Hostellerie Jérôme
« La Turbie: Cirino, le fol artiste »
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De Bruno Cirino, vous savez tout ou presque. Ce fol artiste qui travaille à l’inspiration, en fait main, en sur mesure – c’est pareil ou peu s’en faut – nous éblouit depuis 30 ans. On le connut jadis au Grand Hôtel de St Jean de Luz, avant de le retrouver sur la côte au Château Eza. Entre temps, il joua les gourous cuisiniers au Vernet et au Royal Monceau à Paris, veillé comme son ombre par Pier Silli, Vénitien de Sospel et de Monaco, qui l’aida à s’installer à la Turbie.
Cet ancien de Maximin (pour qui il inventa la courgette fleur farcie aux truffes), chef saucier à la Bonne Auberge à Antibes au temps de Jo Rostang, lieutenant de Ducasse alors au Juana de Juan les Pins, natif de Campanie, a été formé en Alsace au Parc à Obernai. Il passa même aux Vannes à Liverdun, l’ex deux étoiles des abords de Nancy. C’est dire que son métier est nourri d’expériences diverses, haut de gamme, que ses racines sont multiples.
Tôt levé, faisant son marché en Ligurie, entre Imperia et San Remo, il ramène le meilleur pour ses clients d’un soir. Ses menus ressemblent à des poèmes, que Marion, son épouse, qui fut harpiste au Royal Monceau, devenue sommelière émérite, met en musique, composant une carte des vins d’exception. Un champagne vineux, boisé, méconnu comme la cuvée des Crayères d’Emile Rodez à Ambonnay, ouvre le bal du repas comme une symphonie, comme une sonate ou comme une fugue.
Un velouté, léger, de petits pois du jardin vous mettra en appétit. Des langoustines puces à la vapeur, relevées de citronnelle, citron, jasmin, vous offrira une ouverture tonique de choix dans l’esprit d’ici. Des gamberoni « il violetta d’Oneglia » au jus Bellini et verveine cristallisé. Une julienne au beurre noisette et aux câpres jouera délicatement le morceau classique façon d’une raie de jadis.
Puis il y aura le culotté homard rôti à cru, aux cerises marasques, eau de vie et brioche comme une fugue composée en Forêt Noire. On n’oublie pas le méconnu centrolophe doré (ou black fish) aux têtes d’asperges rôties et mousserons des prés. Et enfin l’agneau Sambucano des Préalpes avec courgettes, ail doux et thym.
Rien de tout cela ne pèse. Chez Cirino, le geste est léger, les jus sont des souffles. Les vins font des compagnons pleins d’élégance et l’on pourra choisir ici de grands rouges de Provence tarifés là sans forfanterie: domaine de Trévallon 2006 ou château de Pibarnon du même millésime, riches de sève, de fraîcheur, de fruit, évoquant ces cerises locales qui rappellent le kirsch du territoire de l’enfance.
Et, in fine, les desserts jouent le grand opéra: citron dans la garrigue, avec tarte, fruits, fleurs, herbes, ou sublime « pâte déchirée » avec citron, cerises, vanille en glace turbinée ou encore pur chocolat Taïnori au coulant d’orange sanguine et mandarinello. Oui, Bruno Cirino est un grand et Marion est son prophète.
Cinq chambres douces pour l’étape au coeur du vieux village, au pied du Trophée des Alpes, rappelant la victoire d’Auguste sur les troupes ligures. Tout un symbole!
Très bonne table mais service trop long une heure dix entre l’entrée et le plat. Sommes parties en ne payant que les entrées. J’habite Roquebrune Cap Martin et je n’y retournerai jamais. Pas de nappe non plus sur la table. Avouez que pour un gastronome cela fait mauvais effet……