Benoît Violier - restaurant de l'hôtel de ville
« Lausanne: changement d’ère à Crissier »
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Frédy Girardet, premier génie reconnu de la cuisine suisse, vif, créateur, malicieux, inspiré, donna sa première gloire au lieu. Philippe Rochat, son sage et lumineux disciple, continua avec brio. Benoît Violier reprend le flambeau, donne désormais son nom à la demeure, poursuit la voie empruntée ici avant lui: celle du produit d’exception, traité au mieux de sa forme, de sa fraîcheur, de sa qualité et de sa vérité. Nous sommes là à Crissier, dans la banlieue de Lausanne, dans ce qui fut l’hôtel de ville d’une commune jadis campagnarde. Les « zones d’activité » ont proliféré depuis trente ans. Mais la magie de cet endroit pas comme les autres demeure.
Mieux: on a rénové le décor avec science. La salle à manger, jadis « gaie comme une chapelle protestante« , selon un observateur éclairé, est devenu moderne, sans ostentation, ni provocation, avec sa moquette beige comme une vague, sa desserte centrale, ses nouveaux luminaires. Le service s’est rajeuni, même si Louis Villeneuve, breton de Rennes, présent là depuis trente sept ans, assure toujours le mouvement des choses, découpe le canard (nantais) comme à la parade, maintient le relais entre les générations.
Benoît Violier, quadra sérieux, MOF de belle lignée (2000), natif de Saintes en Charente Maritime, passé notamment chez Joël Robuchon, Lenôtre, au Ritz, à la Tour d’Argent, présent à Crissier depuis 1996, venu là en chef de partie avant d’imposer peu à peu sa manière et sa présence, instille le mouvement des choses, a travaillé avec les deux maestros maison, ne sélectionne que le produit de haute volée et s’efforce de lui faire rendre un son autre. Dans un labo magnifique, vaste et agrandi, il s’attelle à faire connaître sa manière actuelle, au fil de saison, sans cesser de rendre hommage à ses prédécesseurs avec un chapitre sur la carte joliment nommé « l’Héritage ».
Ce qui vous attend là: une cuisine de fraîcheur et de légèreté, de finesse et d’esprit, à la fois maraîchère et maritime, bien digne d’un Charentais aussi soucieux de pêche et de chasse que des fruits des jardins et des bords de rivières et de marais. Ainsi, le velouté soyeux et végétal, relevé d’un jus d’huître, au caviar osciètre qui vous ravigote le palais en entrée, le fondant estival de bolets « bouchons », comme la plus douce des mousseline, rehaussant le goût du cèpe avec éclat, puis le bar de ligne de la pointe du Raz craquant, car poêlé sur la peau, relevé de son verjus de Féchy perlé à l’huile d’olive extra-vierge. Ou encore le magnifique exercice de la langoustine royale de la mer d’Iroise, géante, si ferme, cuite en aller-retour, juste aiguisé de citron de Menton, de dés d’orange, de gingembre. Royal! Si franco-français en pays vaudois.
Bien sûr, il y a les beaux vins d’ici et de guère loin, qu’un sommelier italien, croisé il y a peu au Park Hôtel de Gstaad commente avec sagacité: vif chasselas vigne en Bayel à Féchy 2011 signé Raymond Paccot au domaine la Colombe, blanc de noir joliment noiseté en 2009 du domaine Daley à Lutry, blanc hermitage somptueux de Didier Joris en Valais, incroyable gamay-gamaret 2009 à la fois fruité, sombre, puissant, des frères Dutruy à Founex sur la Côte ou encore, sur un plateau de fromages qui met les gruyères, les fribourgs, les appenzells en valeur, le joli vin jaune issu de païen (le nom local du savagnin) de Nicolas Zufferey à Sierre.
On n’oublie pas l’hommage au chef d’oeuvre retrouvé de l’époque Girardet avec le rognon de veau « Bolo à la façon de Benjamin », hommage aussi au père du grand Frédy, avec ce rognon tranché par le milieu, servi rosé avec son gras, dans un beurre grésillant, que Benoît Violier accompagne d’une fine et double quenelle de purée robuchonienne: sublime, forcément sublime!
Ni encore le canard nantais signé Burgaud à Challans si tendre, si soyeux, si juteux, avec sa peau caramélisée, cuit tout simplement rosé et lentement au vin de Brouilly: un classique si joliment retrouvé qui donne l’occasion au fidèle Louis Villeneuve d’opérer un bel exercice de style au guéridon.
Ni bien sûr les desserts délicats et frais, comme le marbré aux fruits rouges « à l’italienne » ou encore le sablé d’abricots du Valais aux amandes caramélisées. Là dessus, on applaudit à la fin de la représentation et l’on souhaite longue vie à Benoît Violier, artiste n°1 du pays vaudois, désormais trois fois étoilé pour deux décennies au moins!
Bien sûr, Gérard Rabaey m’était familier! Je note son successeur pour une prochaine visite… Merci!
Connaissez-vous l’existance du restaurant Le Pont de Brent qui a également connu une transition parfaite. La cuisine y est magnifique. Le chef a un talent hors du commun et une précision dans les cuissons et les gouts
Merci pour cet article magnifique et sobre à la foi qui représente parfaitement la ligne que Benoît donne à sa maison
et à la qualité exceptionnel de sa cuisine
Bravo Benoît
Cette institution reste toujours aussi précise, dans l’air du temps! , digne des meilleurs mécanismes de Patek, Vacheron,Moinet, Hublot,…. Bravo Violier!!…. (à du se regaler notre ami Pudlo,hummm!……)