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« Là où nous sommes, il n’y a pas de crainte urgente » (hommage au 7e)

Article du 4 septembre 2010

Place René Char © GP

J’aime le carrefour Bac/StGermain/Raspail et je ne savais pas qu’il avait été rebaptisé René Char. Ce dernier, il est vrai, résidait non loin, en son domaine parisien, rue de Chanaleilles. Je ne sais si l’hommage que lui est ainsi rendu lui aurait plu. Lui, l’homme du Sud, était celui des lisières, de l’ombre plus que du soleil, de la fraîcheur d’un intérieur pavé de tommettes, plus que des terrasses bruyantes sur des avenues roulantes. « Là où nous sommes, disait-il, il n’y a pas de crainte urgente. »

On ne m’en voudra pas de déplacer la formule hors de son contexte et de la rapprocher de celle de Blondin, qui, lui, habitait du côté de l’Ecole Militaire au temps des Enfants du Bon Dieu. « Là où nous habitons, les avenues sont profondes et calmes comme des allées de cimetière », notait-il.  Le quartier, le 7e, tout le Faubourg St Germain, entre Invalides, les quais de Seine, aux abords du musée d’Orsay, et Sèvres-Babylone, a gardé sa légendaire discrétion.

Carrefour Bac/StGermain/Raspail © GP

Si Tourette, rue du Bac, n’existe plus, on vient toujours boire un verre au Sancerre ou au Sauvignon. Reste que la gourmandise y est devenue largement élitaire, avec Passard à l’Arpège, Robuchon en son Atelier, Le Divellec, roi du poisson, Alain Ducasse au Jules Verne, Christian Constant, empereur de bouche rue Saint-Dominique (Violon d’Ingres, Café Constant, Fables de la Fontaine, les Cocottes).

Le quartier compte aussi des boulangers fameux (Secco ou Malo), des fromagers vedettes (Marie-Anne Cantin, Quatrehomme, Barthélémy), des chocolatiers d’élite (Hévin et Chaudun). Les bistrots bien nés (P’tit Troquet, Pied de Fouet, Babylone, Fontaine de Mars) ou carrément vedettes (l’Ami Jean) jouxtent les restaurants stratégiques (le snob Lei, la Cigale Récamier vu par Idoux, le Bon Accueil, qui a redonné une âme aux Anges, Vin sur Vin) ou les bons rapports qualité-prix (Maupertu, Nabuchodonosor, Clos des Gourmets) qui s’affirment. Ayant le chic de ne pas se faire voir, le 7e a une devise : pour vivre heureux, vivons gavés, mais sans en parler.

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Publié le 4 septembre 2010 par

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