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Flocons de Sel

« Megève : les facéties grandioses du roi Renaut »

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Article du 24 mars 2018

Manu Renaut en cuisine © GP

Voilà un grand chef que vous connaissez par coeur, qui a su rester modeste, collant, à merveille, depuis quinze ans, à son terroir d’adoption. Les menus d’Emmanuel dit « Manu » Renaut ressemblent à des promenades buissonnières, des randonnées en montagne. Les amuse-gueule à picorer sont comme des introductions poétiques à un univers ouaté, nourri du pays savoyard et de l’air des hauteurs : pain soufflé et polenta, lait d’alpage fumé en beignet, champignons de Paris (de la Motte Servolex) et persil, cristalline de champignons ou encore tartelette au chou rouge. Tandis que la neige tombe au dehors, sur les hauts de Leutaz, au pied du Massif de Rochebrune, 4 km à l’Ouest du centre de Megève, dans le site de l’ancienne auberge du Grenand revue en Relais & Châteaux cosy, sobre, clair,  boisé, sans chichi, le ton est donné, avec un talent rare.

A l’entrée © GP

Un chef raconte sa montagne, ses aventures, ses coups de coeur et les fait partager. On sait qu’Emmanuel Renaut, natif de Soisy-sous-Montmorency (Val d’Oise), grandi à Laon dans l’Aisne, où ses parents étaient poissonniers, a pris goût à la montagne et au ski lors de ses séjours aux Houches, en Haute-Savoie, et qu’il a prolongé cette passion lors de son service militaire à Chambéry effectué dans les chasseurs alpins. Ses livres racontent la même histoire (« La montagne et le cuisinier », « Nature d’un chef »), insistant sur le rapport intime et intense du chef (devenu MOF en 2004) et de la nature. De cette jonction naissent des plats comme des poèmes.

Amuse bouche montagnards © GP

Champignons de Paris et persil © GP

Le sommelier Ludovic Namur © GP

S’il existait une école de la montagne buissonnière et gourmande, dont son maître Marc Veyrat en Savoie, Michel Bras en Aubrac, Régis Macron en Auvergne, Jean-Paul Jeunet hier en Franche-Comté, côté Jura, seraient les pionniers, Emmanuel Renaut en serait sûrement le leader, avec cette marque de grand classicisme qui est la sienne, revue et corrigée avec la malice d’un cuisinier moderne. Ce que révèlent l’oeuf de poule fumé avec ses champignons de Paris de Savoie au café, les fins gnocchis de racines, céleri et panais, avec consommé de leur peau au vieux beaufort, l’huile de noix d’Ugine et truffes, les premières asperges vertes du Pertuis (le Luberon, c’est la montagne!) en fine tarte inversée à l’amande et noisette, sans omettre les premières morilles farcies de leurs pieds au jus de butternut infusé à la réglisse. Un symphonie gourmande comme une balade, on vous le disait!

Jaune de poule fumé, champignons de Paris de Savoie au café © GP

Gnocchi de racines et truffes, consommé © GP

Premières asperges du Pertuis © GP

Il y a encore ces grands moments de classicisme retrouvés, magnifiés, telles ces variations sur le thème de quenelle rhônalpine, comme la mousseline légère de gardon avec son jus d’écrevisses et jus d’oignon ou le déjà classique biscuit de brochet et lotte du Léman du pêcheur Eric Jacquier, relevé d’un jus d’oignon grillé et de mélisse, avec ses billes noires et blanches comme des mini-beignets : des pièces d’orfèvre ! Mais le festival, chez Manu Renaut, ne s’arrête pas là, car les menus sont des balades, légères, primesautières, avec des portions fort bien dosées qui permettent d’aller au bout d’un festival gourmand.

Premières morilles, jus de butternut à la réglisse © GP

Mousseline légère de gardon, jus d’écrevisse et d’oignons © GP

Biscuit de brochet et de lotte du Léman © GP

La caille des près avec sa mousseline de trompette de la mort, son jus de genièvre au chou rouge, ses pommes grenailles sautées, ses belles pommes soufflées ou encore la tête de veau aux herbes avec son sabayon vinaigré participent de la même belle aventure. Et la fête continue, car Manu Renaut, qui travailla jadis avec Yves Thuriès à Cordes, a toujours été un féru de sucré. Emulsion noisette, sorbet citron, opaline en sucre, crémeux noisette et noisette concassée, servie en coupe, emblématique glace au lait de la ferme de Joseph à Megève, avec sa compote d’orange et mandarine dans une fine lamelle de meringue suisse, présentée comme un « flocon de sucre » et enfin tarte au chocolat fumé et glace au bois des montagne concluent un repas comme une balade de haute tenue.

Caille des prés et mousseline de trompettes © GP

Tête de veau et sabayon vinaigré © GP

Pommes soufflées © GP

On n’oublie pas au passage les vins de la Savoie nouvelle vague proposés par le malicieux sommelier Ludovic Namur : apremont Anno Domini de Thomas Jean-Noël Blard, chardonnay « sous l’arbre perché » de Sylvain Ravier, son Altesse du Château de Mérande, rouge Prince de Babylone, malvoisie passerillée de chez Blard et fils, avec l’eau de source de la Sasse à Megève et avant la rituelle chartreuse VEP. Oui, Manu est grand, et la Savoie tout entière est son théâtre!

Emulsion noisette, sorbet citron © GP

Flocon de sucre et glace au lait © GP

Glace au bois des montagnes © GP

Tarte au chocolat fumé © GP

Flocons de Sel

1775 route du Leutaz
74120 Megève
Tél. 04 50 21 49 99
Menus : 130 (déj.), 180 (déj.), 270 €
Carte : 180-250 €
Fermeture hebdo. : Mardi, mercredi
Site: www.floconsdesel.com

Flocons de Sel” : 3 avis

  • Ah le biscuit de brochet et lotte,grandiose…….

  • Vincent FERNIOT

    Tu m’as carrément donné envie Gilles! Manu est trop fort… mais ça je le savais… 😉

  • Damien Pirlot de Corbion

    De la haute voltige gastronomique accompagné de l’art de recevoir.
    Nous y allons chaque année depuis presque 10 ans pour notre plus grand bonheur .

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !

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