  Jean-Paul Abadie est un pur autodidacte, rallié à la cuisine morbihannaise avec une foi intacte depuis un quart de siècle. Les Lorientais le savent-ils ?

L’un des meilleurs chefs de France se trouve à leur porte, près d’une zone artisanale et non loin de l’aéroport de Lann-Bihoué. Longtemps propulsé au premier plan par son épouse Véronique, qui fut la meilleure sommelière de la région et a construit chez lui une cave exceptionnelle, il continue seul, depuis le décès de cette dernière.

Ses deux fils, Quentin et Paul, se sont bâti un mini empire relax à deux têtes, avec l’Alto, sous le théâtre, et le Palo Alto, près de la gare. Lui poursuit son chemin avec passion. Sa devise : faire apparemment simple ne l’est pas tant que ça. Et nécessite des produits d’exception, un vrai doigté technique et une science des alliances du goût comme du maniement des épices exceptionnel.

Ces temps-ci, ce poète de l’essentiel flirte avec les trois étoiles. Ses amuse-gueules offrent un exemple de son talent éblouissant : royale d’araignée à la réglisse, huître sur mousseline de carottes aux agrumes, velouté de chou fleur et sa crème fouettée. Sans omettre le bouchon de pomme de terre farci d’une mousseline aux Å“ufs de hareng et émulsion de betterave à la crème d’avocat.

Il y a ensuite les plates de Belon de la rivière d’Etel relevées de Martini blanc et de caviar d’Aquitaine, les raviolis d’araignée avec leur bouillon de volaille aux épices indiennes de la région de Calcutta dites champa-chaï  ou encore le splendide saint-pierre juste raidi au jus safrané d’araignée aux épices. On ajoute le homard sauté à cru avec ses épices et combawa. Plus le filet mignon de veau du Limousin, si tendre, juste cuit au sautoir, flanqué d’un jus aux anchois et escorté d’une purée de céleri aux truffes. Superbe et sans faute !

On achève sur des desserts légers comme l’air. « Toute une histoire au chocolat » qui font se rencontrer différentes textures de cacao plus ou moins amères et une orange qui a gardé son acidité.

Ou encore la pomme avec le clou de girofle et la mousseline de noix de pécan. Le menu ? Il s’appelle « apparente simplicité ». Le génie d’Abadie est, lui, très apparent.