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Christine Ferber

« Niedermorschwihr: éloge de la reine Christine »

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Article du 2 juillet 2010

Son labo, au cœur de son village vigneron, est un atelier des merveilles. Je suis allé revoir encore cette princesse des aigre-doux, experte en glaces (ses vacherins aux fruits sont superbes), jolis entremets, gâteaux délicieux,  qui est non seulement la fée des confitures, mais une femme de coeur. Cette star (au Japon comme à Colmar) est une ouvrière de la nuit qui choisit ses fruits avec amour, sélectionne les meilleures cerises noires, les oranges les plus mûres, les rares myrtilles des bois. Christine Ferber les cuit en bassines de cuivre et imagine des parfums divins. On aime sa griotte au vin ou sa crème de cassis au pinot noir. La « confiture de mon père », qui marie coings et framboises au kirsch, se goûte à la cuiller. Comme un élixir de jouvence.

Pour ceux qui souhaite aller plus loin pour la connaître, je reproduis ci-après l’entrée de mon « Dictionnaire Amoureux de l’Alsace » (Plon) qui la concerne.

Christine Ferber © Maurice Rougemont

« Elle est la fée des confitures, la princesse des aigre-doux. A Noël, la grand-rue de son village, au clocher tortillé et vrillé, immortalisé par Hansi, embaume les saveurs de pain d’épices. La route grimpe vers les vignes, escalade les Vosges, bute sur le village. Le marcheur s’arrête devant sa boutique qui figure le palais de Dame Tartine.

Cela s’appelle le “ Relais des Trois Epis ” : une sorte de pâtisserie-bazar, qui vend la presse, les souvenirs, les moules colorés, les cartes postales. Christine Ferber en est le deus machina. Il y a bien papa Maurice, le frère et la sœur, qui se relayent à l’administration et à la fabrication. Mais Christine donne ici le sentiment de tout faire, d’avoir trois mains, dix bras, dont une pour tenir le téléphone de la maison, répondre au monde entier et rédiger des livres.

“ Le Larousse des Confitures ”, “ la Cuisine des Fées ”, “ les tartes sucrées et salées ”, « Merveilles, délicieuses recettes au pays d’Alice » : voilà quelques uns des titres de ses best sellers pratiques, rédigés durant l’hiver ou à ses heures “ creuses ”. Lesquelles ? On ne sait guère. Car Christine est toujours prise. Elle se lève aux aurores (5h en semaine, 3h30 le samedi), pour être la première à recevoir les beaux fruits du jour, qui seront sélectionnés avec art, frais et sans tache. Elle est à la cuisine toute la journée, fabrique le chocolat, le kougelkhopf, les bredele.

Rien ne s’arrête chez elle. Elle touille les pots de myrtilles ou de groseilles, réinvente, encore et encore, ses aigre-doux, livre la maison aux visiteurs une fois l’an, instaurant sa journée “ portes ouvertes ”, se relayant avec les amis peintres et gourmands. Guy Untereiner, Hansi de Siewiller, Norman Rockwell de l’Alsace Bossue, son complice, ou Raymond-Emile Weydelich, qui a inventé un personnage de fiction picturale Lydia Jacob, mais qui aurait prendre Christine comme modèle, se font, pour elle, marmitons d’un jour.

Christine, qui a le cœur large, donne le sentiment d’être, elle même, l’épicentre de l’Alsace. Sa pâtisserie et son labo jouent le rôle de club de rencontres pour les amis de partout. Le dimanche, elle fait banquet convivial chez elle, pour douze ou quinze, reçoit les gourmets, tel Francis Staub, le prince de la cocotte en fonte, à Turckheim, les fantaisistes, les chansonniers comme l’inénarrable Huguette Dreikaus, “ Zouc alsacienne ”, auteur du drolatique “ Alsamanach ”. Elle propose le jambon en croûte ou les sushis, le baeckoffe ou le coquelet rôti pour tous.

Elle s’impose par sa gentillesse et sa droiture, son talent et sa générosité, son fourmillement d’idées et sa faculté de rassembler. Avec sa copine Hélène Darroze, landaise de Paris, elle est la cheville ouvrière de ces “ Dames Cuisinières ” qui rassemblent quelques unes des femmes chefs qui regardent dépassent nos frontières, avec Léa Linster de Luxembourg, sa « presque sœur », Ariane Daguin de New York ou Barbara Lynch de Boston.

Christine est non seulement une dame de cœur, mais une reine de l’artisanat sucré. Elle n’aurait pu n’être qu’une petite boulangère de village. “ Nous ne sommes que des boulangers, rappelle-toi ”, lui disait, modestement, son père. Et ses co-apprentis chez le grand Peltier, rue de Sèvres, à Paris, ne se faisaient pas faute de lui glisser : “ boulangère, tu n’es qu’une boulangère ”, chaque fois qu’ils la frôlaient dans l’atelier. Formée à l’Ecole Nationale de Pâtisserie de Bruxelles, la petite Christine apprendra tous les rudiments du métier.

Comme elle ne souriait pas, son père avait désigné sa sœur, de deux ans sa cadette, comme patronne de la boutique. A Christine, échoit le dur labeur du pain et des gâteaux. Elle se révèlera une experte en chocolat et une artiste, renommée mondialement, des confitures aux fruits variés et aux associations exquises, imaginant, en outre, de bouleversants aigre-doux, qui se marient avec les viandes comme les gibiers.

L’art de Christine ? Choisir ses fruits avec amour, sélectionner les meilleures cerises noires et les mandarines les plus mûres, les quetsches d’Alsace à la bonne saison, marier la framboise à la violette, la vanille avec la mirabelle, la myrtille des bois avec la réglisse pour en exalter le goût avec une redoutable adresse. Elle a fait connaître le nom de sa maison familiale au monde entier, cuit ses merveilles en bassines de cuivre et réalise, avec sa fidèle équipe, des parfums divins. Il faut la voir travailler avec cœur et ardeur, couverte d’un équipement en plastique blanc digne d’une laborantine experte.

On aime ses cornichons au miel, son confit d’airelles, ses oignons au caramel, ses griottes au laurier, ses pêches de vigne au pinot noir, ses quartiers de tomates pelées au basilic et ses mûres au macis, qui ressemblent à des poèmes, accompagnant à merveille les rôtis mijotés en douceur.  Quant à sa quetsche, sa pomme aux noix, son orange amère ou sa rhubarbe, sa julienne de poire à la vanille, sa myrtille des bois, son abricot bergeron ou son cassis d’Alsace, qui se mangent à la cuiller comme des compotes divines, ils valent le détour, l’emplette, l’expédition. Et le reste est à l’avenant.

Ses glaces sont à se pâmer, ses pâtisseries à fondre, ses biscuits des merveilles pour tous les temps. Son kougelhopf est une leçon de choses, sa forêt-noire une ode à la Mitteleuropa dans ses grandes largeurs, son macaron au chocolat digne des meilleurs, sa bûche aux marrons un rêve d’enfance. Dites moi, comment ne pas aimer la douce Christine ? »

Christine Ferber

18, rue des Trois-Epis
68230 Niedermorschwihr
Tél. 03 89 27 05 69

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Publié le 2 juillet 2010 par

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