Le Divellec

« Le Bocuse de la mer (Paris 7e) »

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Article du 14 septembre 2010

Jacques Le Divellec chez lui © GP

Il est le Bocuse de la mer, il est mon menhir à moi. Conseiller au long cours, marin rochelais amoureux du grand vent et du bel océan, Jacques le Divellec accueille chez lui, à  Paris, à deux des Invalides et de l’Assemblée Nationale, ministres et députés, mais aussi le tout venant des gourmets amoureux de la mer dans un cadre bleuté orné de marines de Corbassière. Assurément, le grand Jacques est un cas. Cas de longévité d’abord. A quatre-vingt printemps sonnés, ce colosse breton néo-charentais, parisien depuis belle lurette, réussit à être partout à la fois.

On l’a connu à Bruxelles, donnant des leçons de maintien marin au SAS Sea Grill, devenu depuis le restaurant vedette de la capitale belge – il concoctait à l’époque des repas tout saint-jacques et tout muscadet avec son copain Métaireau. On l’a revu en Crète, au Elounda Beach, donnant le « la » de la meilleure table hellène des côtes de la Méditerranée, imaginant un turbot en souvlaki ou des tzakizi de crustacés. Ce pigeon voyageur aux airs de thon géant, vite renfrogné, si l’on fait une remarque sur sa brandade de morue pas fine ou sur une sur-cuisson, a été grand manitou conseilleur à Saint-Domingue ou à Madrid (la Villa Magna), sans omettre Jérusalem (le Hilton).

Belle assiette d'huîtres © GP

Formateur de bons chefs, à qui il donne volontiers des cours de connaissance du produit marin et de sa cuisson, Jacques le Divellec est unique en son genre. On dit que les voyages forment la jeunesse. Avec lui, on peut dire qu’ils font reculer la vieillesse. Ce bourlingueur de toutes les mers se moque du décalage horaire comme d’une guigne et ignore le mot retraite. Chez lui, à l’angle de la rue St Dominique et du boulevard des Invalides, à deux pas du dôme doré, il continue de créer, d’imaginer, mais sans peser.

Tartare de barbue et émincé de langoustines © GP

Les alliances terre/mer, comme le thon marié au foie gras, les langoustines en folie, les meilleures huîtres creuses et plates, de Marennes-Oléron ou de Prat Ar Coum, le tourteau décortiqué, le tartare de barbue (ce soir, c’était du mérou) avec ses langoustines taillées en fin carpaccio, comme les palourdes au thym, les huîtres frémies à la laitue et à l’eau de mer, les petits rougets avec leur délicate purée de petits pois : voilà sa marque qui est celle de la vivacité. Quant au turbot à l’arête, avec sa béarnaise de homard et ses pommes Pont Neuf, il figure un plat emblématique, malin en diable, prouvant, à qui en douterait, que le poisson traité comme de la viande ne le cède en rien à celle-ci sur le registre du goût et de la générosité roborative.

Jacques Le Divellec a le don, le « knack » comme disaient les Beatles. Pédagogue surdoué, dégageant la sympathie d’emblée, il s’est fait comme personne l’apôtre de produits méconnus, les pistes – ces mini-calamars de Port-Vendres – comme le capitaine – ce savoureux poisson d’Afrique. Il peut mis à défendre à tue-tête le homard canadien comme le cabillaud sauvage norvégien (le skrei). Auteur de cent ouvrages sur la mer, sur la cuisine des diverses religions, il a imaginé un homard  à la presse, comme le canard du même nom, qui fait date.

Râleur, il accepte volontiers la critique… lorsqu’elle est positive. Il fut jadis accueilli par la chronique parisienne avec une volée de bois vert, lorsqu’il reprit, il y a belle lurette, l’Ambassade toujours vide, qui fut aussi l’Acapulco. Trente cinq ans après, il est toujours là. Et les rieurs de ses débuts sont morts ou en retraite.

Une marine de Corbassière © GP

Dopé à l’iode, d’une énergie sans faille, Jacques Le Divellec, qui est un monument indétrônable, est de la même trempe que feu-Manière au Pactole, puis au Dodin-Bouffant – qui vira un inspecteur Michelin se plaignant des toilettes à la turque ou un client récalcitrant râlant contre l’attente du canard et le recevant en pleine figure (« tiens, le canard, il vole »).

Il a souvent eu raison avant les autres. Ce qu’on ne lui pardonne guère. On ne l’oublie pas : cette grande gueule râleuse et bravache possède un cœur en or.

Le Divellec

107, rue de l'Université
Paris 7e
Tél. 01 45 51 91 96
Menus : 50, 65 (déj.), 160 (truffes), 200 (homard) €
Carte : 90-150 €
Site: www.le-divellec.com

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