Auberge du Père Bise

C’est un rêve à fleur d’eau, au bord du lac le plus pur d’Europe. Les ombrages cachent la vue d’en face. Le balcon de bois de ce beau chalet est comme une carte postale dédiée à la Savoie de toujours. Talloires, douce villégiature que fréquentèrent les grands de ce monde, est là comme une invite.. L’auberge mythique, celle du Père Bise, a été revue tout charme. Il y a les chambres et suites exquises, leur mobilier jouant l’Art déco ou les années 60 en revival. On sent qu’un coup de jeunesse est passé sur cette maison centenaire.

Le service de salle s’est modernisé. Hubert Couilloud, qui fut le directeur historique de la Côte d’Or à Saulieu, époque Bernard Loiseau, a pris les commandes du lieu. Le second Christophe Le Digol, Normand rallié à la Savoie,  est à son affaire. Sophie a eu de soin de garder sur sa carte les classiques de la maison, qu’illustrèrent le grand-père Marius (en salle) et la grand mère Marguerite (en cuisine) et le père François. Même s’ils ont été parfois dépoussiérés. Jouant la Savoie Nouvelle Vague avec ardeur. Ainsi, l’oeuf de poule mollet avec son crémeux de parmesan façon César, la langoustine en cappuccino au guacamole d’avocat et banane, avec son émulsion à la citronnelle, la féra du lac servie fumée en duo de foie gras avec sa gelée de groseille et pomme cassis.

Il y a aussi le veau de lait en carpaccio avec son croquant de navet et caviar d’esturgeon blanc, sa crème de raifort, comme l’omble chevalier poché ou meunière et la poulette de Bresse Miéral braisée à l’estragon servie pour deux. C’est du classique revu, simplifié, éclairé, allégé, donnant sa place au produit – tout particulièrement rhônalpin – avec brio. On ajoute la poulette de Bresse Souvaroff farcie de truffes et de foie gras, délicatement cuit à l’étouffée dans une cocotte lutée. Ou encore l’impérial gratin d’écrevisses « pattes rouges »  façon Marguerite Bise, servi avec son riz basmati et son joli sabayon d’écrevisses à l’orange.

Là dessus, les vins de la Savoie nouveau style, choisis par le sommelier François Roy, blanc d’Allobrogie issu de chasselas, produit aux vignes du paradis à Ballaison « Un matin face au lac », signé Dominique Lucas ou mondeuse tradition 2009 de Michel Grisard au Prieuré Saint Christophe à Fréterive font des alliances de classe. Les issues – classique chariot de desserts avec son gâteau Marjolaine, comme jadis chez Point à Vienne, ou soufflé Marguerite aux macarons et  sorbet griotte – sont délicates et du même bon tonneau, réconciliant tradition et novation. On l’aime cette « Mère Bise » faisant subir à sa demeure un bain de jouvence!