Côté Cour

Emmanuel Nasti © GP

On connaît les frères Nasti qui sont à la fois des restaurateurs de talent et des businessmen gourmands pleins d’allant. Il y a Olivier, le chef, MOF d’Alsace – le seul dans son genre dans la région depuis que Philippe Jego a rallié la côte d’Azur – et Emmanuel, l’architecte de métier, devenu sommelier, homme de salle, concepteurs de demeures neuves. L’empire Nasti va de Kayserberg en quatre ou cinq maisons (une table étoilée, le Chambard, une winstub, une table à tarte flambée, Flamme & Co, une boutique pâtissière avec salon, Koog, un curieux pâtissier, plus un hôtel), à Strasbourg (un Flamme & Co dans la grand rue).

Le service dans la Cour © GP

Les voilà donc au coeur de Colmar, reprenant la succession de Jean-Yves Schillinger, associés au magnat gourmand et oenophile, Marc Rinaldi, jouant la brasserie gourmande et malicieuse, dans Colmar. Il y a aussi la boutique de boulangerie (Côté Four, place des Dominicains), car les Nasti sont infatigables. Le miracle est que leur activisme va de pair avec l’exigence de qualité. On oublie de dire qu’on les connut jadis à Eguisheim où ils étaient à la fois hôteliers (l’Hostellerie du Château), avec des chambres design, démontrant le talent d’Emmanuel, plus au Caveau, bien sûr, d’où Olivier, alors émoulu de ses classes chez Haeberlin et Roellinger, démontrait son savoir-faire.

Presskopf de poissons, crème de raifort © GP

Ces Belfortains d’origine italienne qui sont les plus ardents des Alsaciens savent tout faire. Leur brasserie colmarienne en est le bel exemple. Ils proposent ici des petits menus sympathiques (comme celui de semaine au déjeuner à 19 € ou une formule express à 21 €), un autre à 29 €, servi midi et soir du lundi au samedi, qui leur vaut le bib rouge chez Michelin, sans omettre des plats à partager (belles pièces de boeuf, poulet label rouge avec frites maison), comme des tartes flambées, dont ils sont devenus les experts modernes (nature, gratinée, au munster ou encore au wasabi avec thon et roquette).

Salade de girolles © GP

Mais la cuisine, chez eux, sait se faire savoureuse sans être forcément complexe. Presskopf de poissons et crème de raifort, tartare de thon rouge sauce tzatziki et salade de roquette, tarte fine à la tomate ou encore salade de girolles et parmesan sont quelques unes des choses fraîches qui se trament ici en guise d’entrées savoureuses. Il y aussi les classiques revus (terrine de foie gras et magret au confit de choucroute et gelée au gewurz), les classiques tout court (rognons émincés servis en cocotte Staub avec des nouvelles, escalope viennoise façon schnitzel de porc) et les jolis poissons au gré du marché et de la marée (filet de daurade royale à la plancha, avec haricots mange tout, tomates cerises, huile d’olive et pesto).

Filet de dorade royale à la plancha © GP

Bref, cette simplicité très étudiée, qui demande une belle rigueur dans le choix des produits, fait paisiblement merveille. Le service a lieu dans la cour aux beaux jours, à l’intérieur, sous verrière, dans un cadre moderne, avec banquettes et quelques oeuvres modernes de l’ami Raymond-Emile Weydelich. Les desserts suivent joliment sans peser (ananas Victoria rôti et flambé au vieux Rhum avec sa glace vanille, pêche pochée au siphon de lait et glace pistache).

Escalope viennoise de porc © GP

Le plus: une carte des vins, avec quelques pépites au verre, dont quelques alsaces, bien sûr (muscat d’Albert Mann, riesling Frédéric Emile de Trimbach), mais aussi un sancerre blanc de Vacheron et un pomerol charmeur en 2007, le si plaisant La Croix du Casse. Bref, signée Nasti, voilà une brasserie gourmande qui se porte comme un charme et donne envie de prendre de douces habitudes.

Ananas rôti et glace vanille © GP