Flâneries en terre d’Alsace
Article du 6 juin 2010
Histoire d’amour. Notre collaborateur Gilles Pudlowski signe un dictionnaire de l’Alsace. Savoureux.
Par Valérie Peiffer

Avec 207 entrées, ce dictionnaire est une invitation à une flânerie alphabétique à travers la région mais aussi dans le jardin secret de Pudlo. Car le critique littéraire qu’il est également se livre au détour des lettres. « J’y ai mis toutes mes passions, et notamment la littérature et l’art » , confie Gilles Pudlowski, devenu critique gastronomique par hasard. Et d’avertir dès les premières pages : « C’est ma vision des choses, d’un pays à part, d’une région en or, la plus belle qui soit, la plus franche du collier et la plus facile à aimer, qui est ici livrée. » Mais les Alsaciens s’y retrouveront : l’auteur, tout Lorrain d’origine qu’il soit, connaît le « catéchisme » de la région. A « Choucroute », n’écrit-il pas : « La meilleure choucroute pour un Alsacien ? Toujours celle de sa mère ! Chacun possède sa recette. Jamais son dosage exact » ?
Pour autant, ces clins d’oeil drolatiques ne doivent pas faire oublier les entrées plus savantes. Ce vade-mecum érudit est l’occasion de relire des textes sur l’Alsace en général et sur Strasbourg en particulier rédigés par de grands auteurs comme Gérard de Nerval ou Victor Hugo. Mais aussi de découvrir que le grand amour de Goethe fut une Alsacienne de Sessenheim, Frédérique Brion, et que « La Marseillaise » fut d’abord le chant de l’armée du Rhin… Pour ceux qui auraient oublié leurs classiques, c’est le prétexte de replonger avec délectation dans les traditions avec la famille Oberlé de René Bazin, de se laisser séduire par les tableaux de Louis-Philippe Kamm – dont certains figurent dans les réserves du musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg – ou encore de retourner au musée Ungerer pour y savourer les truculents dessins de ce « génie alsacien du XXe siècle » .
Haltes gourmandes. Le lecteur cheminera aussi dans les villes qui ont marqué cet infatigable « Hexagone-trotteur » comme Barr, Ebermunster et son abbatiale baroque, ou encore Graufthal et ses maisons troglodytiques. Sans oublier Strasbourg, dont les clés lui ont été offertes par Tony Schneider, le créateur de L’Arsenal, qui fit « connaître Strasbourg à toute l’Europe intellectuelle en visite dans sa ville au cours des années 80 ». Mais Pudlo ne serait pas Pudlo s’il ne nous offrait quelques haltes dans des winstubs, « ces temples esthétiques gourmands et populaires de l’art de vivre, des conservatoires du savoir-manger et du savoir-boire locaux », ou chez ses amis restaurateurs. Ecrits d’une plume vive, ses récits pleins d’humour et de l’autodérision si chère au caractère alsacien enchanteront les « vrais » et les « faux » Alsaciens. Et, à n’en pas douter, les Français de l’intérieur
*Le Dictionnaire Amoureux de l’Alsace – Mise en vente le 3 juin, 816 pages, 26 euros.