Il Cortile

Stefano d’Onghia © GP

C’est le nouveau deux étoiles italien de Mulhouse, d’Alsace et de France – et qui fut longtemps la seule table étoilée italienne hors Paris. Un cas à part, porté à bout de bras par Stefano d’Onghia, natif des Pouilles, qui anime sa maison avec coeur depuis quelques années, après avoir été le maestro du bon produit italien ans sa ville, à l’enseigne de la Ville de Trieste. Jusqu’ici, on était enchanté par sa manière ensoleillée de proposer le produit net, les belles idées du moment, les menus alertes, les vins divins.

Spaghetti de pomme de terre carbonara © GP

Maintenant, c’est sûr, avec la deuxième étoile, qui fait l’événement, on va lui chercher des poux dans la tête. Tenez, il y a cette jeune serveuse qui vous explique, tout à trac, que la scarmoza fumée, ce fromage de vache ou de brebis, est un « jambon », ce chef de rang élégant qui ne sait guère d’où vient la mozzarella qu’il sert, l’attente entre les plats… Mais Stefano, qui est le seul italien en salle, chez lui, rattrape tout avec chic.

Gnocchi au velours de tomate © GP

Il a réponse à tout, explique avec élégance et ténacité les vertus d’un mets, son idée du moment, la cuisson exacte, conseillant encore le vin, sur une carte imposante, où toute la Botte a sa place, à prix mesurés, un chardonnay Pietrabianca Castel del Monte de San Pietro Vernotico, un viogner Acquadoro de la Maremma toscane de la Tenuta Badiola, un rouge Aiace des Pouilles de Castelo Monaci issu de Salice Salentino, produit avec du Negro Amaro et de la Malvoisie noire: superbes !

Saint-pierre au citron © GP

Bien sûr, on pourrait le titiller sur sa carte des vins et faire remarquer que les noms de domaines sont parfois oubliés – on se demande pourquoi – et  remplacés par des noms de lieux. Ainsi, le célébrissime Sassicaia du marquis Incisa n’est indiqué qu’avec la mention Bolgheri, comme d’autres (Ornellaia par exemple), qui est le nom de la région – celle des super toscans. Mais ce sont là des broutilles. Cessons de pinailler! L’essentiel est ce qui se trame ici même, sous la houlette du chef Jean-Michel Feger, formé au Moulin du Kaegy de Steinbrunn-le-Bas, que relaye Sébastien, le fils de Stefano.

Loup et calamars © GP

Les mets, délicats et fins, se nomment spaghetti de pommes de terre façon carbonara, avec une râpée de truffes noires, sphère de tomates confites et mozzarella di buffala à la chiffonade de culatello de Zibello, l’aristo du jambon d’Emilie-Romagne,  gnocchi de pommes de terre au velours de tomates Datterrino et scarmozza fumée, risotto (un poil surcuit) aux poires et taleggio avec éclats de noix et râpée de truffes noires.

Ravioli aux pousses de brocolis et anchois © GP

Et puis encore ces fins ravioli aux pousses de brocolis (« cime di rapa ») et filets d’anchois en tempura, en hommage à mamma d’Onghia: tout cela est bel et bon séducteur et ensoleillé comme le saint-pierre en croûte de citron et parmesan, avec sa poêlée d’asperges et de petits pois, son émulsion au citron ou encore le filet de loup de mer grillé aux courgettes au thym et calamars poêlés joliment tomatés.

Involtini de volaille © GP

On note encore l’involtini (roulé) de poularde fermière aux tomates et basilic, avec sa spirale de pommes de terre, plus les desserts dans le ton: apérol spritz version sucrée, variation en gâteau ou semi-freddo et sorbet au citron de Sicile ou rencontre choco-banane et cacahuète. Séduisants sur un registre italien revu à la française. Comme l’esprit même de cette demeure qui va changer. Dans quelques mois (fin août), Stéfano casse tout  et recommence. Une bonne occasion pour le revisiter dans son coin historique et charmeur  au coeur du vieux Muhouse.

Variation autour du citron © GP