Les chuchotis du lundi : Romain Fornell crée Casa Luisa dans la gare de la Muette, Piotr Korzen revisite la cuisine polonaise chez Matka, Blanche Loiseau importe la marque familiale à Tokyo, Fabien Lefebvre ravit Béziers chez Calice, Carole Soubeiran la « toque d’Oc », Boris Caillol et Coralie Semery en Ebullition à Montpellier, Alexandre Chapon réveille Boulogne

Article du 27 mai 2024

Romain Fornell crée Casa Luisa dans la gare de la Muette

Romain Fornell © GP

On avait connu connu Romain Fornell il y a deux décennies, alors qu’il révolutionnait la cuisine du Ritz barcelonais à l’enseigne du Diana. Ce Toulousain, qui fut étoilé à la Chaldette en Lozère, œuvra, dans sa ville natale, aux côtés de Michel Sarran, mais aussi au Pastel de Gérard Garrigues, ainsi qu’au Jardin de l’Opéra époque Toulousy, avant d’accomplir des stages à Paris au Taillevent et chez Alain Ducasse, est tombé amoureux de l’Espagne. A Barcelone, désormais à son compte, il a multiplié les adresses gourmandes :  l’étoilé Caelis, la brasserie Café Emma, Café Turo, Joël Oyster Bar au marché de la Boqueria, Casa Leopoldo dans le Raval, Vistro 49 un bar gourmand, le très design Azul à côté de l’hôtel W, mais aussi l’Hostal de la Gavina à S’Agaro sur la Costa Brava. Le voilà désormais à Paris, grâce à Benjamin Patou, qui gère l’ancienne gare de la Muette dans le 16e parisien, qui a souvent changé de formules au fil du temps : on y a connu jadis Georges Blanc et ses volailles fermières, une brasserie classique du groupe Bertrand, une table de voyage signée Gaston Acurio et dernièrement Andia, sur un mode latino. Place donc à Casa Luisa, ouvert tous les jours de 11h à minuit, offrant un service non stop sans réservation. Romain Fornell y a imaginé une carte de tapas ibères de qualité avec les vins adéquats. Gaité et gourmandise sont au rendez-vous. On en reparle.

Piotr Korzen revisite la cuisine polonaise chez Matka

Piotr Korzen © GP

Soyons précis autant qu’objectif : voilà « le » chef du moment à découvrir à Paris. Il est né à Cracovie, n’a que 29 ans mais a commencé à travailler à l’âge de 15 ans, a démarré dans sa ville natale, avant de choisir la France et d’œuvrer au Jardin du Quai l’étoilé de l’Isle sur Sorgue, chez Thierry Marx au Sur Mesure du Mandarin Oriental, puis chez Cybèle Idelot à la Machine à Coudes à Boulogne-Billancourt. Il vient d’ouvrir une demeure qui lui ressemble : simple et chic, confortable et efficace, proposant la cuisine de son terroir et de ses racines, revues par lui à la manière légère. Le nom du lieu? « Matka« , autrement dire mère ou maman en polonais. Piotr Korzen rend ainsi hommage à celle qui lui a, sinon appris la cuisine, du moins donné le sens des saveurs justes. Son propos : prendre les recettes polonaises de tradition et leur redonner un son neuf, sans tourner le dos à la tradition. Mais en lui donnant plus de légèreté. Ainsi le « chlodnik », autant dire la soupe de betterave glacée avec concombre et aneth ou encore le délicieux « golabki », exquis chou farci revu par lui à l’agneau confit avec riz croustillant et tomate. Les vins de Pologne comme ceux du domaine l’Opéra sont au rendez-vous.

Blanche Loiseau importe la marque familiale à Tokyo

Blanche et l’équipe de Loiseau de France © GP

C’est un double retour au Japon pour la famille Loiseau qui ouvre le 2 juin prochain Loiseau de France, au sein de l’Institut Français du Japon, dans l’immeuble moderne créé par l’architecte star Sou Fujimoto. Dans les années 1990 – de 1992 à 1995 -, Bernard Loiseau avait ouvert la réplique de sa Côte d’Or de Saulieu à Kobé. C’est aujourd’hui sa fille cadette, Blanche, qui, après ses études formatrices à l’Institut Paul Bocuse d’Ecully, avait travaillé en stage dans diverses maisons du Japon, qui ouvre leur nouvelle table moderne également doublée d’une œnothèque et d’une épicerie vantant les produits français. Avec le chef à demeure, Yamaguchi (avec qui Bernard avait ouvert sa maison en 1992), Blanche et son équipe composée de dix personnes dont deux français vanteront les saveurs de tous les terroirs de France. Œuf en meurette et bœuf bourguignon façon Bernard Loiseau, emblématique quenelle de poisson sauce Nantua, filet de maquereau en escabèche et bouillabaisse comme en Méditerranée ou gâteau opéra à la mode Paris figureront notamment au programme.

Fabien Lefebvre ravit Béziers chez Calice

Fabien Lefebvre © GP

On l’attendait au tournant, Fabien Lefebvre, lui que l’on suit depuis belle lurette : il a ouvert Calice en octobre dernier et obtenu l’étoile en mars dans la foulée – un record sans nul doute alors que le Michelin bouclait son édition 2024 en décembre 2023 ! Mais ce MOF 2004 est le sérieux même. Natif de Béziers, il est revenu au pays après avoir accompli « le grand tour » de Paris à la Côte d’Azur (au Bristol avec Eric Fréchon et Michel Del Burgo, au Clos de la Violette d’Aix-en Provence avec Jean-Marc Banzo , au Juana à Juan-les-Pins aux côtés de Chistian Morisset). Il avait fait de l’ex-Framboisier de Béziers devenu l’Octopus une table de qualité. Puis joué les doublures d’Eric Frechon dans ses ouvertures, avant qu’on ne le retrouve à Béziers au Pica-Pica. Dans l’orbite de LJ Hotels & Co (In Situ, le XIX, l’Impérator, l’Hôtel Particulier), il a créé sa table  chic, contemporaine, au rez-de-chaussée d’une demeure année 1920 d’une belle sobriété qui se dévoile après un bref chemin balisé par des arcades métalliques. Il y a là de grandes baies vitrées ouvertes sur l’extérieur, des tables espacées, des recoins cosys, plus un bar en étage. Avec un personnel de salle au taquet, dont son épouse Rachel, qui gère la partie vins, il délivre une partition fine, vive, soignée, mettant en valeur les beaux produits d’ici et d’ailleurs. Cela s’ordonne en trois menus agiles (Immersion, Rencontre, Calice) et les saveurs fusent. Un exemple parmi d’autres ? L’exceptionnelle langoustine royale cardinalisée, avec asperges et sauce bisque, fleur de sureau plus la tête en thermidor. A visiter d’urgence !

Carole Soubeiran la « toque d’Oc »

Carole Soubeiran © GP

Carole Soubeiran, si vous suivez fidèlement ce blog, vous savez tout d’elle ou à peu près. Qu’elle est une pure autodidacte, fille de boucher-charcutier, qu’elle a créé, avec son mari Benjamin, ex DJ saisi par le démon des vins (du Languedoc et d’ailleurs) un bistrot champêtre à Lunel, avec son décor intérieur de bar de nuit, largement inspiré par Serge Gainsbourg et Jane Birkin, quasiment caché dans son patio et qui donne envie d’accomplir pour lui seul le voyage dans son village méconnu de l’Hérault, non loin du Gard. Membre des Toques d’Oc, et seule femme de la bande, Carole cuisine en liberté, selon l’inspiration du moment, au gré des saisons, des arrivages et du marché. Cela donne des choses vives, fraîches, toniques, savoureuses, très gourmandes. Ainsi, les asperges au pistou et basilic avec ses coquillages du Grau du Roi, notamment le murex, puis la splendide fleur de courgette avec langoustine de Méditerranée mariée au pied de cochon, plus des gnocchis à tremper dans une bisque de langoustine : superbe ! On y ajoute le joli sandre flanqué d’artichaut et feuille de figuier, le taureau de la voisine Camargue finement émincé avec cerise, anchois, obione, plus congee (la soupe au riz) des Sansouïre (la lagune camarguaise. A quand l’étoile ?

Boris Caillol et Coralie Semery en Ebullition à Montpellier

Boris Caillol et Coralie Semery © GP

Ils forment le duo gourmand en vogue au cœur de Montpellier. Boris Caillol et Coralie Semery, qui sont passés tous deux dans de grandes maisons (le Petit Nice à Marseille, Troisgros à Roanne, Pic à Valence, Casa Del Mar et Cala Rossa à Porto Vecchio) se sont connus chez Jean et Magali Sulpice de l’Oxalys à Val Thorens. Lui, en cuisine, natif de Briançon dans les Hautes Alpes, elle, de Charente, non loin de Barbezieux, se complètent à merveille. Leur table, « Ébullition », dans un cadre entre pierres (au mur) et bois (au plafond) charme sans mal. Le service est aux aguets et les plats suivent. Deux réussites : les sardines de Méditerranée marinées en escabèche, avec basilic en gelée, en pesto et au naturel, gel de gingembre et tuile au wakamé ou encore l’agneau de l’Aveyron cuit en croûte de sel au foin de la Crau, avec sa purée de noix et d’artichaut, ses artichauts à la barigoule et son jus d’agneau condimenté, qui permet un bel exercice de style au guéridon. A découvrir avant que l’étoile ne tombe ici même…

Alexandre Chapon réveille Boulogne avec Amalthée

Alexandre Chapon et Maxime Thévenin © GP

On l’a connu dans maintes belles tables parisiennes, brasseries, bistrots de charme, voguant de l’une à l’autre avec sa moto et son casque. Alexandre Chapon naviguait jadis, dans le Marais, au Baci, devenu Minime, au Vins des Pyrénées, chez Pamela Popo, chez Julien au Pont Louis Philippe, à l’Enoteca rue Charles V, aux Caves Saint-Gilles mais aussi associé à Gilbert Costes à la Plage Parisienne. L’âge et la sagesse aidant, il a vendu son mini-empire parisien pour s’installer en banlieue parisienne, mais pas n’importe où : à Boulogne-Billancourt, qui constitue, comme chacun sait, les lisières bourgeoises d’Auteuil, non loin du stade Roland-Garros et du méconnu parc Edmond de Rothschild. Associé avec son neveu, Maxime Thévenin, à l’enseigne (mythologique et zieusienne) d’Amalthée,  il propose le fin du fin de la brasserie parisienne néo-costienne, en version franchouillarde, et à prix modérés dans un décor signé Sarah Lavoine. Moules gratinées, artichauts et parmesan, carpaccio de daurade, bar en croûte de sel, mais aussi tartare de boeuf et milanaise de veau avec les belles viandes du voisin André (dont la boucherie se trouve vis-à-vis) font un succès justifié. Cela démarre à peine. Mais la maison, qui sert 7 jours sur 7 et accueille non stop dès 12h, fait déjà 400 couverts/jour. Réservez !

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Publié le  27 mai 2024 par

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